
De nombreux articles ont fait état d’une dégradation de la santé mentale des populations induite par la pandémie de Covid-19. Ils se réfèrent souvent aux résultats d’études transversales, menées selon des méthodes non adaptées à la mesure de la prévalence des troubles de la santé mentale et/ou ne prenant pas en compte l’état de santé mentale préexistant à la pandémie.
C’est la raison pour laquelle une équipe canadienne a entrepris une revue de la littérature, consacrée à l’impact de la Covid-19 sur la santé mentale. Au total 137 études ont été retenues, comparant l’état de la santé mentale pendant la pandémie de Covid à celui précédant celle-ci, dans 134 cohortes. Sont ainsi comparés l’état de santé mentale, mais aussi les symptômes d’anxiété et les symptômes dépressifs dans la population générale et dans divers groupes spécifiques.
Malgré l’hétérogénéité des études, il apparaît que pour la plupart des symptômes, l’impact de la pandémie a été très faible, voire nul. Dans la population générale, la santé mentale et les symptômes d’anxiété ne sont pas modifiés, et l’aggravation des symptômes de dépression est très faible.
Les femmes, seules touchées (modérément) dans tous les domaines de la santé mentale
Seules les femmes ont présenté une aggravation mineure ou modérée de leurs symptômes dans l’ensemble des domaines de la santé mentale. Pour aucun autre groupe il n’a eu de perturbations dans tous les domaines. Des symptômes spécifiques se sont accentués dans certains groupes. Ainsi, les symptômes de dépression se sont légèrement aggravés chez les personnes âgées, les étudiants et les personnes s’identifiant comme appartenant à une minorité sexuelle ou de genre. Les parents ont présenté une aggravation de leur santé mentale en général et des symptômes d’anxiété, qui, selon deux études se seraient en revanche très légèrement améliorés pour les personnes présentant des troubles préexistants.
Cette étude semble indiquer que les effets de la Covid-19 sur la santé mentale ont été plus nuancés que ce qui était souvent décrit comme un « tsunami ». Les auteurs expliquent cela par la méthodologie de nombreuses études qui se sont souvent focalisées sur des émotions ne reflétant pas fidèlement l’état de la santé mentale. Selon eux, si la pandémie a gravement affecté la population mondiale et que beaucoup ont vécu des expériences très déplaisantes ou angoissantes, la majorité a été résiliente et le niveau de la santé mentale de l’ensemble des populations n’a pas changé fondamentalement. Les effets négatifs dans certains groupes, particulièrement les femmes (souvent seul soutien des familles monoparentales, surreprésentées dans les métiers du soin et auprès des personnes âgées, plus pauvres, etc.) soulignent la nécessité de poursuivre les dispositifs de surveillance et de soutien.
Notons enfin que peu d’études retenues pour cette analyse incluaient des enfants.
Dr Roseline Péluchon