La CSMF veut sauver une médecine de ville « en plein délitement »

Paris, le vendredi 25 février 2022 – A six semaines de l’élection présidentielle, la CSMF présente ses propositions pour réformer la médecine libérale au cours du prochain quinquennat.

Après huit ans de bons et loyaux services, le Dr Jean-Paul Ortiz s’apprête à tirer sa révérence. Le néphrologue va quitter la présidence de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) le 12 mars prochain. En exercice « jusqu’au dernier quart d’heure » comme dirait un autre président, il a présenté ce jeudi le plan « Ma Santé 2022-2027 » (clin d’œil au plan « Ma Santé 2022 » d’Emmanuel Macron), stratégie élaborée par la confédération pour réformer la médecine libérale au cours du prochain quinquennat et la rendre plus attractive.

Le Dr Ortiz a débuté sa dernière intervention devant la presse en dressant un tableau très noir de la situation. « La médecine de ville est en plein délitement » a-t-il lancé. La crise systémique que connait la médecine libérale depuis plusieurs années a été aggravée par l’épidémie, les spécialistes ayant perdu en moyenne 15 % de leurs revenus durant la crise sanitaire selon le dernier rapport de la Carmf.

« Fatigués, éreinté, épuisés par ces deux années de dur combat, les généralistes se sentent méprisés, ignorés » a déclaré le Jean-Paul Ortiz.

Un tarif qui varie selon la complexité de la consultation

Dans un contexte de diminution du nombre de praticiens libéraux exclusifs, en raison notamment du départ à la retraite des baby-boomers, le projet de la CSMF vise à améliorer l’attractivité de la médecine de ville en s’appuyant essentiellement sur la revalorisation des tarifs. L’intersyndicale propose ainsi un système de gradation du tarif selon la complexité de la consultation. Le suivi d’un patient connu serait ainsi rémunéré 30 euros, la prise en charge d’un nouveau patient 60 euros, une consultation complexe ou une visite à domicile 75 euros et enfin les consultations les plus difficiles (comme les consultations d’annonce en cancérologie) 100 euros. Une nouvelle grille tarifaire qui resterait indépendante des dépassements d’honoraires.

Sans surprise, la CSMF appelle de ses vœux une sorte de virage ambulatoire, estimant que les politiques de santé ont trop misé sur l’hôpital public ces dernières années. « L’hôpital doit se recentrer exclusivement sur la mission de recours d’excellence qu’il n’aurait jamais dû quitter » résume le néphrologue, qui souhaite inciter les généralistes et les spécialistes à participer au service d’accès aux soins (SAS), un système qui oriente les patients vers l’offre de soins la plus adaptée à leur problème. Pour la CSMF, la médecine de ville doit constituer « la porte d’entrée de proximité » dans le système de soins. Le Dr Ortiz se dit opposé à tout système « inégalitaire à deux vitesses » entre des grandes villes dotées de docteurs en médecine et une France périphérique qui devrait se contenter d’officiers de santé.

Accentuer la collaboration avec les IPA

Sur un plan plus strictement médical, la CSMF veut renforcer la mission de prévention des médecins libéraux. Tout comme Les Libéraux de santé, une association de médecins libéraux, elle souhaite mettre en place des « consultations longues de prévention » à des âges clés et centrés sur différentes thématiques de santé publique (addiction, dépistage, prévention des maladies cardiovasculaires…).

Sur la question sensible et épineuse du transfert de compétences entre professionnels de santé, Jean-Paul Ortiz se montre plus prudent. S’il se dit prêt à une « conférence de consensus » pour mieux définir les contours des différents métiers, il considère en revanche que « tout autre mécanisme autoritaire est voué à l’échec et aux conflits », fustigeant ainsi les dernières réformes ayant augmenté les compétences de certains professionnels de santé. La CSMF est favorable en revanche à une collaboration accrue entre les libéraux et les infirmiers, notamment les IPA (infirmiers en pratique avancée). Selon le Dr Ortiz, l’arrivée des IPA dans les cabinets « permettra aux médecins de se recentrer sur des consultations plus lourdes en déléguant une partie du suivi des pathologies chroniques ».

Jean-Paul Ortiz évalue le coup de son plan quinquennal à 3 milliards d’euros, dont 1,7 milliards pour l’augmentation du tarif des consultations. Des financements que son successeur devra tenter d’arracher aux autorités.

Quentin Haroche

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Vos réactions (1)

  • Et le déconventionnement ?

    Le 26 février 2022

    Avoir signé le conventionnement c'est (en exagérant) avoir signé les accords de Minsk. La prise en otage ne s'est pourtant pas faite en douceur mais le système est à jamais bancal. Comme pour l'école privée la médecine libérale use de l'argent public. Tant qu'à se faire traiter en permanence de médecine de profit on doit quitter la table. Un syndicat libéral devrait parler de cette option.

    Dr P. Castaing

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