Après la grève, les médecins battent le pavé

Paris, le jeudi 5 janvier 2022 – Les médecins libéraux manifestent ce jeudi à Paris, toujours pour obtenir la revalorisation du tarif de la consultation à 50 euros.

Un mois après la manifestation du 1er décembre, les médecins libéraux sont à nouveau dans la rue. Ce jeudi, ils ont été appelés par le collectif « Médecins pour demain » à manifester à Paris. La manifestation est partie du Panthéon à 13h pour rejoindre le ministère de la Santé Avenue du Ségur. Un rassemblement qui doit constituer le point d’orgue d’une grève historique débuté le 26 décembre et qui doit s’arrêter à la fin de la semaine.

La revendication principale du mouvement est toujours la même : augmenter le tarif de la consultation à 50 euros, afin de créer un « choc d’attractivité pour que les jeunes médecins s’installent en médecine libérale » selon les termes de Médecins pour demain. Si c’est le collectif informel de médecins qui est à l’origine du mouvement, l’appel à la manifestation a été relancée par plusieurs grands syndicats de la profession: le SML, qui a promis d’être « présent en force », la FMF qui veut « défendre la médecine libérale tant qu’il reste un peu d’espoir de ne pas la voir disparaître » et l’UFML, dont le président, le Dr Jérôme Marty, n’a pas hésité à appeler à « marcher sur le ministère de la santé ».

François Braun accepte d’augmenter la consultation…mais pas à 50 euros

A défaut de marcher sur le ministère, une délégation de six médecins grévistes y ont été reçus à 14h par le ministre François Braun. Mais le Dr Marty disait ce matin « ne rien espérer » de cette rencontre car « Emmanuel Macron doit faire des annonces vendredi au monde de la santé ». « Ils vont nous ressortir la carte des assistants médicaux ou des IPA, mais le bateau est à la dérive » prédit pessimiste le généraliste de Fronton.

Les propos de François Braun ce matin lors d’une interview sur France 2 laissait en effet peu d’espoirs que les revendications des grévistes soient entendues. « Soyons raisonnable » a lancé le ministre au moment d’évoquer un possible C à 50 euros. « Je suis prêt à augmenter le tarif de la consultation dès lors que les besoins de santé des Français sont remplis ; d’accord on augmente la consultation, mais je veux que les 650 000 Français en maladie chronique aient un médecin traitant, je veux qu’on puisse avoir un médecin la nuit, le week-end, c’est des droits et des devoirs, c’est donnant-donnant » a expliqué l’ancien urgentiste dans un discours qui risque d’être diversement apprécié chez les praticiens libéraux.

Tout comme la Première Ministre Elisabeth Borne et le directeur général de la CNAM Thomas Fatôme, qui ont vivement critiqué le mouvement ces derniers jours, sans doute François Braun compte s’appuyer sur la désunion qui règne chez les médecins libéraux. Car contrairement à celle du 1er décembre, la manifestation de ce jeudi n’a pas été soutenue par tous les syndicats. La CSMF, MG France et Avenir Spé notamment n’ont appelé ni à manifester, ni à faire grève, préférant soutenir leur propre mouvement de colère (grève de la permanence du samedi matin pour la CSMF, « vendredi de la colère » pour MG France).

La CSMF et MG France très circonspects sur le C à 50 euros

La revendication de porter le tarif de la consultation à 50 euros a du mal à passer dans ces deux syndicats. « Nous nous battons davantage pour avoir une hiérarchisation des consultations avec un acte de base à 30 euros et un suivi des patients polypathologiques à 60 euros » explique diplomatiquement le Dr Sylvaine Le Liboux, secrétaire général de la branche généraliste de la CSMF. Présidente de MG France, le Dr Agnès Giannoti est plus tranchée dans son opposition. « Nous partageons la même colère, mais le C à 50 euros, c’est exactement le contraire de ce que nous souhaitons, ce n’est pas comme cela que l’on va lutter contre la désertification médicale et améliorer l’accès aux soins des Français » explique la généraliste parisienne.

Tous ces débats reprendront dans des conditions sans doute plus apaisées la semaine prochaine, avec la reprise des négociations conventionnelles entre l’Assurance Maladie et les syndicats, en vue de l’élaboration de la future convention médicale. Quand au collectif Médecins pour demain, s’il exclut de poursuivre la grève une semaine supplémentaire, il promet de « continuer le mouvement la semaine prochaine avec des mesures différentes mais avec une limite d’activité ».

Grégoire Griffard

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Vos réactions (3)

  • Cela changera quoi ?

