États-Unis : un juge texan pourrait prononcer l'interdiction fédérale d'une pilule abortive

Paris, le jeudi 16 février 2023 – Aux États-Unis, un juge texan, réputé conservateur, pourrait révoquer l'autorisation de mise sur le marché de la mifépristone, médicament utilisé pour les IVG médicamenteuses. Plusieurs associations de défense de l'avortement se disent particulièrement inquiètes, car la décision aurait un impact sur tout le pays.

Après l'arrêt du 24 juin 2022 de la Cour suprême ayant renversé la jurisprudence Roe v. Wade, un juge fédéral texan, Matthew Kacsmaryk, réputé proche des milieux chrétiens et conservateurs, pourrait prononcer l'interdiction de la mifépristone, utilisée pour les IVG médicamenteuses. Selon plusieurs associations de défenses de l'avortement, l'interdiction, si elle venait à être prononcée, aurait pour conséquence de retirer l'autorisation de mise sur le marché du médicament dans l'intégralité des États-Unis.

La mifépristone, principale pilule abortive utilisée aux États-Unis

En novembre 2022, l'association chrétienne conservatrice Alliance Defending Freedom avait attaqué la Food and Drug Administration (FDA), estimant que celle-ci avait placé « la politique au-dessus de la science lorsqu'elle a approuvé les pilules abortives aux États-Unis ». La pilule abortive en question, la mifépristone, est autorisée depuis 2000 aux États-Unis. L'association chrétienne indique que celle-ci aurait des « effets secondaires intenses ».

Le Guttmacher Institute, une organisation qui fournit des statistiques sur le contrôle des naissances et l'avortement aux États-Unis, affirme pourtant que cette pilule est « sûre et efficace ». Selon l'institut, son interdiction irait « à l'encontre d'un ensemble écrasant de preuves scientifiques » et « entraînerait des perturbations massives dans la mise en pratique de l'avortement aux États-Unis ».

L'organisation précise néanmoins que 98 % des avortements médicamenteux aux États-Unis sont réalisés grâce à une association de mifépristone et de misoprostol, ce dernier pouvant être administré seul pour interrompre une grossesse. Des doutes subsistent néanmoins sur le fait que les cliniques prescrivant actuellement cette combinaison acceptent de n'utiliser que le misoprostol si la mifépristone venait à être interdite.

Une décision qui pourrait avoir un impact sur l'ensemble de la fédération

Selon Jenny Ma, juriste au sein du Center for Reproductive Rights, la décision du juge Matthew Kacsmaryk pourrait avoir des « effets dévastateurs », car il pourrait « émettre un interdit national sur la pilule abortive » en question.

Le recours déposé par l'Alliance Defending Freedom suscite de nombreuses craintes chez les associations de défense de l'avortement, car le juge Kacsmaryk, nommé par Donald Trump, est connu pour ses positions particulièrement conservatrices.

« Émettre une injonction nationale pourrait causer d'importants dommages, priver les patientes d'un médicament sans danger et efficace qui est sur le marché depuis plus de 20 ans », a averti le ministère de la Santé dans des arguments transmis au juge texan.

Sachant que la mifépristone est la principale pilule abortive utilisée aux États-Unis, et que 54 % des avortements dans le pays sont médicamenteux, la décision pourrait en effet affecter de nombreuses femmes souhaitant interrompre leur grossesse. Cette interdiction aurait des effets d'autant plus regrettables pour les femmes vivant dans des États ayant prohibé l'avortement depuis le renversement de la jurisprudence Roe v. Wade, mais qui peuvent avoir recours à un avortement médicamenteux dans d'autres États.

En tout état de cause, la future décision du juge Kacsmaryk serait susceptible d'appel devant la cour d'appel fédérale de La Nouvelle-Orléans, également réputée conservatrice. Le dossier pourrait, in fine, se retrouver devant la Cour suprême, où les juges conservateurs sont également majoritaires.

Raphaël Lichten

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