La "vitamine D pré-activée" ou calcifédiol confirme sa grande efficacité chez les patients hospitalisés pour Covid

Les bénéfices d’une supplémentation en vitamine D pour prévenir le développement de formes graves de Covid-19 sont discutés depuis plusieurs mois. Les résultats contrastés des travaux menés sur le sujet n’ont pas empêché soixante-treize experts francophones de plaider en janvier dans la Revue du praticien pour une supplémentation en population générale, quelques mois après une recommandation similaire de l’Académie de médecine. En écho à cette tribune, le Dr Bernard Morre, généraliste retraité, avait présenté au mois de mars dans les colonnes du JIM une expérience intéressante conduite à l’hôpital Reina Sofia de Cordoue en Espagne. Il suggérait en conclusion de lancer une étude pour évaluer l’efficacité de ce protocole.

Aujourd’hui, il complète ces premières données par d’autres résultats espagnols et affirme que les informations supplémentaires disponibles permettent de confirmer la grande efficacité de la vitamine D pré-activée (ou calcifédiol) chez les patients hospitalisés pour Covid.

On attend avec impatience la confirmation ou l’infirmation de ces résultats.


Par le Dr Bernard Morre

L'étude pilote de Cordoue

En juin 2020, une étude pilote1 réalisée sur 76 patients à l'hôpital "Reina Sofia" de Cordoue suggérait que l'ajout du calcifédiol a était efficace contre la covid s'il était administré dès le début de l'hospitalisation : soit 532 µg le premier jour, puis 266 µg aux 3e, 7e, 15e et 30e jour. En l'honneur de cette très ancienne ville universitaire européenne, je proposais de baptiser ce procédé : "Protocole de Cordoue".

Selon le registre des essais cliniques US (NIH), l'étude de Cordoue a débuté le 29 avril 2020.

Le calcifédiol évalué contre la covid à Barcelone

Sensiblement à la même période (de mars à mai 2020), à l'Hospital del Mar du Medical Research Institute (IMIM) supervisé par la "Facultat Autonoma de Barcelona" (Espagne), une équipe de médecins sous la direction de Xavier Nogues2, enrôlait 838 patients dont 447 étaient traités classiquement et supplémentés en calcifédiol selon le "protocole de Cordoue" alors que 391 recevaient seulement le même traitement habituel sans calcifédiol.

L'objectif était de diminuer les admissions en service de soins intensifs ainsi que la mortalité des patients présentant une covid.

Les entrées en unités de soins intensifs (USI) se répartissent ainsi : 82 des 391 patients non supplémentés (soit 21%) ont dû être admis en USI contre seulement 20 (4,5 %) des 447 patients supplémentés : soit approximativement 4,7 fois plus de rentrées en "réanimation" pour les patients non supplémentés. La valeur de p est inférieure à 0,0001, cela confirme une différence hautement significative entre les deux groupes. Après ajustement pour les facteurs de risque de covid grave, les odds ratio (les rapports des risques) de rentrée en USI sont de 0,13 [Intervalle de Confiance 95% (95% CI) 0.07 à 0.23]. Plus simplement exprimé le « sur-risque » de rentrer en USI pour les patients non supplémentés est en moyenne, sensiblement 7,7 fois plus élevé.

Si on analyse maintenant la mortalité en intention de traiter (ou ici, de supplémenter), il y a eu 21 (4,7%) décès parmi les 447 supplémentés contre 62 (15,9%) des 391 sans calcifédiol. La différence est hautement significative (p inférieur à 0,0001). Après ajustement par les facteurs de risques, des taux de vitamine D à l'entrée, etc, les odds ratio de protection contre le décès sont : 0,21 [95% CI 0,10 à 0,43] ou plus explicitement les patients non supplémentés ont un sur-risque de décès de presque 4,8 fois. À la fin de l'étude, 53 patients ont été supplémentés seulement au moment de leur entrée en USI. Pour le calcul de la mortalité, ils ont été ajoutés en analyse de deuxième intention aux patients traités, les odds ratio de protection s'établissent ainsi : 0,52 [95% CI 0,27 à 0,99]. La supplémentation tardive abaisse notablement le coefficient de protection et le résultat devient juste significatif au seuil de 95 %.

Confirmation de l'efficacité du calcifédiol

Les études pilote de Cordoue et de l'Hospital del Mar de Barcelone sont réalisées par deux équipes pratiquement indépendantes ; elles concluent toutes deux à la grande efficacité de la prescription précoce de calcifédiol tant sur l'entrée en en USI que sur la mortalité.

En juin 2020, José-Maria Quesada, Marta Entrenas Castillo et Robert Bouillon3 expliquent comment la stimulation des récepteurs à la vitamine D atténue la dysrégulation inflammatoire qui génère le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS). La stimulation des récepteurs de la vitamine D diminue la tempête des cytokines, entrave les dysrégulations de la coagulation et de l'enzyme de conversion de l'angiotensine II. La vitamine D tend à restaurer l'intégrité des barrières tissulaires contre les virus.

