
L’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques [CSH] est actuellement le seul traitement curatif des déficits immunitaires combinés sévères [DICS]. Sinon, des infections et un décès en bas âge sont inéluctables. Le succès de l’allogreffe dépend du degré de compatibilité du greffon du donneur avec le receveur, mais aussi d’autres facteurs, que s’efforcent d’identifier les études rétrospectives de séries de DICS greffées.
De 2000 à 2009 inclus, 240 nourrissons atteints de DICS classiques, dont une majorité de formes liées à l’X, ont bénéficié d’une allogreffe de CSH dans 25 centres des Etats Unis. Pour 32 petits patients, le greffon était de la moelle osseuse d’un frère/d’une sœur (greffe identique) ; pour 138, de la moelle ou du sang circulant, déplété en cellules T, d’un père/d’une mère (greffe haplo-identique) ; et pour 62, de la moelle ou du sang du cordon d’un donneur non apparenté. Dans les greffes identiques et haplo-identiques, deux tiers des receveurs n’ont pas subi de conditionnement.
Globalement, 20 % des greffes ont été suivies d’une maladie du greffon contre l’hôte [GVHD] aiguë, et 15 % d’une GVHD chronique, malgré une prophylaxie quasi systématique.
Les greffes identiques ont donné les meilleurs résultats à long terme. Les nourrissons ayant reçu un greffon HLA-compatible d’un frère ou d’une sœur avaient le plus de chances d’être vivants 5 ans après (taux de survie à 5 ans : 97 %) et d’avoir une reconstitution immune, avec un nombre de lymphocytes T CD3+ > 1 000/mm³, une synthèse d’IgA et l’arrêt des perfusions IV d’IgG.
Cependant, la survie des autres types de greffe se rapprochait de celle des greffes identiques lorsque la greffe avait été réalisée avant 3,5 mois (taux de survie à 5 ans : 94 %), ou après 3,5 mois mais avant toute infection ou après guérison d’une infection (taux de survie respectifs : 90 % et 82 %). Il est donc possible de greffer avec de bonnes chances de réussite tout enfant atteint de DICS.
Une infection en cours au moment de la greffe diminuait significativement le taux de survie de tous les patients, sauf de ceux qui recevaient une greffe HLA-compatible d’un frère ou d’une sœur. Le contrôle des infections est donc un préalable à la greffe.
Un conditionnement comprenant du busulfan (conditionnement myéloablatif ou d’intensité réduite) augmentait globalement les chances de reconstitution immune après greffe chez les survivants. D’un autre côté, une chimiothérapie pré-greffe chez un enfant infecté diminuait les chances de survie, hormis après une greffe identique. Chez les enfants infectés, ne disposant pas d’un frère ou d’une sœur compatible, les greffons d’un parent, déplétés en cellules T, sans conditionnement préalable, donnaient les meilleurs résultats à long terme. L’indication d’un conditionnement doit donc être discutée.
La variété génétique du DICS affectait la reconstitution immune mais pas la survie.
Au total, cette étude souligne l’importance d’un diagnostic précoce des DICS, si possible avant toute infection. Un dépistage néonatal des DICS est probablement le meilleur moyen d’atteindre cet objectif, malgré la rareté et l’hétérogénéité de ces affections. Il a été mis en place dans une vingtaine d’Etats des Etats-Unis, et fait l’objet d’une étude pilote en France.
Dr Jean-Marc Retbi