Le risque de chutes augmente tout particulièrement après l’âge de 70 ans, sous l’influence de plusieurs facteurs, tels l’hypotension orthostatique, la prise excessive de divers médicaments, notamment antidépresseurs, ou psychotropes, le déclin cognitif, les troubles de la vision, de l’équilibre et de la marche, sans oublier la diminution de la force musculaire. Ce risque augmente avec le nombre des facteurs précédents. Des essais randomisés en bonne et due forme ont pourtant démontré l’efficacité de certaines stratégies visant à prévenir ces chutes, au travers de l’association de plusieurs mesures pour la plupart très pragmatiques. Il semble que leurs résultats soient restés lettre morte dans la pratique courante, en dépit des exhortations générales émanant des médecins, des soignants, des assureurs et des groupes impliqués de loin ou de près dans la prise en charge de ces malades. C’est le cas, par exemple, d’une association du Connecticut, la CCFP (Connecticut Collaboration for Fall Prevention) qui incite à transposer dans la pratique médicale courante les mesures préventives, dont l’efficacité a été établie par les essais contrôlés précédemment évoqués.
Cette association a diligenté une étude non contrôlée, de type pragmatique, qui a comparé les pratiques médicales, au sein de deux régions, l’une, le Connecticut dans laquelle les médecins ont été sensibilisés à la prévention des chutes du sujet âgé (> 70 ans), l’autre dans laquelle la prise en charge médicale s’est résumée aux mesures usuelles.
Les interventions médicales (2001-2004) ont consisté à évaluer le risque de chutes et à adopter des stratégies préventives adaptées, telles la diminution des prescriptions de certains médicaments, ou encore l’incitation à la marche et à la lutte contre les troubles de l’équilibre. L’évaluation des résultats (2004-2006), exprimés pour 1000 patients-années a pris en compte : 1) les lésions graves consécutives aux chutes, qu’il s’agisse des fractures, notamment celles de la hanche, les traumatismes crâniens, ou encore les dislocations articulaires ; 2) la nécessité de soins médicaux plus ou moins complexes.
A l’état basal, la fréquence des lésions graves provoquées par les chutes a été estimée (pour 1000 sujets-années) à 31,2 dans la région de référence et à 31,9 dans la région des interventions. Au cours de la phase d’évaluation, les valeurs correspondantes ont été respectivement de 31,4 et 28,6, soit un odds ratio ajusté (ORA) de 0,91. Entre l’état basal et la période d’évaluation, la fréquence du recours à des soins médicaux, en rapport avec les chutes, est passée de 68,1 à 83,3 pour 1000 sujets-années dans la région de référence, versus 70,7 à 74,2 dans l’autre région, soit un ORA de 0,89. Ces résultats plaident en faveur des interventions visant à prévenir les chutes du sujet âgé, tout au moins celles qui ont été validées par des essais randomisés.
Ces mesures simples et pragmatiques n’en imposent pas moins une modification en profondeur des habitudes des médecins et des autres soignants, impliqués dans la prise en charge des patients âgés.
Dr Peter Stratford