Déserts médicaux : la coercition titille toujours les sénateurs
Paris, le jeudi 6 juin 2019 – Toute ressemblance avec des
séances de discussions parlementaires ayant déjà existé ne serait
pas purement fortuite.
Quand il y aura des morts…
Une rafale de quatorze amendements émanant de tous les partis
politiques représentés au Palais du Luxembourg, visant à "réguler"
la liberté d'installation des médecins, a été déposée et vivement
discutée, mardi soir.
Certains des auteurs de ces textes ont pris Agnès Buzyn à
témoin : « Vous avez là, Madame la ministre, une palette
d'amendements sur le conventionnement sélectif. Cela témoigne d'un
consensus nouveau qui va dans ce sens. Cela vaut peut-être le coup
d'expérimenter », a lancé ainsi Céline Brulin, sénatrice
communiste (Seine-Maritime).
Pendant plus d'une heure, les interventions se sont succédé
pour demander « d’expérimenter » ou « d’imposer » le
conventionnement sélectif dans les zones sur-dotées.
Certains sénateurs ont rappelé que ce type d’encadrement
existe déjà pour plusieurs professions comme les infirmiers, les
dentistes ou les orthophonistes. Jean-François Longeot a ainsi
assené : « je ne comprends pas pourquoi les médecins ne
pourraient pas faire l'objet de dispositions similaires
».
Ce type d’argumentaire a par ailleurs parfois laissé la place
à des envolées volontairement provocatrices : « Quand il y aura
une catastrophe sanitaire, des morts, la population se retournera
contre nous. Pourquoi ? Parce qu'il y a un dogme c'est la liberté
d'installation » a ainsi tonné le sénateur socialiste Martial
Bourquin (Doubs).
Face à ces critiques pointant son « absence de
solutions » et sa « déconnexion de la réalité », Agnès
Buzyn s'est défendue et s'est attachée à démonter les arguments de
ses contradicteurs notamment en faisant valoir qu’un système
coercitif ramènerait à « zéro » le nombre de jeunes médecins
voulant s’installer en ville.
Au final, sans surprise, la coercition a été, encore une fois,
écartée. Le Sénat a, a contrario, adopté une exonération de
cotisations sociales visant à l'installation rapide des jeunes
médecins dans les déserts médicaux (dans un délai de trois ans
après l'obtention de leur diplôme, exonération valable cinq ans) et
rejeté du même coup l’idée de limiter le temps de remplacement à
trois ans.
De toutes les façons, nous en arrivons à un stade où il n'y a plus de zone sur-dotée. Quand on voit que même PACA propose de payer les études de médecin pour avoir des médecins, cela laisse rêveur.
Par ailleurs, quand tout le service public se désengage des zones sinistrées, je trouve anormal qu'on demande à des libéraux de faire des sacrifices que les fonctionnaires ne font même plus. Les médecins souhaitent, comme toutes les autres professions, que leur conjoint ait aussi du travail ; que leurs enfants soient scolarisés pas trop loin (donc il faut des écoles), qu'il ne faille pas faire des km pour s'approvisionner, surtout à des heures ou des jours où tout est fermé, qu'il soit possible de retirer de l'argent à un distributeur, de poster son courrier près de chez soi, de bénéficier de transports en commun pour les personnes de la famille qui ne conduisent pas et pire, qu'il y ait une vie culturelle et sportive !