Après des études de phase II positives, un groupe multicentrique européen a donc initié une étude randomisée en double aveugle comparant l'infliximab à un placebo. 378 malades ont été inclus dans l'essai. Ils souffraient tous d'un psoriasis en plaques d'importance modérée à sévère depuis plus de 6 mois (index de gravité PASI [Psoriasis Aera and Severity Index] supérieur ou égal à 12 et au moins 10 % de la surface cutanée atteinte).
Les sujets qui ne devaient recevoir aucun autre traitement durant l'essai (en dehors d'hydrocortisone à 2,5 % sur la face et/ou l'aine si nécessaire à partir de la 10ème semaine) ont été randomisés en un groupe de 301 patients assignés à un traitement par 5 mg/kg d'infliximab aux semaines 0, 2, 6, puis toutes les 8 semaines jusqu'à la semaine 46 et un groupe de 77 patients recevant des injections placebo jusqu'à la semaine 24, puis le même traitement par infliximab, tous les malades étant donc traités à partir du 6ème mois.
Une amélioration très nette chez plus de 80 % des malades
En terme d'efficacité, les résultats sont indiscutables. A la 10ème semaine 80 % des sujets traités (contre 3 % des patients sous placebo) avaient vu leur PASI diminuer de plus de 75 % (PASI 75) et 57 % des malades sous infliximab avaient un PASI diminué de plus de 90 % (PASI 90) contre 1 % des sujets du groupe placebo (p<0,0001). Des résultats équivalents ont été constatés à la 24ème semaine (82 % de PASI 75 et 58 % de PASI 90 dans le groupe infliximab). Une tendance à la baisse d'efficacité a été notée à la 50ème semaine (61 % de PASI 75 et 45 % de PASI 90). Cette baisse relative d'efficacité pourrait s'expliquer pour partie par l'apparition d'anticorps anti-infliximab dans 27 % des cas à la semaine 46.
Dans le même temps le score d'atteinte unguéale NAPSI (pour Nail Psoriasis Severity Index) s'améliorait, mais plus lentement, avec à la semaine 24, 56 % de diminution sous traitement actif contre 3 % d'aggravation sous placebo (p<0,0001). L'efficacité de l'infliximab a bien sûr été confirmée par l'évolution des sujets du groupe placebo à partir de la 24ème semaine.
L'infliximab est donc un traitement extrêmement efficace du psoriasis modérée à sévère qui permet d'obtenir, sous réserve d'un traitement continu, un blanchiment prolongé chez un très grand nombre de patients.
Préciser les indications par rapport aux traitements classiques
L'un des points essentiels de l'essai était d'évaluer la tolérance du traitement chez des sujets sélectionnés ne présentant aucune contre-indication à la prescription d'anti TNF-alpha. Si la tolérance globale peut être statistiquement qualifiée de bonne par les auteurs, on a toutefois enregistré dans le groupe infliximab, outre une élévation des enzymes hépatiques dans 9 % des cas, 3 infections graves, 3 réactions d'hypersensibilité retardées, deux syndromes lupiques et 4 réactions préoccupantes lors des perfusions.
Malgré les résultats très positifs de cette étude, il reste de nombreuses questions en suspend. Sur la dose et la durée optimale du traitement, sur la signification clinique des anticorps anti-infliximab lorsqu'ils apparaissent et sur la conduite à tenir dans ces cas, mais aussi sur la sécurité à long terme de cette thérapeutique chez des sujets dont le pronostic vital n'est pas menacé.
Nous aurions surtout besoin d'études comparant cet anti-TNF-alpha, non pas à un placebo, mais à des traitements classiques de référence qui seules permettront réellement de préciser les indications du produit et à chacun d'entre nous de peser, avec le patient, le rapport bénéfice/risque des différentes options thérapeutiques.
Dr Anastasia Roublev
Reich K et coll. : « Infliximab induction and maintenance therapy for moderate-to-severe psoriasis : a phase III, multicentre, double-blind trial. » Lancet 2005 ; 366 : 1367-74. © Copyright 2005 http://www.jim.fr