
Paris, le samedi 6 octobre 2018 – Alors que la France s’était
caractérisée ces dernières années sur le sujet par la
multiplication d’expérimentations parfois confidentielles et
éparses, depuis le 15 septembre la téléconsultation jouit d’un
régime (presque) clair de prise en charge par la Sécurité sociale.
Beaucoup veulent voir dans cette mesure le déclic qui contribuera
au grand essor de la télémédecine en France !
Télémédecine et cybersécurité : même combat pour Axa !
Ainsi, Guillaume Lesdos, co-fondateur de Medaviz, plateforme spécialisée dans la télémédecine, est déjà convaincu que les médecins vont « adopter massivement » cette pratique. Les appétits financiers mais aussi politiques sont en tout cas déjà attisés. Plusieurs annonces ont ainsi marqué ces dernières semaines : Doctolib et le Syndicat des médecins libéraux (SML) ont par exemple indiqué se lancer dans l’aventure de la télémédecine. De son côté Axa est le partenaire de la région les Hauts-de-France pour la mise en place d’un programme de téléconsultation médicale qui vient d’être présenté. En pratique, un espace de télémédecine va être installé à Marconne (au sein de la commune des sept vallées dans le Pas-de-Calais). Les patients y seront guidés par une infirmière et pourront entrer en communication avec un médecin (le médecin traitant du patient ou un praticien des environs ou à défaut un médecin conseil d’Axa) qui conduira la consultation grâce à des outils connectés. « L’enjeu pour notre territoire est d’apporter des solutions pragmatiques mais efficaces pour améliorer l’accès à la santé » s’est félicité le président de la région les Hauts-de-France, Xavier Bertrand dans un communiqué publié par la région, qui, incidemment, précise qu’Axa a également signé un partenariat avec la région pour le développement des emplois numériques et de la cybersécurité des entreprises.
Des incertitudes sur l’adhésion des médecins
Face à ces enjeux que l’on pressent parfois plus économiques que sanitaires, les médecins sont-ils réellement prêts à cette révolution de la télémédecine ? Certaines enquêtes semblent confirmer l’émergence d’un réel engouement. Ainsi, un baromètre réalisé au printemps par IPSOS auprès de médecins généralistes et spécialistes révélait que plus des trois quart d’entre eux se déclaraient favorables au développement de cette pratique. Les généralistes interrogés signalaient par ailleurs qu’ils pourraient consacrer jusqu’à 20 % de leur activité hebdomadaire à la téléconsultation. Cependant, d’autres résultats et enquêtes invitent à la nuance. Ainsi, un sondage flash réalisé sur le site du Quotidien du médecin indique que 76,4 % des praticiens n’ont pas l’intention de proposer d’actes de télémédecine à leurs patients. Par ailleurs, le baromètre IPSOS signalait que 80 % des généralistes continuaient à nourrir des interrogations sur l’absence d’examens cliniques complets, tandis que 84 % des spécialistes et 59 % des généralistes manifestaient le besoin d’éclaircissements sur le cadre réglementaire. « Il y a beaucoup d’incertitudes sur le niveau de formation et d’adhésion des médecins » reconnaît le président de l’association Agir pour la télémédecine, Mickaël Chaleuil, cité par Boursorama et l’AFP.
Divergences de position sur le champ de la télémédecine
Parmi les zones d’ombre pouvant constituer un frein, il note entre autres : « De nouveaux acteurs naissent chaque jour, beaucoup de mutuelles et d’assurances s’y intéressent, des sociétés étrangères aussi. C’est très épars et on n’arrive pas à avoir un état des lieux ».
Cette multiplicité contribue à des divergences entre les promoteurs de la télémédecine. Ainsi, certains veulent miser sur l’installation de télécabines (à l’instar d’Axa ou de H4D) quand d’autres veulent d’abord se limiter à des actes de suivi. « On ne va jamais remplacer des examens physiques » observe en effet l’entreprise Qare (pour laquelle a été réalisé le baromètre IPSOS). La persistance de ces hésitations pourrait être dommageable aux situations dans lesquelles il ne fait aucun doute que la télémédecine soit pertinente, comme pour les patients en situation de handicap. Mais en la matière, les initiatives n’ont souvent pas attendu le coup d’envoi de l’Assurance maladie.
Aurélie Haroche