En juin 2020, au moment de cette publication, ces auteurs colligent le lancement de neuf études comportant de la vitamine D ou son dérivé hydroxylée, ces études sont mondialement réparties : Amérique du Nord, Asie dont la Chine, Europe dont une étude lilloise avec le calcifédiol et le zinc (doses qualifiées de nutritionnelles). L'étude nordiste pourtant prometteuse par l'association du zinc et du calcifédiol, semble avoir du mal à se concrétiser. Sur le registre international des projets de recherche en octobre 2021, les enrôlements de patients n'auraient toujours pas commencé bien que l'intervention soit modestement prévue sur la courte durée de deux mois même pas une saison hivernale.

Appel à l'OMS en faveur du calcifédiol dans le traitement des covids hospitalisés

Le calcifédiol en doses pharmacologiques prescrit dès l'hospitalisation améliore considérablement le pronostic de la covid. C'est un produit quasi "naturel" puisqu'il apparaît spontanément et précocement dans le métabolisme de la vitamine D. Tombé dans le domaine public, son coût modique peut être une aide essentielle pour les pays dont le budget sanitaire est faible. Il serait indispensable que l'OMS introduise le calcifédiol dans le cadre de "Solidarity PLUS", son nouveau programme pour tester des produits susceptibles d’améliorer le pronostic de la covid.

(a) La vitamine D3 native ou cholécalciférol est absorbée dans l'intestin, lors de son passage hépatique elle est hydroxylée en position 25. Elle devient le 25-OH-cholécalciférol commercialisé sous la DCI calcifédiol.


Références
1) Entrenas-Castillo M, Entrenas Costa LM, Vaquero Barrios JM, Alcalá Díaz JF, López Miranda J, Bouillon R, Quesada Gomez JM. "Effect of calcifediol treatment and best available therapy versus best available therapy on intensive care unit admission and mortality among patients hospitalized for COVID-19: A pilot randomized clinical study". J Steroid Biochem Mol Biol. 2020 Oct; 203:105751. doi: 10.1016/j.jsbmb.2020.105751. Epub 2020 Aug 29. PMID: 32871238; PMCID: PMC7456194
2) Nogues, X., Ovejero, D., Pineda-Moncusí, M., Bouillon, R., Arenas, D., Pascual, J., Ribes, A., Guerri-Fernandez, R., Villar-Garcia, J., Rial, A., Gimenez-Argente, C., Cos, M. L., Rodriguez-Morera, J., Campodarve, I., Quesada-Gomez, J. M., & Garcia-Giralt, N. (2021). Calcifediol treatment and COVID-19-related outcomes. The Journal of clinical endocrinology and metabolism, dgab405. Advance online publication. https://doi.org/10.1210/clinem/dgab405
3) Quesada-Gomez JM, Entrenas-Castillo M, Bouillon R. Vitamin D receptor stimulation to reduce acute respiratory distress syndrome (ARDS) in patients with coronavirus SARS-CoV-2 infections: Revised Ms SBMB 2020_166. J Steroid Biochem Mol Biol. 2020 Sep;202:105719. doi: 10.1016/j.jsbmb.2020.105719. Epub 2020 Jun 11. PMID: 32535032; PMCID: PMC7289092.
4) Pr Dominique Baudon ;L’OMS lance un nouvel essai sur trois molécules pour le traitement de la Covid-19 ; Jim du 24/08/2021;https://www.who.int/news/item/15-10-2020-solidarity-therapeutics-trial-produces-conclusive-evidence-on-the-effectiveness-of-repurposed-drugs-for-covid-19-in-record-time

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Vos réactions (10)

  • Abusif (pour ne pas dire mensonger)

    Le 30 octobre 2021

    "Confirme sa grande efficacité" !
    Le sensationnialisme journalistique ne recule décidément devant aucune exagération, même dans un support auquel on pouvait accorder un minimum de rigueur scientifique et de déontologie médicale.
    Il faudra nous dire ce que signifie ici "efficacité", en quoi cette acception peut être quantifiée comme "grande", et surtout comment on peut affirmer qu'elle est "confirmée".

    Dr Pierre Rimbaud

  • Une vitamine, un médicament ?

    Le 30 octobre 2021

    L'histoire des vitamines, donc l'histoire du normal, renseigne sur la compétence des organisations médicales qui ne prônent pas le respect du normal ... Comme une définition juridique des vitamines qui responsabilise les corps médicaux est inenvisageable, vu l'absence de neutralité des organisations médicales du niveau le plus bas, au niveau le plus haut, il va falloir l'imposer par le droit, ou les corps médicaux, vont enfin ne réveiller ? Mettre en lumière ce type d'article est captieux, car il n'évoque que l'aspect post diagnostic covid. C'est vrai que parler de vitamine dans un tel journal, cela n'a pas sens, donc qualifier la vitamine D de médicament, cela a encore du sens ? Le silence des femmes, vu leur place dans les systèmes médicaux m'a beaucoup surpris...

    Dr Bertrand Carlier

    PS: le vétérinaire, que je suis, a comparé la différence de gestion des dossiers vitamine chez les animaux et les humains. Visiblement on respecte plus une truie qu'une adolescence en France... Je pose la question de la vitamine D aux femmes noires que je rencontre. Leur réponse est enrichissante...

  • La réponse de la rédaction

    Le 30 octobre 2021

    Le simple fait que cet article soit publié dans la rubrique Tribune signifie qu'il supporte un point de vue qui ne reflète pas nécessairement celui de l'ensemble de la rédaction. Il en est de même dans les interviews...

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