
L’espoir aura été de courte durée. Depuis quelques jours, des
rumeurs circulaient annonçant que le gouvernement chinois allait
prochainement infléchir sa politique zéro-Covid, qui plombe
l’économie mondiale depuis près de trois ans. Il a suffi de
l’annonce d’une prochaine réunion de la Commission nationale de la
santé et de propos optimistes attribués à Zeng Guang, ancien
président des Centres de contrôle des maladies (CDC) chinois, pour
que l’euphorie gagne les marchés financiers du monde entier.
Mais ces espoirs ont été brutalement douchés ce samedi,
lorsque Mi Feng, porte-parole de la Commission nationale de la
santé, a annoncé que la Chine « s’en tiendra indéfectiblement à
la politique globale du zéro-Covid ».
200 000 ouvriers enfermés sur leur lieu de travail
Certains spécialistes de la Chine pensaient pourtant que le
20ème congrès du parti communiste chinois, qui s’est tenu cet
octobre, pouvait être l’occasion d’une remise en cause de la
politique sanitaire de Pékin. Mais cette doctrine est devenue si
indissociable du régime de Xi Jinping, qui vient d’être reconduit
pour un troisième mandat à la tête du pays, qu’elle est
difficilement amendable. Pour Xi, le zéro-Covid est devenu le
symbole du contre-modèle chinois, qui serait parvenu à protéger ses
habitants de l’épidémie, alors que les gouvernements occidentaux
laissaient des millions de leurs habitants périr.
Le dépistage massif, les confinements drastiques et inopinées
et la fermeture des frontières sont donc plus que jamais à l’ordre
du jour, alors que les contaminations augmentent ces dernières
semaines. Des dizaines de millions de Chinois sont actuellement
priés de rester chez eux, parfois pour de simples suspicions de
cas. A Shanghai, il a suffi qu’un seul cas soit recensé pour que 67
000 visiteurs soient enfermés du jour au lendemain au sein du parc
Disneyland.
A Shenzhen dans le sud du pays, les 200 000 employés de
l’immense usine Foxconn qui produit près de 70 % des Iphone vendus
dans le monde sont enfermés sur leur lieu de travail depuis la
mi-octobre. Alors que le nombre de cas au sein du personnel reste
secret, plusieurs centaines d’ouvriers se seraient enfuis.
Catastrophe économique et drames en série
La Chine est désormais le seul pays du monde à maintenir une
politique sanitaire aussi sévère, les autres nations du globe ayant
assoupli leurs règles avec l’arrivée des vaccins et du variant
Omicron. Une politique qui n’est évidemment pas sans conséquence
sur le plan économique. En octobre, les exportations chinoises ont
diminué de 0,3 % sur un an et les exportations de 0,7 %, du jamais
vu depuis la première vague épidémique début 2020.
Cette année, l’Empire du milieu ne devrait faire que 2,7 % de
croissance, l’un des taux les plus bas depuis que le pays s’est
tourné vers le capitalisme à la fin des années 1970. Pas de quoi
pour autant faire changer d’avis le parti communiste chinois (PCC),
qui refuse toujours, par fierté national, d’importer des vaccins
occidentaux, jugés pourtant plus efficaces que les vaccins chinois
par la plupart des scientifiques indépendants.
Si la politique sanitaire chinoise a permis de diminuer
fortement la mortalité liée à l’épidémie (officiellement, seulement
27 000 Chinois sont morts en 3 ans), elle provoque parfois des
drames. Le 18 septembre dernier, un bus transportant des personnes
cas contacts vers un centre de rétention a eu un accident,
provoquant la mort de 27 individus. Enfin, ce jeudi, la police de
Lanzhou, dans le nord-ouest de la Chine, a présenté ses excuses,
après qu’un enfant de 3 ans est mort d’une intoxication au monoxyde
de carbone faute de soins, les services de secours n’ayant pas pu
se rendre à son chevet à temps à cause du confinement.
Nicolas Barbet