Evolution des traitements anti-ostéoporotiques en France, une quasi fracture !

L'ostéoporose est une maladie chronique caractérisée par la diminution de la qualité et de la densité des os. Sa prévalence est élevée, et les fractures d'origine ostéoporotique peuvent avoir de graves conséquences sur la qualité de vie. Le risque de fracture augmente avec l'âge : à partir de 50 ans, une femme sur trois aura une fracture en lien avec l'ostéoporose au cours des années qui lui restent à vivre.

Ce risque peut être diminué par des modifications du mode de vie, la prévention des risques de chute, et les traitements anti-ostéoporotiques. Avant tout traitement spécifique, les déficits d'apport en calcium et/ou en vitamine D doivent être corrigés. Cependant il n'existe pas de preuve que la simple supplémentation en calcium et/ou en vitamine D prévienne le risque de fracture de fragilité.

Les traitements efficaces de l'ostéoporose sont soit des agents anti-résorptifs tels que les bisphosphonates et le dénosumab, soit des agents anaboliques tels que les analogues de la parathormone.

Une récente publication française, dans la revue Bone, rend compte des modifications de la prise en charge de l'ostéoporose au cours des dernières décennies en France.

A partir des données françaises de "l'Echantillon Généraliste de Bénéficaires", qui représente 1/97ème de l'ensemble des assurés de la CNAM (environ 600 000 personnes), une étude transversale annuelle a été menée de 2007 à 2016.

Cette étude concernait toutes les femmes de l'échantillon âgées de 50 à 89 ans, à l'exclusion de celles qui étaient atteintes d'une Maladie de Paget ou d'une néoplasie osseuse primitive ou métastatique.

Les femmes qui avaient bénéficié d'au moins un remboursement d'un traitement anti-ostéoporotique dans l'année étaient des "utilisatrices" pour l'année donnée, et s'il s'agissait d'un 1er traitement, elles étaient de "nouvelles utilisatrices".

Les traitements anti-ostéoporotiques remboursés étaient des bisphosphonates administrés par voie orale (étidronate, pamidronate, alendronate, ibandronate, risédronate) ou par voie injectable (a. zolédronique), et aussi le ranélate de strontium, le dénosumab (anticorps monoclonal), le raloxifène (SERM), et le tériparatide (analogue de la PTH).

Beaucoup moins de prescriptions de médicaments spécifiques mais plus de calcium et de vitamine D

Durant la période étudiée, le taux "d'utilisatrices" d'un traitement anti-ostéoporotique a augmenté jusqu'en 2009 (10,42 pour 100 Année/Femme), puis il a diminué. Entre 2007 (10,22/100 AF) et 2016 (5,02/100 AF) il a été divisé par deux.

Le taux de "nouvelles utilisatrices" a diminué rapidement entre 2007 (2,56/100 AF) et 2012 (1,55/100 AF) puis s'est stabilisé (0,9 à 1,0/100 AF de 2013 à 2016).

Les 1ères prescriptions de bisphosphonates ont fortement diminué, tout comme celles de raloxifène. Les prescriptions de ranélate de strontium ont disparu. Seules celles du dénosumab et du tériparatide ont augmenté. L'ibandronate et l'étidronate n’ont plus été remboursés à partir de 2010, et le ranélate de strontium à partir de 2015.

A l'inverse, durant la même période, les prescriptions de calcium et de vitamine D ont considérablement augmenté, de 10,6 % à 47,7 %, tendant à résumer à elles seules la prévention de l'ostéoporose des femmes ménopausées.

Le profil des femmes qui ont débuté un traitement anti-ostéoporotique spécifique s'est sensiblement modifié durant la période de l'étude. Même si leur âge restait stable (69 ans), elles étaient plus souvent atteintes de pathologies chroniques sévères (43,3 % vs 34,9 %), avaient plus souvent un antécédent fracturaire (13,3 % vs 7,8 %), et plus souvent reçu une corticothérapie à dose élevée (8,4 % vs 2,9 %).

La baisse des initiations des traitements anti-ostéoporotiques a été importante chez les médecins généralistes (- 64 %) et chez les médecins spécialistes, sauf chez les rhumatologues (-18,4 %).

Ces résultats suggèrent que progressivement les traitements anti-ostéoporotiques ont été réservés aux femmes à haut risque de fracture. Une telle évolution a également été retrouvée dans d'autres pays européens et aux USA.

En France, une étude a montré que seulement 56 % des femmes déjà victimes de factures, qui avaient une densité minérale osseuse basse, et qui selon les recommandations françaises devaient être traitées, recevaient effectivement un traitement anti-ostéoporotique. Par contre 90 % d'entre elles n'avaient qu'une supplémentation de calcium et de vitamine D !

Dr Catherine Vicariot

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Vos réactions (2)

  • Ostéoporose: prise en charge (au Dr Vicariot)

    Le 27 janvier 2022

    Il me semble que le ralenate de strontium n’est hélas plus prescriptible en France depuis quelques années hélas car ce produit contrairement aux autres (hormis) le raloxifene n’est pas pourvoyeur de facteurs de risque d’osteonecrose de la mâchoire.

    Dr P Erbibou

  • Oubli du THM

    Le 28 janvier 2022

    Il est catastrophique de voir dans quasiment toutes les publications l'oubli (délibéré ?) du
    traitement préventif qui a fait sa preuve (cf le GEMVI) à savoir le traitement hormonal substitutif de la ménopause.

    Dr Christian Gielen

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