
Paris, le mardi 29 novembre 2011 – Les études épidémiologiques concernant les transsexuels (ou plutôt transgenres) sont rares à ce jour. Cependant, grâce à l’engagement militant de certaines associations, une lente évolution tend à se faire jour. Témoin de cette volonté des instances sanitaires officielles de mieux connaître les enjeux de santé associés à cette population, l’enquête menée par une équipe de l’INSERM et publiée la semaine dernière par le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH). Afin de mieux déterminer les « caractéristiques sociodémographiques (…) le parcours de transition médicopsychologiques et le statut VIH » des trans, différentes données ont en effet pu être tirées des réponses à un questionnaire auto-administré, transmis par le biais d’associations, de quatre équipes hospitalières et d’une cinquantaine de praticiens.
53,9 % des hommes voulant devenir femmes se définissent comme des femmes
Au total, 381 questionnaires ont pu être exploités, dont 73,8 % émanant d’hommes aspirant à devenir femmes (les MtF) et 25,2 % de femmes se sentant hommes (FtM). A la question : « Sur le plan de l’identité du genre, comment vous définissez vous actuellement », 53,9 % des MtF se sont déclarés « femmes » et 53,4 % des FtM des « hommes ». Par ailleurs, 22,8 % des MtF se considèrent comme des « femmes trans » et 12,8 % comme des « trans ». Les auteurs notent à cet égard que les personnes se déclarant « femmes » ou « hommes » ont été principalement adressées par des professionnels de santé (60,7 %), tandis que seuls 18,6 % des personnes se déclarant « hommes ou femmes trans » ont été recrutées par le biais de la sphère médicale.
La fin du massacre
Néanmoins, une très grande majorité des sujets interrogées (83,5 %) ont eu recours à une démarche diagnostique auprès d’un psychiatre afin d’obtenir un « certificat attestant du trouble de l’identité de genre ». Ils sont également très nombreux (85,3 %) a être traités par des hormones. Les opérations génitales ne concernent a contrario qu’un nombre restreint de sujets : 22 % ont eu recours à la chirurgie de stérilisation et 29,4 % à la chirurgie de réasignation de sexe. Cependant, chez ceux n’ayant pas encore eu recours à ces interventions, 66,9 % des personnes interrogées disent les souhaiter à l’avenir. Les auteurs donnent en outre concernant ces interventions des informations édifiantes eu égard aux contre-performances des hôpitaux publics. On observe tout d’abord que 66,4 % des personnes interrogées ont déclaré avoir bénéficié de ces interventions à l’étranger. Ce choix pourrait être jugé pertinent quand on sait que 58,7 % des personnes ayant été opérées dans le secteur public français considèrent avoir très bien vécu leur parcours, alors que ce pourcentage s’élève à 94,1 % chez ceux ayant été opérés en clinique privée (12,1 % de l’échantillon) et à 77,7 % pour celles ayant choisi l’étranger. Surtout, près de la moitié des sujets (48 %) pris en charge dans des établissements publics français ont déclaré avoir connu des complications, contre seulement « 17,6 % et 23,7 % respectivement de ceux ayant réalisé l’opération en clinique privée en France ou à l’étranger ». Ces résultats scandalisent l’association Act up qui demande aujourd’hui « la fin du massacre ».
6,9 % des MtF sont séropositifs
Soulignons enfin que cette enquête donne différentes précisions sur le profil sociodémographique des personnes transgenres et sur leur statut VIH. Il s’agit d’une population plutôt jeune (69 % des personnes interrogées ont moins de 50 ans), le plus souvent d’origine française (85,4 %), fortement diplômées (43,8 % ont un diplôme universitaire) et dont 35 % déclarent avoir des enfants. La prévalence du VIH est chez les MtF très supérieure à la moyenne nationale puisqu’elle s’élève à 6,9 % chez ceux ayant déjà réalisé un test, augmentant jusqu’à 17,2 % chez ceux ayant déjà eu recours à la prostitution.
Aurélie Haroche