
Les troubles du goût et de l’odorat sont très fréquents chez les patients atteints de cancer et sont souvent attribués aux traitements. Il peut s’agir de modifications des seuils de perception des flaveurs, de leur altération ou de perceptions de flaveurs qui n’existent pas. Ces troubles peuvent avoir un impact sur l’alimentation et la qualité de vie.
La sensation de goût métallique en fait partie. Il s’agit d’une forme de paragueusie, souvent associée à la sécheresse buccale ou à la présence d’une candidose, dont le mécanisme précis n’est pas parfaitement connu. Parmi les troubles du goût et de l’odorat, la sensation de goût métallique semble avoir la plus grande influence négative sur le comportement alimentaire.
Des recherches rares et des résultats hétérogènes
Afin de mieux évaluer sa prévalence et son impact, une équipe française a réalisé une revue systématique et une méta-analyse de la littérature. Plus de 1 600 articles concernant des patients traités pour un cancer ont été analysés.
Le premier constat est que seulement 22 articles traitent du goût métallique (1,3 %). Son incidence serait de 29 % pour l’ensemble des patients traités pour un cancer, avec toutefois une grande hétérogénéité des résultats, tenant au type de cancer, au type de traitement et aux risques élevés de biais. Son impact sur le statut nutritionnel n’est abordé que dans 5 études, et celui sur la qualité de vie dans seulement 2, sans évaluation spécifique, ne permettant pas de donner de conclusion définitive. Les auteurs remarquent qu’aucune étude ne fait mention de la santé bucco-dentaire.
Une nouvelle étude est en cours
Cette revue systématique souligne les difficultés rencontrées pour évaluer de façon adéquate le goût métallique chez les patients atteints de cancer. Pour les auteurs, une méthode appropriée doit être élaborée pour tester le goût métallique en tant que flaveur impliquant l’activation de plusieurs systèmes chimio sensoriels et pas seulement le goût.
Ils notent qu’une étude prospective est en cours, qui devrait permettre de mieux objectiver le goût métallique chez des patients atteints de cancer de la tête et du cou, par une analyse de la composition de la salive, des goûts de base et de tests du goût métallique, ainsi que par des questionnaires sur la qualité de vie à des temps spécifiques du traitement. Cette étude devrait aussi aider à la clarification des causes potentielles du goût métallique, particulièrement du rôle du phénomène d’oxydation entre le Fe2+ et les lipides présents dans la bouche. Elle peut aussi avoir des implications dans les soins et l’élaboration de stratégies de prise en charge.
Dr Roseline Péluchon