
Paris, le mercredi 22 juin 2022 - La Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) a dévoilé hier une cartographie interactive baptisée Data pathologies qui compile les données des 1,5 milliard de feuilles de soins établies annuellement.
Cet outil met à disposition du grand public un ensemble de données (Data en novlangue) sur 57 pathologies, traitements chroniques et épisodes de soins. Il permet également de visualiser l’évolution de l'incidence et du coût de ces pathologies.
Cette cartographie concerne au total les 168 milliards d’euros de dépenses annuelles de santé de 2020 pour 66,3 millions de personnes.
Plus de 3 millions de Français suivis pour un cancer
Pour chacun de ces groupes de pathologies le site donne accès au nombre de patients concernés, à la répartition par sexe, aux dépenses totales et leur évolution et aux dépenses par patient et par an.
On constate, par exemple, que 8 421 360 assurés sociaux bénéficiaient d’une prise en charge du risque vasculaire en 2020, que 3 371 090 étaient suivis pour un cancer et 2 769 590 pour une maladie psychiatrique, pour un coût annuel par patient, respectivement, de 669 €, 6 290 € et 5 926 €.
« Tout n’est pas traçable » a néanmoinsregretté Damien Vergé, directeur de la stratégie, des études et de la statistique à la CNAM, lors de la présentation à la presse. « Si vous allez chez votre généraliste et que vous consultez pour un syndrome grippal, une gastro, on voit seulement apparaître une consultation dans notre système d’information. Ce n’est pas la prescription qui va nous aider à identifier la pathologie. C’est une des limites » détaille-t-il.
Tendances lourdes
L’Assurance maladie a tiré plusieurs enseignements de l’analyse de ces données entre 2015 et 2020 et observe « des évolutions lourdes ».
Sur cinq ans, les dépenses ont progressé de plus de 15 milliards d’euros, avec un ralentissement en 2020 lié à la crise sanitaire. « On voit une concentration des dépenses de santé autour des personnes qui souffrent de pathologies chroniques », a déclaré Thomas Fatôme, directeur général de la CNAM. Sur les 168 milliards d’euros de dépenses, 104 milliards sont liés à ces maladies, soit « deux tiers des dépenses » pour un peu plus d’un tiers des assurés (4 300 euros en moyenne).
L’exemple le plus frappant est celui de l’oncologie où les dépenses croissent fortement depuis 2015. « Le coût moyen des traitements pour les cancers actifs a augmenté de 18,2 % en 5 ans » a précisé Thomas Fantôme. Pour le cancer du poumon par exemple, le coût des traitements annuels par patient est ainsi passé, en 5 ans, de 16 900 euros à 25 300 euros en moyenne (+ 50 %).
La marque du Covid
« Les grands équilibres en termes de pathologies sont restés les mêmes en 2020, mais sur certaines pathologies, on a pu avoir des perturbations importantes », a expliqué le Dr Ayden Tajahmady, directeur adjoint de la stratégie, des études et de la statistique.
La Caisse a recensé près de 200 000 patients ont fait un séjour à l’hôpital pour Covid-19, dont 42 000 ont fait un passage en soins critiques. Au total, la Covid a représenté une dépense totale de 1,6 milliard d’euros, dont 90 % pour les hospitalisations. Cela représente un coût de 7 800 euros par patient.
Les hospitalisations ponctuelles ont également été modifiées par la crise sanitaire. Il s’agit en particulier des chirurgies programmées. Elles ont ainsi baissé de 1,2 million de patients avec une baisse de la dépense totale de 4 milliards d’euros (-10,6 %). En revanche, la dépense moyenne par individu a augmenté de 2,6 %. « Cela prouve que ce sont probablement les patients les plus lourds qui ont fait l’objet de ces prises en charge », a avancé le Dr Ayden Tajahmady.
La Covid aura aussi interféré avec les maladies cardiovasculaires et les épisodes d’insuffisance cardiaque aiguë.
Ces épisodes ont diminué de -10,5 % en 2020, soit près de 21 000 patients en moins. « Cela s’explique de plusieurs façons. La première est que l’insuffisance cardiaque est un facteur de risque d’avoir une Covid grave. On a donc un certain nombre de patients pour lesquels la Covid a été ‘en concurrence’ avec l’insuffisance cardiaque ; ces derniers ont été hospitalisés pour un Covid et n’ont pas eu de décompensation de l’insuffisance cardiaque. D’autre part, pour un certain nombre de ces patients, cela peut s’expliquer par une moindre prise en charge de ces épisodes aigus ».
D’autres effets « indirects » ont été mis en relief et notamment la hausse des délivrances de traitements psychotropes : + 2,3 % de patients concernés en 2020.
Nul doute que Data pathologies deviendra un outil précieux pour les professionnels et les administrateurs de la santé dans les années à venir.
Voir : https://data.ameli.fr/pages/data-pathologies/
F.H.