
Paris, le mercredi 14 avril 2021 – Plusieurs médecins s’inquiètent du lobbying intense mené par l’A-MCA, une association défendant le recours aux médecines alternatives.
Le 18 mars dernier, des députés ont déposé un projet de résolution visant à créer une agence gouvernementale d’évaluation des médecines alternatives. La dernière étape de l’intense lobbying mené par l’A-MCA (Association Médecine complémentaire et Alternative) pour faire reconnaitre par l’Etat l’utilité des « approches complémentaires » à la médecine « classique ».
Fondée en septembre 2020 par deux sociologues et un médecin, l’A-MCA vise à « favoriser la réflexion, l’expérimentation, l’action et la formation en faveur de l’intégration des médecines complémentaires et alternatives (MCA) ». Elle dispose déjà de plusieurs soutiens de choix. En 2019, ses fondateurs ont ainsi participé à un colloque organisé au ministère de la Santé avec le professeur Jérôme Salomon. Ils ont ensuite obtenu la création des « Premières rencontres parlementaires des médecines complémentaires et alternatives ».
Une tribune mal venue
Surtout, insigne honneur, ils ont obtenu la publication, le 13 mars dernier, dans le journal Le Monde, d’une tribune défendant la transformation de l’A-MCA en agence gouvernementale. Une tribune signée par plusieurs médecins, des députés et des anciens ministres. Principal argument avancé, 68 % des Français croient en l’efficience des (MCA), sans que l’on comprenne très bien en quoi cela établit la preuve de cette efficacité car suivant cette logique, la terre serait longtemps restée plate. Selon les auteurs de la tribune, la création d’une agence gouvernementale des MCA « serait un acte fondateur pour créer la médecine de demain au sens d’une articulation efficiente du « cure » (soin) et du « care » (prendre soin) ».
Ce lobbying et l’adhésion de personnalités politiques au projet de l’A-MCA suscitent une inquiétude grandissante. Le 22 février dernier, la Ligue des droits de l’Homme est la première à avoir tiré la sonnette d’alarme, dénonçant dans un communiqué « une évolution dangereuse pour la santé de nos concitoyens ».
Guérir par la pensée, quelle bonne idée !
Ce dimanche, plusieurs médecins, dont le professeur Karine Lacombe, ont publié une tribune dans Le Figaro pour dénoncer les pratiques de l’A-MCA. Ses auteurs critiquent notamment l’hypocrisie de l’A-MCA qui dit « lutter contre les dérives en santé », c’est-à-dire les pratiques sectaires, tout en défendant des médecines alternatives déjà pointés du doigt par l’OMS et les autorités françaises pour leur aspects sectaires. Ainsi, à côté de la « classique » homéopathie ou de la sophrologie, l’association soutient également les vertus de la médecine anthroposophique, selon laquelle les maladies sont envoyés par les dieux et liés à la réincarnation ou encore le décodage cellulaire, technique qui postule que les maladies peuvent se guérir par la pensée !
Les auteurs de la tribune du Figaro appellent les autorités à se montrer particulièrement vigilante. Mais le vers serait semble-t-il déjà dans le fruit : le 22 février dernier, grâce aux soutiens de plusieurs députés, l’A-MCA a participé à un colloque avec la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes).
Nicolas Barbet