
Paris, le samedi 2 juillet 2022 - En 2007, la jeune Laura est victime d’une septicémie alors qu’elle est en stage en Espagne dans le cadre de ses études. Placée sous coma artificiel et rapatriée en France, elle se réveillera trois semaines plus tard amputées des deux avant-bras et des deux jambes.
Munie de prothèse, la patiente engage alors un parcours du combattant pour obtenir de nouvelles mains. La jeune femme est inscrite en 2013 sur une liste de patients en attente de greffe dans le cadre d’un programme de recherche de l’hôpital Georges-Pompidou à Paris (AP-HP).
Mais faute de donneur compatible, l’opération n’est pas réalisée conduisant même à sa radiation de la liste d’attente. Face à cette situation, il lui est conseillé de se rendre aux Etats-Unis pour bénéficier de l’opération lui permettant de retrouver un début de vie-normale.
Refus de remboursement par la Sécurité Sociale d’une facture de plus d’un million d’euros
Des démarches sont engagées avec la Sécurité sociale pour prendre en charge l’opération qui sera réalisée à l’hôpital Penn Medicine de Philadelphie.
En effet, en vertu de l’article R.160-4 du Code de la Sécurité Sociale, la solidarité nationale a vocation à prendre en charge le remboursement de soins « dispensés hors d'un Etat membre de l'Union européenne » lorsque les soins en cause « ne pouvaient être reçus sur le territoire français ».
Malgré cette disposition, la Sécurité sociale a indiqué son refus de prendre en charge les frais médicaux. Un refus qui n’empêche pas la patiente de se rendre aux Etats-Unis pour y être opérée et recevoir recevant un an plus tard une facture… d’un montant de 1 056 810,17 euros.
Commence alors un bras de fer judiciaire entre la patiente et la CPAM pour obtenir le remboursement des sommes.
La CPAM condamnée en première instance
Devant l’échec des recours amiables, une procédure est engagée devant le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale (TASS) afin de demander l’annulation de la décision de refus de prise en charge de son opération. Le 12 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Paris condamne la CPAM de Paris à verser 765 851,05 dollars en remboursement d’une partie de ses frais.
Une décision qui sera frappée d’appel, la CPAM de Paris étant catégorique sur son refus de rembourser un centime.
La Cour d’Appel devra se pencher notamment sur la question de savoir si les soins en cause devaient être considérés comme ne pouvant être réalisés sur le territoire français.
Outre des motifs liés à la procédure (il est reproché à la patiente d’avoir saisi en même temps le TASS et une Commission de recours amiable) la CPAM estime que si la patiente ne pouvait recevoir une greffe en France, il lui avait été proposé d’être admis dans un programme expérimental ouvert à Lyon.
D’après les informations obtenues par le média Capital, la solution alternative proposée était en réalité uniquement au stade du projet.
L’arrêt de la Cour d’Appel, qui sera rendu en 2023, permettra de trancher s’il y a lieu de considérer une définition restrictive ou extensive de la notion de refus de soins.
Charles Haroche