Ce qu’il en coûte d’essayer la stimulation magnétique transcrânienne pour traiter la dépression

Une équipe d’Australie rappelle que le gouvernement de ce pays a engagé un financement important pour l’essor de la stimulation magnétique transcrânienne répétitive (SMTr) chez les patients atteints d’une dépression résistante au traitement. Mais les auteurs soulignent un problème important : les preuves de l’efficacité de cette intervention en sont encore à leurs balbutiements. Autre préoccupation : plusieurs praticiens ont formulé des craintes concernant l’utilisation de cette SMTr. Alors que l’efficacité de la SMTr est ainsi remise en question, un argument fréquent avancé par ses promoteurs est qu’en raison de sa bonne tolérance, il n’y a aucun mal à l’essayer. Mais les auteurs contestent cette position. Car en plus de son coût « considérable » du point de vue financier, la SMTr aurait aussi un « coût clinique », méconnu et donc négligé.

Efficacité aléatoire et technique chronophage

En pratique, la SMTr est en effet proposée à des patients déprimés présentant un risque de suicide, pour lesquels une thérapie rapide et efficace est indispensable. Mais dans ce cas, proposer un traitement dont l’efficacité n’a pas été réellement prouvée signifie que les patients sont susceptibles de continuer à souffrir. Les auteurs estiment que proposer une thérapie à l’efficacité aléatoire « coûte cher » pour le patient en ce que cela contribue à prolonger l’impact négatif de la dépression sur le cerveau.  Par ailleurs au-delà de son efficacité incertaine et de son rapport bénéfice/coût modeste, cette thérapie se révèle très chronophage pour le praticien, car elle demande une surveillance régulière et prolongée du patient, un temps qu’il serait peut-être plus judicieux de consacrer à une alternative thérapeutique plus efficace.

L’argument de la bonne tolérance ne suffit pas

Faisant un parallèle avec le cancer, les auteurs déclarent qu’il est déraisonnable de « rester les bras croisés », en proposant une thérapie avec un faible espoir de bénéfice thérapeutique, juste car elle serait « bien tolérée. » Il importe aussi de ne pas délivrer un traitement coûteux, alors que le phénotype clinique sur lequel il serait très efficace n’a pas été identifié. Sans un tel phénotype clinique, on risque en effet d’administrer ce traitement indifféremment à toutes sortes de patients.  Alors que la recherche d’un traitement rapide de la dépression s’avère « essentielle », les auteurs estiment que la tentation d’éviter cette question du rapport bénéfice/coût de la SMTr risquerait au contraire de conduire à une perte de confiance dans la relation thérapeutique, un thème « au cœur de la psychiatrie. »

Dr Alain Cohen

Références
Malhi GS et coll.: What are the real costs of rTMS? Australian & New Zealand Journal of Psychiatry 2021; 55(09): 841–843.

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