
Paris, le jeudi 24 août 2017 – Bientôt la rentrée : les salles d’attente des médecins généralistes vont se remplir de personnes en bonne santé requérant un certificat médical de non contre-indication à la pratique de disciplines sportives. Depuis l’année dernière et le choc de simplification voulu par François Hollande, ces demandeurs sont moins nombreux. Les formalités administratives ont été allégées : lors d’une demande de renouvellement de licence, un certificat médical ne doit désormais être produit que tous les trois ans et non plus tous les ans. Certaines disciplines cependant ne sont pas concernées par cette réforme : l’alpinisme, la plongée, la spéléologie, la boxe, les sports supposant l’utilisation d’une arme à feu, un véhicule terrestre à moteur ou un aéronef et le rugby (à VII, XV et XIII). Concernant ces différents sports, le certificat doit être renouvelé chaque année et un arrêté du 24 juillet publié ce 15 août au journal officiel détaille la liste des examens complémentaires qui devront être réalisés. Ces préconisations ont été établies en collaboration avec la Société française de médecine de l’exercice et du sport.
Un ECG systématique chez certains jeunes sportifs ?
Cependant, certaines des recommandations entérinées par
ce texte ne font pas l’unanimité et notamment la nécessité de
réaliser un électrocardiogramme de repos chez tous les joueurs de
rugby à XV et à VII en compétition ou hors compétition dès l’âge de
12 ans (tous les trois ans jusqu’à 20 ans puis tous les cinq ans
jusqu’à 35 ans, tous les deux ans à partir de 43 ans et tous les
ans après 50 ans). La mort subite d’adolescents ou de jeunes
adultes au cours d’activités sportives est de fait un évènement
régulièrement rapporté et dramatique. Pour le prévenir, certains
ont suggéré la réalisation d’ECG chez ces athlètes, telles les
sociétés françaises et européennes de cardiologie. Cependant, les
études sur lesquelles reposent ces recommandations seraient d’un
faible niveau de preuves selon le Collège national des généralistes
enseignants (CNGE) qui dans ses communiqués sur le sujet considère
que cette faiblesse ne permet toujours pas de recommander la
réalisation d’un ECG systématique et régulier chez les jeunes
sportifs.
Pourquoi les rugbymen ?
Fort de cette controverse, le Syndicat national des
jeunes médecins généralistes (SNJMG) critique l’arrêté publié la
semaine dernière et en dénonce en tout état de cause des
incohérences. De fait, si l’on veut considérer (en dépit de la
faiblesse des études) pertinente la réalisation d’un ECG, pourquoi
restreindre cette pratique aux seuls rugbymen (à XV et à VII) et
pas aux autres sports collectifs supposant un même risque de mort
subite (et alors qu’aucune différence n’est retrouvée dans la
littérature permettant de distinguer les rugbymen à l’exception de
ceux jouant en première ligne) ?
Vers une récidive de l’engorgement ?
D’une manière générale, le SNJMG déplore les multiples
failles de l’arrêté. Il critique tout d’abord sa date de
publication : au cœur du mois d’août, à quelques jours de la
rentrée « sans la moindre annonce officielle ». « Il
incombe donc dès à présent aux médecins généralistes, installés et
remplaçants en exercice, la tâche d’annoncer aux personnes
concernées (et à leurs médecins) les nouvelles mesures
réglementaires », remarque l’organisation. Un travail
d’explication qui pourrait être chronophage, ce qui pourrait être
préjudiciable aux autres patients.
Equilibriste
Par ailleurs, tout en se déclarant « conscient des impératifs de sécurité sanitaire entourant la pratique de sports à risques », le syndicat s’interroge sur la lourdeur de certains examens à réaliser, tels les angio-IRM devant être passés tous les trois ans par tous les boxeurs amateurs à partir de 40 ans. Surtout, pas plus que la consultation destinée à l’obtention du certificat d’aptitude, les examens complémentaires ne sont pas pris en charge par la Sécurité sociale, ce qui risque de détourner un certain nombre de Français de la pratique sportive, redoute le SNJMG. « Autant dire que ces mesures vont sérieusement entraver l’accès des français, notamment des plus démunis, à ces disciplines mais elles vont aussi mettre en péril l’existence de nombreux clubs sportifs : au final, une énorme incohérence avec la politique de santé publique visant à développer la pratique sportive de tous les français » juge l’organisation. Aussi, le syndicat invite-t-il les pouvoirs publics à revoir leur copie.
Pas sûr cependant que cet appel trouve un écho favorable, tant il est difficile de trouver un équilibre entre prévention des risques et encouragement à la pratique sportive. Sans doute un certificat d’aptitude n’est-il pas inutile pour un tel exercice.