
Alors que le taux de guérison du cancer de l’œsophage (KO) ne dépassait pas 5 % dans les années 70, il a grimpé à près de 18 % dans les années 2010. Pour les cancers de la jonction œsogastrique (KJO), on obtient 50 % de survies à 5 ans.
Les raisons de ces améliorations sont multiples : le scanner permet de mieux classer le cancer et de déterminer son opérabilité, les soins péri-opératoires ont réduit la fréquence des complications, et la stratégie thérapeutique s’est perfectionnée. De plus, on n’attend plus la dysphagie et l’amaigrissement pour évoquer le diagnostic, un inconfort abdominal, voire des douleurs pouvant mettre sur la voie. Ce diagnostic plus précoce peut aussi être réalisé par le dépistage ; soit en faisant avaler aux sujets le dispositif cytosponge TFF3 relié à un fil, plus acceptable que l’endoscopie et où l’éponge permet parfois de ramener des cellules malignes, soit en pratiquant des tests respiratoires.
La prise en charge des KO débutants, de stade T1a (ne dépassant pas la muqueuse et de bas grade) a d’excellent résultats et peut autoriser dans certains cas un traitement conservateur, par mucosectomie endoscopique.
Imagerie plus performante, traitements ciblés, amélioration des techniques opératoires et de la prise en charge postopératoire
Les progrès de l’imagerie (scanner et PET-scan) ainsi que la stadification sous cœlioscopie, ont permis de proposer un traitement ciblé en évitant également de pratiquer une chirurgie lourde et inutile sur des stades trop avancés.
Le traitement néoadjuvant (radio et chimiothérapie) a fait la preuve de son efficacité surtout sur les KJO, mais aussi dans les KO épidermoïdes, prolongeant, à stade égal, la survie globale moyenne de plus d’un an.
La prise en compte des résultats des épreuves respiratoires et cardiaques préopératoires identifie les malades à risques, risque qui peuvent être en partie prévenus.
Les progrès chirurgicaux et la complétude du curage lymphatique augmentent significativement la durée moyenne de survie, tandis que des soins postopératoires adaptés (réhabilitation précoce avec lever dès J1, retrait de la sonde vésicale dès J2, prévention de la maladie thromboembolique, apports nutritionnels progressifs, et reprise de l’alimentation dès que possible, en commençant par quelques gorgées d’eau) ont amélioré les suites immédiates.
L’introduction de la coelio-chirurgie puis de l’assistance par robots, en réduisant la perte de sang et la durée de séjour, a aussi amélioré le pronostic.
Depuis que la moitié des patients ont des chances de survivre plus de 5 ans, il est crucial de s’inquiéter de leur qualité de vie ; si certains sont aptes à reprendre le travail dans l’année qui suit l’œsophagectomie, beaucoup continuent à se plaindre de fatigue, douleurs, troubles digestifs et psychasthénie, et il importe de traiter chacun de ces symptômes.
Dr Jean-Fred Warlin