
Des études antérieures ont suggéré que certains médicaments antihypertenseurs permettaient de freiner l’aggravation d’un déficit cognitif léger (DCL), voire de différer notablement l’évolution vers une démence authentique.
La correction du profil de risque cardiovasculaire pourrait entrer en ligne de compte, notamment quand il est question de démences vasculaires. Les antagonistes pharmacologiques du système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA) ont été particulièrement cités dans la littérature internationale, au travers d’études d’observation qui n’ont jamais permis de dépasser le stade des hypothèses.
Il est vrai que la distribution ubiquitaire des SRAA à l’échelon local y compris cérébral a de quoi alimenter ces hypothèses. Une étude de cohorte rétrospective s’est attachée à comparer les deux classes pharmacologiques qui interagissent avec le SRAA : les inhibiteurs de l’enzyme de conversion et les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine 2 (ARA2).
Laquelle est la plus à même de ralentir la progression d’un DCL vers la démence ? Les données ont été obtenues à partir de l’étude de cohorte prospective dite ADNI (Alzheimer's Disease Neuroimaging Initiative).
403 patients porteurs d’une HTA et d’un déficit cognitif léger
Ont été sélectionnés 403 participants (âge moyen = 74,0±7,3 ans ; femmes : 37,7 %) atteints à la fois d’une hypertension artérielle et d’un DCL à l’état basal. Les informations sur les traitements antihypertenseurs (IEC, ARA2, β-bloquants, inhibiteurs calciques, diurétiques) ont été obtenues sur la foi des déclarations des patients.
Les données ont été traitées au moyen du modèle des risques proportionnels de Cox, avec ajustement selon les facteurs de confusion potentiels.
Au terme d’un suivi médian de 3 ans, le DCL a évolué vers la démence chez 158 patients (39,2 %). Par rapport aux IEC, Les ARA2 ont été associés à un moindre risque d’évolution vers la démence, le hazard ratio ajusté (HRa) correspondant étant en effet estimé à 0,45 [IC 95 %, 0,25-0,81] ; p=0, 023).
Il en a été de même, comparativement aux autres classes pharmacologiques d’antihypertenseurs (β-bloquants, inhibiteurs calciques ou diurétiques), la valeur correspondante du HRa étant estimée à 0,49 [IC 95 %, 0,27-0,89] ; p=0,037).
Comparativement à l’absence de tout traitement antihypertenseur, le HRa a été estimé à 0,31 [IC 95 %, 0,16-0,58] ; p=0,001).
Chez les patients atteints à la fois d’une HTA et d’un DCL, un traitement par les ARA2 est associé à un moindre risque d’évolution vers la démence, ceci par rapport aux IEC et aux autres classes pharmacologiques.
Il va sans dire que ces résultats émanant d’une étude
rétrospective doivent être confirmés, avant d’en tirer des
conclusions fermes ou de se lancer dans la recherche de mécanismes
d’action hypothétiques.
Dr Philippe Tellier