Démographie médicale : faut-il s’inspirer de l’Allemagne ?

Paris, le mardi 24 janvier 2023 - En France, beaucoup considèrent que liberté d’installation rime avec déserts médicaux. Même si les « Territoires vie-santé » qui quadrillent l’hexagone incitent financièrement à l’installation, celle-ci reste rare en zone sous-dense (accès à moins de 2,5 consultations par an). Alors que certaines propositions pour remédier au problème soulèvent actuellement des tollés, peut-on s’inspirer d’autres pays européens ? En Allemagne par exemple, le débat est plus discret car la régulation de l'installation est des plus strictes. Son historique, ses effets et l’éventuelle transposition d'un tel modèle à la France sont discutés par Matthias Brunn (chercheur affilié à Sciences Po) dans une contribution publiée sur le site The Conversation

Une régulation qui ne date pas d’hier

Si les statistiques allemandes se sont intéressées dès les années 70 à la répartition géographique des médecins, c’est en 1993 que se créent zones de planification et densités cibles pour 14 catégories médicales (installation impossible si la densité dépasse 10%). Le système ne cesse d’évoluer depuis, avec davantage de critères liés à la population (âge, sexe, état de santé) ou aux distances à parcourir pour le soin, et désormais davantage de zones (883 pour les généralistes).

Cette approche semble donner de bons résultats et être largement acceptée par les organisations médicales allemandes, par ailleurs très parties-prenantes. En 2018, une étude indiquait que 99,8% de la population était à moins de 10 minutes d’un généraliste et 99% à moins de 20 minutes d’un spécialiste (à condition de disposer d’une voiture) et la plupart des rendez-vous sont obtenus en quelques jours seulement. Néanmoins, la France n'aurait pas à rougir de la comparaison : une étude indiquait en 2017 que 98% des personnes résident à moins de 10 minutes d’un généraliste, soit une proportion proche de la situation allemande. Par ailleurs, le délai moyen de rendez-vous chez un généraliste évalué en 2018 par la DREES était de 6 jours.

Un voisin pas si proche

Mais les deux situations diffèreraient trop pour être rapprochées facilement. Outre-Rhin, on manque en outre également de médecins mais, proportionnellement à la population, ils sont 40% de plus qu’en France, et la « campagne profonde » est rare du fait d’une densité de population plus grande : on n’est jamais très loin d’un centre urbain, du service public, de la culture…

Autre différence, les médecins allemands sont très impliqués dans la politique sanitaire et gèrent eux-mêmes un mode de rémunération à deux niveaux : une somme fixe pour chaque patient, trimestrielle, complétée par une rémunération à l’acte, mais dégressive (inversement proportionnelle au nombre d’actes).

Enfin ce sont les zones sur-denses que le système mis en place a permis de corriger en Allemagne, évitant la concurrence, mais l’urgence française est de traiter les zones sous-denses.

Ces différences n’occultent pas les similitudes, comme les outils d’incitation à l’installation en zone sous-dense, précise l'auteur de l'article, concluant que contrairement au système anglais, trop différent, le système allemand pourrait être source d’inspiration.

Dr Blandine Esquerre

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Vos réactions (4)

  • 10 %

    Le 24 janvier 2023

    Ne pas dépasser 10 %, mais 10 % de quoi?
    Peu clair, tout ça…

    Dr D Alberti

  • Allemagne-France : 2-0

    Le 24 janvier 2023

    Le mode de travail du médecin Allemand est très différent : sa rémunération lui permet d'employer du personnel pour les taches administratives mais aussi "paramédicales" ce qui lui permet de se consacrer entièrement à ses patients... d'où probablement aussi le délai plus court pour avoir un rendez-vous...

    Dr J-G Leh

  • Les rêves de la DRESS ne sont pas réalité

    Le 25 janvier 2023

    La DRESS se trompe. Minimum 15 jours pour consulter un généraliste à Paris, le temps de guérir. Plus d'un mois pour un spécialiste.

    Dr I Gautier

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