Les séropositifs pourront être admis dans la police

Paris, le samedi 17 décembre 2022 - Pour les associations de patients et les collectifs de défense des droits LGBT, la décision prise par le gouvernement d’abroger le dispositif « SIGYCOP » représente l’aboutissement d’une longue lutte pour les droits des personnes vivant avec le VIH.

Une discrimination de fait


En quoi consistait ce dispositif ? Jusqu’à présent, en France, chaque postulant souhaitant entrer dans les forces de l’ordre ou dans l’armée devait passer l’épreuve du profil SIGYCOP à l’issue d’un examen médical rigoureux.

Après une visite et plusieurs tests, un médecin militaire examinant l’aspirant-candidat attribuait à ce dernier une note chiffrée de 1 à 6 sur plusieurs items (état psychique, acuité visuelle et auditive, mais aussi « l’état général »). En pratique, une simple note au-dessous de 2 obérait gravement les chances de pouvoir être recruté dans le corps choisi.

Or, de fait, les personnes vivant avec le VIH se voyaient attribuer en fonction de leur niveau d’infection ou de prise en charge de la maladie un coefficient d’état général de 3 à 5, les excluant de fait de toute perspective de recrutement.
Certaines grandes écoles, à l’image de Polytechnique, avaient modifié leurs propres critères de recrutement afin de rendre possible l’intégration de personnes vivant avec le VIH. Mais cette mesure d’exclusion implicite restait en vigueur notamment dans les forces de l’ordre et dans l’armée.

Un recours exercé en 2020 devant le Conseil d’Etat


C’est dans ce contexte qu’en décembre 2020, six associations de défense des droits des patients avaient saisi le Conseil d’Etat pour faire abroger ce dispositif qui perdurait, malgré des désaveux politiques venus de tous bords.

En 2019, un rapport parlementaire trans-partisan rédigé par Bastien Lachaud (LFI) et Christophe Lejeune (LREM) avait mis en lumière une unanimité politique sur le sujet, les deux députés s’étonnant du fait que « des personnes séropositives, sous traitement, avec une charge virale indétectable, étaient jugées a priori inaptes à entrer dans les armées ». Et ce, « alors même que plusieurs centaines de militaires ont chaque année des rapports sexuels à risques en opération ».

Mais c’est surtout la loi du 6 décembre 2021 qui a permis un pas décisif en direction d’une abrogation des « discriminations » systématiques. Cette loi « relative aux restrictions d'accès à certaines professions en raison de l'état de santé » exige à ce que l’accès à une profession règlementée soit décidé en fonction de l’état de santé réel du candidat et non par la simple présence d’une maladie chronique.

L'appréciation médicale doit être réalisée « de manière individuelle et tient compte des possibilités de traitement et de compensation du handicap. »

Victoire pour la police… mais pas encore pour la gendarmerie et l’armée


Par un arrêté publié au Journal officiel le 25 novembre « relatif aux conditions de santé particulières exigées pour l’exercice des fonctions relevant des corps de fonctionnaires actifs des services de la police nationale » le gouvernement a mis fin au dispositif SIGYCOP pour l’entrée dans la police nationale.

Une décision saluée comme une « victoire » pour les associations LGBT. « Les personnes vivant avec le VIH pourront désormais servir dans la police nationale, sans discrimination liée à leur état de santé » indique dans un communiqué Etienne Deshoulières, qui avait porté le recours devant le Conseil d’Etat en décembre 2020.

« Après avoir contesté les arguments des associations sur le fond, le ministère de l’intérieur a finalement changé de position, en abrogeant l’arrêté à l’origine de la discrimination dénoncée », se félicite l’avocat. A ce stade, l’arrêté pris ne concerne toutefois que les conditions d’entrée dans la police nationale. Reste à savoir si l’armée et la gendarmerie emboiteront le pas dans les prochaines semaines, ou si « la grande muette » fera de la résistance.

Quels postes pour les policiers admis ?


L’appréciation du respect des conditions de santé exigés d’un candidat se fera désormais à l’issue d’un examen clinique réalisé par un médecin, permettant ainsi de tenir compte de l’état général du patient-candidat à un moment donné. Reste à savoir en pratique comment et où les nouvelles recrues seront intégrées dans la police nationale.

Charles Haroche

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions

Soyez le premier à réagir !

Les réactions aux articles sont réservées aux professionnels de santé inscrits
Elles ne seront publiées sur le site qu’après modération par la rédaction (avec un délai de quelques heures à 48 heures). Sauf exception, les réactions sont publiées avec la signature de leur auteur.

Réagir à cet article