    Le 08 janvier 2023

    En-dehors des bénéfices ? Feront-ils des gardes de nuit ou WE ?
    Trouvera-t-on un médecin référent ? Cela m'étonnerait.
    Médecin de 73 ans encore actif je vois bien que la nouvelle génération ne sacrifie pas sa vie à la médecine.
    Et la réforme de Braun, ex public. Ce qui rapporte aux cliniques, ce qui coûte au public.
    N'étant plus chef de service j'ai vu à quelle allure les jeunes ont pris leurs aises...
    Comment se fait-il, qu'un médecin qui bascule dans la politique oublie d'où il vient, à en devenir simple expert comptable.

    Pr André Muller

  • Assistant

    Le 08 janvier 2023

    Pourquoi personne ne dit que pour avoir un assistant il faut augmenter sa clientèle de 10 % pour avoir une aide de l'état pour les charges mais uniquement durant 3 ans ! Que rien n'est prévu après 3 ans, que l'on ignore le montant des salaires et que dans un groupe il faut augmenter les locaux si plusieurs médecins consultent en même temps, que les consultations durent 5 minutes !
    Pourquoi personne ne dit qu'en campagne les gardes de week-end et de nuits sont obligatoires ?
    Il faut arrêter de mentir aux gens pour nous faire passer pour des profiteurs. Encore une fois on demande aux généralistes de pallier aux insuffisances du système en essayant de nous culpabiliser.

    Dr P Lamoussière

  • Honoraires des MG

    Le 12 janvier 2023

    Après 40 ans de médecin généraliste (métier que j'ai adoré malgré les contraintes) et de syndicalisme, la retraite a sonné avec grand bonheur ce 01/01/2023 ; c'est sûr que les 10-12 dernières années, avec l'obligation du tout informatique, du tout dématérialisé, ont été très pénibles, avec une baisse d'activité d'environ 25 % (8 à 10 actes en moins par jour, alors qu'il y a pénurie de médecins !), et l'augmentation de nos charges (Carmf, Urssaf, frais de logiciels, de TPE, d'abonnement de banque de médicament...). Moralité finir à 67 ans à 3,5-4 Smic de l'heure, à BAC+10, 50-60 heures/semaine, pas de résidence secondaire, je ne paye pas l'ISF, je ne roule pas en voiture de luxe ou de sport... Mes enfants n'ont pas du tout envisagé "de faire médecine", et il y a 10-12 ans, j'ai franchement pensé à arrêter mon métier. Mais l'impéritie de tous nos élus (Présidents, Ministres, Sénateurs, Députés... tous coupables) depuis les années 80, diminution du numérus clausus d'abord à 5000 (merci Mitterrand et consors), et moins de 3500 en 1992-93 (merci Aubry-Johannet), ont conduit à ce que je n'arrive pas à abandonner mes patients âgés, et/ou handicapés qui ne trouvent plus de médecin traitant, car nos jeunes consœurs et confrères touchent 50 à 60 000 euros pour s'installer, mais ne travaillent que 4 jours par semaine, et ne font plus de visite à domicile (chronophage et très mal payée)...
    Je ne comprends toujours pas, pourquoi les associations de patients, de malades, ne portent pas plainte contre l’État et ses représentants imprévoyants, incompétents (mais très nombreux et très bien payés pour un résultat catastrophique), pour mise en danger de la vie d'autrui, inégalité de l'accès aux soins, et escroquerie, puisque l'on paye des cotisations pour la sécurité sociale et des mutuelles, sans avoir la garantie d'avoir un médecin référent, d'un accès aux soins en temps et en heure, et malheureusement de soins de qualité en raison du manque de personnel médical et paramédical (je salue leur dévouement +++). Tous ces élus ont été incapables de prendre les bonnes décisions pour éviter, puis remédier à ces problèmes.
    Quant à la stagnation des honoraires, c'est la faute des syndicats qui, désunis, ont été incapables de nous défendre correctement, et ont accepté des conventions médicales inacceptables (forfait, ROSP...) et honoraires les plus bas d'Europe... Quelle honte d'avoir à ce point maltraité une profession pour laquelle au minimum 10 années d'études sont nécessaires. Doubler la valeur du C (oh pardon du GS !) : l’État n'acceptera pas de doubler et de passer d'un coup à 50 euros, même si c'est tout à fait légitime ; je pense qu'il faut exiger 40 euros, tout de suite, et ID à 20 euros pour les visites (+ IK à 2-2,5 euros du km), 45 euros en 2024, et 50 euros à l'horizon 2025. Ça me parait plus "facilement" négociable... Bon courage à ceux qui restent...

    Dr P Decoopman

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