
La nette différence entre les premiers résultats de l'étude académique multicentrique randomisée française MITRA-FR et ceux de l'étude américano-canadienne COAPT publiés à la même époque a beaucoup surpris. Les résultats à 2 ans présentés en conférence de presse et en session Hotline du congrès annuel de l'European Society of Cardiology (ESC 2019) confirment les premières données et apportent des éléments utiles à la réflexion.
Pour mémoire, MITRA-FR a concerné 304 patients avec insuffisance mitrale secondaire symptomatique sévère, hospitalisés au moins une fois pour insuffisance cardiaque au cours de l'année précédant leur inclusion et échappant à un traitement médical bien conduit. L’aire de l'orifice régurgitant effectif était > 20 mm² (moyenne 31) et la fraction d'éjection entre 15 et 40 % (moyenne 33).
A 1 an, l'analyse en intention de traiter et l'analyse per protocole des données montraient l'absence de différence d'incidence du critère principal (somme des décès et des premières hospitalisations non prévues pour insuffisance cardiaque) entre les sujets recevant le clip mitral en sus du traitement médical optimal et les sujets ne recevant que ce traitement. Ce résultat a été constaté sur l'ensemble des sous-groupes évalués.
Une des explications avancées pour expliquer la disparité des résultats entre MITRA-FR et COAPT était à l'époque la différence de longueur de suivi. Piste peu convaincante puisque les résultats à 2 ans montrent toujours une incidence identique du critère principal dans les deux bras (Hasard Ratio (HR) à 1,01 non significatif). Par ailleurs, l'amélioration de la classe NYHA est comparable dans les deux bras de l’étude et il n'y pas de différence significative de mortalité. Des résultats constatés tant en intention de traiter qu'en per protocole et qui concernent tous les sous-groupes évalués.
A noter qu'une analyse du critère d’évaluation principal limitée à la seule deuxième année indique un bénéfice dans le bras avec clip sous la forme d'une réduction significative du cumul des hospitalisations pour insuffisance cardiaque (HR à 0,47 significatif). Intéressant, mais à prendre avec beaucoup de précaution car ni cette analyse, ni le critère évalué n'étaient initialement prévus dans le protocole.
Sur base de l'ensemble des résultats, il a été avancé que la différence entre MITRA-FR et COAPT s'expliquait probablement par l'inclusion dans MITRA-FR de patients ayant des ventricules gauches plus détériorés et des insuffisances mitrales moins sévères, ce qui les rendraient donc moins accessibles à un bénéfice du clip.
Une méta-analyse planifiée sur les résultats individuels des patients des 2 études devrait apporter d'autres éléments utiles pour le choix des patients les plus susceptibles de bénéficier de la procédure.
Dr Jean-Claude Lemaire et Dr Eric Tison