
Les altérations du goût et de l’odorat sont fréquentes au
cours du cancer. Leur physiopathologie n’est pas totalement
expliquée, mais l’origine en est sans doute multifactorielle, liée
parfois à la maladie elle-même, et à son traitement dans d’autres
cas. Les enquêtes soulignent souvent un décalage entre le ressenti
du patient et le manque d’intérêt des praticiens pour ces effets
indésirables. Négligées, ces anomalies peuvent entraîner une
réduction de l’appétit, une perte de poids, mais aussi une
détérioration du plaisir de manger et de la qualité de vie. La
prise en charge se heurte toutefois à l’absence de recommandations
précises.
Une équipe Canadienne a réalisé une revue de la littérature,
avec pour objectif d’identifier les traitements efficaces pour la
prise en charge des troubles du goût et de l’odorat chez les
patients atteints de cancer. Au total, 43 études ont été retenues,
dont 21 avaient été publiées avant 2010.
Les auteurs déplorent l’hétérogénéité des travaux, rendant
difficile la généralisation de leurs résultats et l’établissement
de conclusions fermes concernant les meilleures pratiques. Malgré
cela, ils ont établi un arbre décisionnel, permettant d’orienter
les praticiens.
Les soins locaux en première intention
Les soins locaux constituent la prise en charge en première intention, dans tous les cas, avec de la chlorexidine et/ou du bicarbonate. En cas de dysgueusie, le zinc per os peut s’avérer efficace, à la posologie de 50 mg 3 fois par jour, et le patient peut bénéficier d’une éducation thérapeutique pour optimiser sa pratique des soins locaux. En cas d’échec, une approche plus spécialisée peut être proposée, et le polaprezinc, 75 mg 2 fois par jour,peut être efficace, associé à une information nutritionnelle individualisée, pour que le patient apprennent les techniques pour améliorer la saveur des aliments, en s’aidant si nécessaire des essences aromatiques à ajouter aux plats.Lactoferrine ou fruit miraculeux pour cibler certaines modifications de goût
Si le patient se plaint plus spécifiquement de la perception d’un goût métallique, la lactoferrine per os à la dose de 250 mg 3 fois par jour semble avoir montré une certaine efficacité contre les dysgueusies secondaires à la chimiothérapie. En cas de goût acide, le fruit miraculeux, petite baie connue pour sa capacité à transformer le goût acide en gout sucré a montré une efficacité supérieure au placebo, à raison de 6 fruits par jour. Le THC-dronabinol a montré des résultats intéressants pour la prise en charge de la dysosmie. La prise en charge par un nutritionniste peut s’avérer nécessaire.Substituts salivaires, gels buccaux ou amifostine pour lutter contre la sécheresse buccale
Enfin, la xérostomie s’améliore avec les substituts
salivaires, les gels buccaux et les bonbons au citron pris
régulièrement au cours de la journée. L’amifostine parentérale à la
posologie de 500 mg au moins 15 minutes avant une perfusion de
carboplastine peut s’avérer utile en deuxième intention.
Dr Roseline Péluchon