AVC ischémique aigu : faibles répercussions de la pandémie sur la rapidité des soins

La pandémie de Covid-19 a eu des répercussions importantes sur la prise en charge de nombreuses pathologies y compris dans le cadre de l’urgence. Cette notion a déjà été vérifiée pour ce qui est des syndromes coronariens aigus, mais que s’est-il passé dans le cas des accidents vasculaires cérébraux (AVC) ischémiques aigus ? La monopolisation des équipes et des services d’urgences par les patients atteints de la Covid-19 a-t-elle retenti de manière significative sur les délais de prise en charge de cette urgence vasculaire ? Comment les unités neurovasculaires et les centres de neuroradiologie pratiquant la thrombectomie mécanique ont-ils géré la situation engendrée par la crise sanitaire ?

C’est à ces questions que répond une étude étatsunienne à laquelle ont participé 14 de ces centres spécialisés entre le 1er janvier 2019 et le 31 juillet 2020. La fréquence de la thrombolyse par voie intraveineuse (TIV) idéalement effectuée dans les 60 minutes qui ont suivi les symptômes inauguraux a été estimée dans deux fenêtres temporelles : entre le 1er mars et le 31 juillet 2019 (pré-Covid-19), et aux mêmes dates de 2020 (celles de la première vague de l’épidémie aux Etats-Unis). Le délai entre l’imagerie cérébrale et la thombectomie ou la thrombolyse a été également pris en compte en tant que variable continue.

Quatre minutes de retard seulement pour la thrombolyse

Sur les 2 955 patients finalement inclus dans l’étude et traités sur place (sans nécessité d’un transfert), 1491 ont été admis au cours de la période pré-Covid-19 et 1464 la période Covid. Quinze pour cent d’entre eux ont bénéficié d’une TIV. Pendant l’épidémie, cette dernière a été moins souvent réalisée dans les conditions optimale (< 60 minutes), soit par rapport à la période précédente un odds ratio (OR) de 0,61 [IC 95%, 0,38-0,98]; p =0,04), le retard médian ne dépassant pas cependant 4 minutes (p=0,03). La prise en compte des variables associées à la précocité de la TIV, ceci dans le cadre d’une analyse multivariée n’a guère modifié la valeur du risque précédent (ORa, 0,55 [IC 95%, 0,35-0,85]; p <0,01).

Le retard provoqué par l’épidémie s’explique essentiellement par l’allongement du délai entre l’imagerie cérébrale et l’administration du bolus de l’agent thrombolytique choisi (valeur médiane, 29 minutes [écart interquartile, 18-41] versus 22 [écart interquartile, 13-37 min]; p =0,02).

En revanche, pour ce qui est de la thrombectomie mécanique, aucune différence significative entre les deux périodes n’a été mise en évidence, le délai médian entre la TDM et la ponction artérielle (door-to-groin puncture) étant voisin : soit 83 minutes [écart interquartile, 63-133] pendant l’épidémie versus 90 minutes pendant l’épidémie écart [interquartile, 73-129] minutes; p =0,30). Les retards dans la TIV ont été plus marqués pendant les mois de juin et juillet.

Au cours de la pandémie de Covid-19, la prise en charge des AVC ischémiques aigus aux Etats-Unis ne semble pas avoir été affectée de manière significative. Pour ce qui est des patients traités sur place au sein de l’équivalent de nos unités neurovasculaires ou des unités de neuroradiologie, sans nécessité de transfert, seule la TIV a été retardée de quelques minutes, les délais de réalisation la thrombectomie n’étant pas affectée par l’épidémie. Dans la mesure où « time is brain », chaque minute compte et c’est sur le délai entre l’imagerie et la TIV qu’il conviendrait de gagner du temps. Des résultats qu’il conviendrait de vérifier dans des pays à organisation des soins différente.

Dr Giovanni Alzato

Référence
Siegler JE et coll. Influence of the COVID-19 Pandemic on Treatment Times for Acute Ischemic Stroke: The Society of Vascular and Interventional Neurology Multicenter Collaboration. Stroke. 2021 ;52(1):40-47. doi: 10.1161/STROKEAHA.120.032789.

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Vos réactions (1)

  • Nous sommes en France

    Le 08 février 2021

    Certes, mais comme vous le soulignez en conclusion, nous sommes en France, où l’organisation est à plusieurs égards différente.
    Ainsi l'expérience alsacienne fut différente, dans une région frappée de plein fouet par la première vague.
    On aurait bien aimé pouvoir en dire autant sur l'absence ou quasi absence d'impact, mais les choses n'ont assurément pas été aussi simples.

    Dr Francis Vuillemet

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