ARN interférant : la révolution thérapeutique

Depuis plusieurs décennies, les cliniciens sont spectateurs des avancées majeures dans le domaine de la biologie cellulaire et moléculaire. Ces travaux, souvent récompensés (parfois de prix Nobel), se sont traduits par des avancées majeures sur les plans diagnostique et physiopathologique. En particulier, les anticorps monoclonaux ont profondément modifié l’approche thérapeutique des maladies inflammatoires et oncologiques. Agir directement sur l’expression génétique restait encore pour beaucoup d’entre nous du domaine de la science-fiction malgré les promesses des biologistes fondamentaux.

Du prix Nobel…

En 2006, Andew Z. Fire et Craig C. Mello ont reçu un prix Nobel pour leurs travaux sur un mécanisme d’inactivation génétique fondé sur l’interférence ARN (ARNi). Ce sujet peut sembler abscons pour le non initié mais il s’agit d’une révolution car cet ARNi permet de limiter les conséquences d’un gène muté en ciblant l’ARN messager spécifique inhibant ainsi la synthèse de la protéine cible.

au patisiran

« Encore un moyen pour guérir une culture cellulaire ou une souris transgénique ? » ne manquera pas de s’interroger le clinicien sceptique… Que nenni ! Les résultats cliniques chez les patients sont bel et bien là comme l’a montré l’efficacité majeure du patisiran dans une maladie orpheline : l’amylose héréditaire à Transthyrétine (TTR). Pour rappel, cette maladie sévère évolutive est la conséquence d’une mutation du gène TTR entrainant l’accumulation de protéines mal repliées sous la forme de fibrilles dans les nerfs et au niveau cardiaque et digestif.

Une incontestable efficacité

David Adams, expert international de cette affection, a rapporté lors de ce congrès les résultats de l'étude internationale multicentrique contre placebo de phase III APOLLO, qui a porté sur 225 patients recrutés dans 19 pays. Il en ressort que le patisiran est efficace sur les manifestations neurologiques périphériques évaluées avec le score composite mNIS+7. Cette étude randomisée en double aveugle a rapporté une diminution de 6 points de ce score après 18 mois de suivi alors que le groupe contrôle s'est aggravé de 28 points. La fréquence des effets indésirables était similaire dans les 2 groupes.

La voie est ouverte

Ce travail représente un évènement majeur car il est le premier à utiliser ce nouveau principe thérapeutique avec brio. Ces résultats offrent des espoirs de traitements aux patients souffrant de cette pathologie rare et dont l’évolution ne pouvait être auparavant influencée que par une greffe hépatique.

Dr Christian Geny

Référence
Adams D et Ole S : Patisiran, an investigational RNAi therapeutic for patients with hereditary transthyretin-mediated (hATTR) amyloidosis ; results from a phase 3 APOLLO study. Journées de Neurologie de Langue Française (JNLF, Bordeaux) : 10 - 13 avril 2018.

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