
Paris, le mercredi 29 mars 2023 – Les derniers chiffres de l’OFDT et de SPF confirment que la consommation de cocaïne est en augmentation, avec un impact grandissant en termes de santé publique.
Depuis plusieurs années, les addictologues, mais également les services de police, tirent la sonnette d’alarme sur une augmentation importante de la consommation de cocaïne en France. Cette drogue, initialement « réservée » à quelques privilégiés (traders, stars du show-biz, grands patrons…) se serait démocratisée, à cause d’une baisse des prix, et toucherait désormais toutes les strates de la société. Une impression que les derniers chiffres de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) et de Santé Publique France (SPF) confirment.
Selon le dernier rapport de l’OFDT publié ce lundi, environ 600 000 adultes Français ont consommé de la cocaïne au moins une fois dans l’année et plus de 2 millions l’ont déjà expérimentée. Si 8,4 % des plus de 25 ans avaient déjà consommé de la cocaïne en 2017, ils n’étaient que 3,9 % dans ce cas en 2000. Le nombre d’usagers a également augmenté : 1,6 % des adultes en consommaient au moins une fois par an en 2017, contre seulement 0,3 % en 2000. La cocaïne est ainsi devenue la deuxième drogue illicite la plus consommé en France, derrière le cannabis. Seule bonne nouvelle, la cocaïne intéresserait moins les adolescents : en 2022, seulement 1,4 % des adolescents de 17 ans avaient déjà testé cette drogue, alors qu’ils étaient 3,2 % en 2014. Contrairement au cannabis, la cocaïne touche donc davantage des jeunes adultes âgés de plus de 25 ans.
Un marché de la cocaïne en plein essor
L’OFDT confirme également le phénomène de « démocratisation » de la cocaïne, dont l’usage se répand dans des milieux sociaux-professionnels moins avantagés, à la faveur notamment d’une forte baisse de prix. Le gramme de cocaïne s’échange désormais entre 50 et 70 euros, soit quatre fois moins qu’en 1990 même en tenant compte de l’inflation. Une chute du cours de la cocaïne liée à l’explosion de la production et du trafic : 1 982 tonnes de cocaïne ont été produites dans le monde en 2020, contre 1 134 tonnes en 2010 (augmentation de 75 %) et 27,7 tonnes ont été saisies en France en 2022, contre 10,8 en 2011. L’augmentation de la consommation de la cocaïne est un phénomène européen : 3,5 millions d’européens consomment de la cocaïne régulièrement et dans certains pays, la consommation a doublé (Irlande) voir quadruplé (Croatie) ces vingt dernières années.
Une augmentation de la consommation de cocaïne qui n’est pas sans conséquence sur la santé. Alors que 14 % des Français pensent que cette drogue n’est dangereuse que si elle est consommée quotidiennement, SPF révèle ce lundi ces chiffres sur les conséquences sanitaires de la prise de cocaïne. Entre 2010 et 2022, ce sont plus de 23 000 passages aux urgences pour consommation de cocaïne qui ont été recensés par le système de collecte de données hospitalières OSCOUR. Les trois-quarts des patients sont des hommes, âgés en moyenne de 32 ans.
Une drogue de plus en plus toxique
La cocaïne concerne désormais 21 passages aux urgences sur 100 000, soit trois fois plus qu’en 2010. Les régions les plus touchées sont la Guyane (44 passages pour 100 000) et la Provence-Alpes-Côte-D’azur (41 passages), mais le phénomène est en forte augmentation dans d’autres régions, notamment en Bretagne, où le nombre de passages aux urgences pour consommation de cocaïne a été multiplié par huit en douze ans. Selon SPF, cette augmentation des intoxications pourrait s’expliquer par la circulation d’une cocaïne plus concentrée en principe actif et par un trafic de nouveaux produits de synthèse (NPS) vendus comme de la cocaïne aux usagers mais qui sont en réalité plus puissants et plus toxiques. Au total, 130 personnes sont mortes d’une surdose de cocaïne en France en 2020.
D’autres indicateurs démontrent l’impact sanitaire grandissant de la consommation de cocaïne. Le nombre de sollicitations faites au dispositif Drogue info services concernant la cocaïne a été multiplié par trois entre 2010 et 2022. En 2019, 18 % des patients reçus en centre de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) consommaient de la cocaïne, contre 10 % en 2015.
Face à ce phénomène inquiétant, l’OFDT appelle à une « évolution des pratiques professionnelles en matière de repérage des consommateurs » et à l’investissement dans des programmes de recherche « de traitements médicamenteux efficaces ».
Il n’existe en effet pour le moment aucun produit de substitution à la cocaïne.
Nicolas Barbet