Résistance aux antibiotiques : gare au catastrophisme ?
Paris, le mercredi 6 février 2019 – Parmi les nombreuses menaces
sur notre santé, la résistance aux antibiotiques est régulièrement
mise en avant. Alors que la pertinence de certaines inquiétudes
peut être discutée, le caractère inéluctable du développement de la
résistance bactérienne confère à cette menace une tangibilité bien
plus certaine. Cependant, les alarmes lancées, qui prédisent la fin
de l’antibiothérapie à court terme si aucun mouvement d’ampleur
n’est déployé, ne présentent-elles pas des accents trop
catastrophistes ? Les prévisions mathématiques qui sont fondées sur
des modèles statistiques offrent-elles une parfaite vision de la
réalité ?
Des modèles discutables
Ces interrogations sont soulevées par une équipe de chercheurs de
l’Institut hospitalo universitaire (IHU) Méditerranée. Après la
publication par le centre en décembre de données signalant
l’absence d’augmentation de la résistance aux antibiotiques au
cours des quinze dernières années en se fondant sur des analyses
ayant concerné près de 100 000 bactéries prélevées sur des patients
marseillais, quatre chercheurs de l’IHU publient dans l'
European Journal of Clinical Microbiology and Infectious
Diseases une étude qui invite à un autre regard sur la
résistance bactérienne aux antibiotiques. Les quatre signataires,
Didier Raoult (microbiologiste), Marc Leone (réanimateur),
Jean-Marc Rolain (pharmacien) et Yanis Roussel (doctorant) ont mené
une enquête auprès de praticiens hospitaliers d’unités de soins
intensifs français. L’étude des 250 questionnaires exploitables
suggère un phénomène marginal : « près de 90 % font état de
moins d’un mort tous les deux ans dans leur service suite à une
impasse thérapeutique liée à la résistance aux antibiotiques et 42
% n’en signalent aucun », indiquent-ils. Dès lors, face aux
écarts entre ces observations qui devraient être approfondies et
les statistiques fréquemment avancées qui considèrent que la
résistance aux antibiotiques tue entre 5 000 et 12 000 personnes
chaque année en France, les praticiens écrivent : « Ces modèles,
aussi complexes qu’ils paraissent être, ne sont pas assez
confrontés à la réalité du terrain. Ils utilisent des estimations
et des extrapolations dont la fiabilité est questionnable ».
Convaincus que la question de la résistance aux antibiotiques doit
nécessiter une attention soutenue, ils préconisent la mise en place
d’un « registre national de la mortalité liée aux bactéries
dites multirésistantes, pour mieux connaître les menaces réelles et
écarter celles qui ne sont issues que de l’imagination de
statisticiens ». Cette suggestion sera-t-elle entendue alors
que les stratégies contre ce phénomène sont régulièrement
réévaluées ou la perception des praticiens marseillais sera-t-elle
démentie ? Affaire qui mérite d’être suivie.
Depuis le temps que l'on entend parler de résistance aux antibiotiques, je suis tout de même surprise que des molécules que l'on utilise en ville depuis plusieurs décennies donnent encore les résultats que l'on attend!
Donc merci aux auteurs de cette étude de "recadrer" un peu.