Paris, le mardi 26 juillet 2022 - A la suite de plusieurs affaires de « viol » mettant en cause des gynécologues hospitaliers et notamment une ministre, l’Académie nationale de médecine rappelle dans un communiqué savamment intitulé « Examen médical et viol : éviter la confusion des termes » « que l’examen clinique constitue un temps indispensable de la consultation médicale ».
Petit rappel sur les affaires Zacharopoulou et Daraï
Le texte de l’Académie de médecine fait évidemment suite aux affaires Zacharopoulou et Darai, bien que la polémique sur les violences gynécologiques couve depuis plusieurs années.
Le professeur Emile Daraï, chef du centre endométriose de l'hôpital Tenon à Paris a été définitivement démis de ses fonctions en octobre dernier après avoir fait l’objet de plainte judiciaire pour viol émanant de patientes. Soulignons que le rapport de l’enquête interne de l’Assistance publique des Hôpitaux de Paris (AP-HP) pointait « le caractère standardisé, rapide, technique et sans affect de la consultation, parfois brutal et sans empathie » tout en soulignant l’absence de « connotation sexuelle alors que certains manquements ont été relevés dans le recueil du consentement à certains gestes ».
On retrouve dans les plaintes qui visent son élève et actuelle secrétaire d’état à la francophonie, le Dr Chrysoula Zacharopoulou, le même type d’accusation. Les deux patientes qui ont témoigné à la radio (RTL) et à la télévision (Quotidien) évoquent un médecin désagréable, pratiquant un toucher vaginal et rectal sans recueil express du consentement et ne cachant pas une forte irritation face aux pleurs des patientes.
Dans ce contexte, les sages de la rue Bonaparte écrivent : « cette partie de l’examen appelé examen physique comporte un contact direct avec le patient ou la patiente (inspection, palpation et auscultation). Dans certaines situations, cet examen nécessite des gestes plus intrusifs touchant l’intimité du patient : examen périnéal avec pénétration ano-rectale digitale (toucher rectal) ou instrumentale pour endoscopie (anuscopie, rectoscope ou coloscope) ou pénétration vaginale digitale (toucher vaginal) ou instrumentale (spéculum, sonde d’échographie) par voie vulvaire ; examen des seins par palpation ou en vue d’une échographie. Ces examens restent actuellement indispensables et non substituables pour le diagnostic et le suivi d’un certain nombre de pathologies, en particulier ano-rectales, uro-génitales ou sexuelles ».
Délicatesse et respect du consentement
Le Code pénal (article 222-23) définit le viol comme « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise ». Pour l’Académie de médecine, il parait évident que les gestes réalisés dans le cadre d’un examen médical échappent à cette définition, dans la mesure où la nécessité médicale en est la justification (article 16-3 du Code civil).
L’Académie ne nie pas pour autant la sensibilité des patients et demandent que les examens intimes soient réalisés « avec la plus grande délicatesse, dans le respect de la dignité de la personne, après un temps d’information éclairée et obtention du consentement formel (éventuellement écrit) des patients ou de leurs représentants (cas des jeunes mineurs et des patients sous tutelle). Le refus de l’examen doit être respecté et les patients informés des conséquences de ce refus ».
Et de poursuivre « dans le cadre de la réalisation de ces examens, toute remarque désinvolte et geste inapproprié doivent être évités de manière à dissiper tout risque de malentendu. Une imperfection dans la réalisation, un ressenti désagréable ou douloureux sont possibles, mais rien ne doit permettre que le geste puisse être interprété comme un viol ou un acte à caractère sexuel ».
Evolution des pratiques
Rappelons, que déjà, les pratiques ont évolué à la suite de ces plaintes et polémiques.
Dans certains établissements de santé et dans un nombre croissant de cabinets de gynécologie médicale, les touchers vaginaux qui avaient tendance à être quasiment systématiques ne le sont plus, même dans le cadre du suivi des grossesses. Ils sont fréquemment conditionnés aux résultats d’investigations préalables : interrogatoire de la patiente et échographie notamment.
Par ailleurs, les conditions de l’examen se sont également modifiées. L’utilisation des étriers paraît en recul. En outre, on privilégie pour la recherche de certaines infections vaginales les auto-prélèvements. Cette évolution est d’abord le fruit d’une réflexion sur la pertinence médicale de ces actes, elle est également la conséquence de la prise en considération des récits de certaines femmes.
Des mots sur les maux
Soulignons pour finir que certaines militantes féministes récusent également le terme de viol dans ces cas. Pour elles, le recours à ce terme est regrettable et celui de « violences gynécologiques » devrait lui être préféré. Elles considèrent en effet qu’il existe un risque que le combat et les souffrances des personnes ayant été victimes d’un acte sexuel non consenti soient mises au second plan.
La juriste Christine Le Doaré, militante féministe s’était
indignée par exemple sur Twitter : « Qualifier un examen
gynécologique de viol, déposer plainte sept ans après, quand la
gynéco devient ministre, c'est décrédibiliser le crime de viol,
nous prendre pour des cruches, attaquer le suivi de la santé des
femmes ». La journaliste Caroline Fourest s’était également
exprimée dans le même sens sur LCI.
F.H.