
Paris, le lundi 27 février 2023 – Aux États-Unis, la ville de San Francisco semble de plus en plus ravagée par ce fléau qu’est le fentanyl. 620 personnes y sont mortes d’overdose l’année dernière.
Le fentanyl frappe toutes les villes des États-Unis, y compris les plus branchées. San Francisco, il y a encore quelques années le bastion de l’industrie des nouvelles technologies, est à présent rongée par une grave crise des opiacés, comme beaucoup d’autres villes américaines avant elle. La crise a provoqué un fort sans-abrisme et entraîné des milliers de morts ces dernières années.
« Cette ville est devenue un véritable cauchemar »
« Cette ville est devenue un véritable cauchemar, viciée par le fentanyl, en état d’abdication », explique Steve Adami, ancien toxicomane, à notre consœur du Figaro Armelle Vincent. Celui-ci a assisté à une conférence tenue par TogetherSF Action sur le thème : « Ce que nous pouvons faire pour combattre la crise de la drogue ». Selon notre consœur, l’association a indiqué que la municipalité avait totalement perdu le contrôle de ses rues, où errent près de 4 000 toxicomanes sans-abris. Pour Kanishka Cheng, fondatrice de TogetherSF Action, « nous pâtissons d’un marché libre de la drogue à ciel ouvert qui dévaste notre économie, notre sécurité, et qui décourage désormais la visite des touristes étrangers. Nos élus n’ont aucun plan, aucune mesure pour combattre le fléau. Leur mode opératoire est, au contraire, de laisser faire, à moins que le toxico n’ait besoin d’une seringue propre ou autre outil pour se droguer en paix et en public ».
Ces dernières années, le fentanyl a été le principal facteur de décès par surdose de médicaments à San Francisco, causant près de 1 400 morts, soit plus que l’épidémie de Covid-19. Si les chiffres ont légèrement baissé en 2022 par rapport à 2021 et 2020, ils continuent d’être élevés, avec 620 décès reportés l’année dernière. « La baisse du nombre de décès est encourageante et montre que nous pouvons sauver des vies grâce aux programmes et aux politiques que nous mettons en œuvre à San Francisco », veut croire le Dr Jeffrey Hom, qui supervise le Bureau de prévention des overdoses dans la ville côtière de l’Ouest américain.
Les dealers opèrent au grand jour
Dans le quartier de Tenderloin, les tentes s’accumulent et les dealers vendent du fentanyl sous le regard médusé des policiers. « Tenderloin, ça a toujours été un quartier de gens vivant dans la difficulté », indique Randy Shaw, avocat et habitant du quartier. « Mais depuis [début 2021], c’est autre chose. C’est un marché de drogue à ciel ouvert. Le Covid a précipité les choses. […] Le quartier est devenu fantomatique. Les dealers se sont installés, et leurs clients aussi ».
Les services de police semblent eux aussi totalement débordés par la situation, devenue hors de contrôle. « Toute cette misère humaine, mais que voulez-vous que je fasse ? », se désole un agent de police de San Francisco, interrogé par Armelle Vincent. « On a perdu le contrôle de la situation. On manque de personnel. Personne ne veut plus travailler ici ».
La crise du fentanyl a tué plus de 100 000 personnes aux États-Unis en 2021, soit une augmentation de près de 15 % par rapport à 2020. Cet antalgique, initialement développé pour soulager les douleurs des personnes atteintes de cancer, est cinquante fois plus puissant que l’héroïne, mais est surtout beaucoup moins cher à produire. Dans son discours sur l’état de l’Union délivré en début d’année, Joe Biden a martelé sa volonté de lutter contre ce fléau qui frappe toute la fédération.
Raphaël Lichten