
Le traitement de la polyarthrite rhumatoïde par le tocilizumab semble plus efficace chez les hommes que chez les femmes, selon une analyse d'une étude randomisée publiée dans le Lancet Rheumatology. Ce travail tendrait aussi à prouver que d’autres traitements de la maladie seraient aussi plus efficaces chez l’homme.
L’étude NORD-STAR
L'étude NORD-STAR, multicentrique de phase 4 menée au Danemark, en Finlande, en Islande, en Norvège, en Suède et aux Pays-Bas, a été présentée au dernier congrès de l'European Alliance of Associations for Rheumatology (EULAR 2022). Cette étude comparait l'efficacité de l'abatacept, du certolizumab-pegol et du tocilizumab et un traitement conventionnel sans biothérapie chez des patients de plus de 18 ans nouvellement diagnostiqués et n'ayant jamais reçu de traitement modificateur de la maladie. Puisque la PR est une affection qui atteint majoritairement les femmes, Kristina Lend et coll. (Amsterdam, Pays-Bas) se sont penchés sur l'impact du sexe dans la réponse au traitement en analysant les différences de rémission de l'indice d'activité clinique de la maladie (CDAI) (score CDAI ≤2-8). L'étude a inclus un total de 812 patients entre 2012 et 2018 : 203 ont été traités par certolizumab-pegol, 204 par abatacept, 188 par tocilizumab et 217 par le traitement non biologique. 69 % des participants étaient des femmes.
Un effet en fonction du sexe lié à l’IL-6 ?
Les taux de rémission CDAI observés à 24 semaines étaient numériquement plus importants chez les hommes que chez les femmes en dépit d'une activité de la maladie comparable à l'inclusion : 55 % vs 50 % avec le traitement conventionnel actif, 57 % vs 52 % avec le certolizumab-pegol, 65 % vs 51 % avec l'abatacept et 61 % vs 40 % avec le tocilizumab. Dans l'analyse ajustée, prenant le traitement conventionnel actif comme référence, la seule différence significative entre les hommes et les femmes concernait le groupe tocilizumab (P interaction=0,015) : sur la durée, les hommes du bras tocilizumab présentaient une probabilité de rémission CDAI plus élevée que les hommes du groupe de traitement conventionnel actif (0,12, 95% BI : 0,00-0,23), alors que les femmes du groupe tocilizumab avaient une probabilité de rémission plus faible que les femmes du groupe de traitement conventionnel actif (-0,05, 95% BI : -0,13-0,02). Dans les autres sous-groupes, les différences n'étaient pas statistiquement significatives, mais des tendances à une meilleure efficacité chez les hommes étaient également observées.
Les auteurs estiment que l'obtention d'une tendance similaire dans tous les groupes -même si le seuil de significativité n'est obtenu que pour un seul traitement- suggère que cette différence généralisée entre les sexes n'est pas liée au traitement. Cette moindre efficacité chez les femmes pourrait être liée à une cause hormonale, les hormones sexuelles pouvant avoir un effet sur la perception de la douleur et sur l'immunité. Enfin, les auteurs soulignent que la différence entre les hommes et les femmes était significativement plus importante avec le tocilizumab, un inhibiteur de l'interleukine (IL)-6, qu'avec le traitement conventionnel actif, suggérant un possible effet supplémentaire basé sur le sexe spécifique au blocage de l'IL-6.
Les auteurs d'un commentaire publié dans la même revue estiment que la non-significativité statistique pour les traitements autres que le tocilizumab pourrait être liée à un manque de puissance statistique de l'étude, qui n'était pas conçue initialement pour étudier la différence d'efficacité en fonction du sexe. Une étude randomisée spécifiquement conçue à cette fin serait souhaitable afin de clarifier cette question.
Cet article a d'abord été publié sur MediQuality le 09/02/2023
Dr Isabelle Catala