
Paris, le lundi 19 août 2013 - Avec le Lévothyrox, 44 autres médicaments parmi les plus courants, sont en rupture de stocks, selon une liste régulièrement mise à jour sur le site de l’ANSM (Agence nationale de sécurité des médicaments) et 17 autres devraient bientôt les rejoindre. Si des alternatives existent dans certains cas lorsque l'on dispose de traitements équivalents, ce n'est pas le cas pour toutes les molécules de la liste.
Selon le Code de santé publique, être en rupture de stock signifie pour un pharmacien qu’il est dans l’incapacité de fournir ses clients dans un délai de trois jours, faute d’approvisionnement. Ce qui semble survenir de plus en plus fréquemment, d’où cette inquiétude qui monte tant chez les malades que dans les officines.
La faute à la mondialisation
Ces approvisionnements défaillants de médicaments s’expliqueraient en partie par la mondialisation: « En effet, les marchés pharmaceutiques mondiaux sont actuellement très nerveux, les laboratoires travaillent à flux tendu. Ceux qui sont en situation de monopole, notamment, ont du mal à répondre à la demande internationale croissante. De fortes commandes (par exemple celles du marché chinois) peuvent alors dérégler cette mécanique » déclare François Bruno, directeur adjoint du service surveillance des marchés à l'ANSM, dans Le Parisien qui a publié samedi dernier la liste des 45 médicaments en rupture de stocks.
Cette liste recense les médicaments faisant l’objet de difficultés d’approvisionnement en France qui sont connues par l’ANSM (et publiées sur le site de l’Agence). En y regardant de plus près, parmi les 45 listés, certains médicaments ont des équivalents ou peuvent être substitués mais d’autres n'ont aucune alternative thérapeutique disponible. C’est le cas par exemple du Myambutol (antituberculeux) en solution injectable et comprimés ou du Synacthène injectable. Pour ce qui concerne la rupture de stock de ce dernier, elle était décrite dans le point d’information de l’ANSM daté du 15 juillet avec la précision suivante : « L’ANSM a été informée par le laboratoire Sigma-Tau que la rupture de stock de Synacthène 0,25 mg/ml solution injectable, annoncée début avril aux professionnels de santé, est effective en ville et imminente à l’hôpital, tandis que la distribution de Synacthène Retard 1mg/ml suspension injectable est limitée à l’hôpital pour les seules indications jugées prioritaires et sans alternative… Aucune autre spécialité équivalente n'a pu être identifiée en Europe. Le recours à une spécialité commercialisée outre-Atlantique est envisagé, mais les firmes interrogées ne sont pas en mesure, à ce stade, de fournir le marché français. L’ANSM et les sociétés savantes concernées collaborent pour mettre en place des mesures préservant l’intérêt des patients… ».
D’autres médicaments sont en rupture de stocks : traitements anticancéreux (Amétycine, Caryolisine..), contre le sida, certains troubles cardiaques ou gastriques ou encore nombre d’antibiotiques. 17 autres traitements couramment utilisés deviennent de plus en plus difficiles à trouver en officine, amoxicilline et Célestène par exemple pourraient bientôt rejoindre la liste fatidique. Toutefois ces derniers peuvent être remplacés par des produits équivalents ou proches.
Substitution encadrée
Il n’est pas toujours aisé de trouver une parade aux ruptures de stocks annoncées. Lorsqu’elle semble acquise, comme par exemple la récente substitution du Lévothyrox par son alternative italienne, l’Eutirox , l’Académie de médecine recommande un encadrement strict de sa mise en place Si les 3 millions de malades traités par du Lévothyrox ont fait les premiers la triste expérience de la pénurie (voir notre article Thyroïde : la rupture de stocks de Lévothyrox inquiète), ils auraient pu être rassurés par les nouvelles mesures d’approvisionnement via l’Eutirox dès le 14 aout dernier. Et bien non : « les préconisations de l'ANSM paraissent insuffisantes » à l’Académie nationale de Médecine qui préconise dans un communiqué "que soient publiées les teneurs en principe actif (L-thyroxine) du Lévothyrox, de ses génériques et de l’Eutirox, afin d’ajuster la posologie au mieux et le plus tôt possible en cas de substitution rendue incontournable par la pénurie du princeps. Et ce, afin de ne pas mettre les prescripteurs et les pharmaciens face à un problème insoluble engageant parfois une lourde responsabilité".
Dominique Thibaud