Lymphome de Hodgkin en rechute après autogreffe : l’espoir avec le nivolumab

Le pronostic des patients atteints de lymphome de Hodgkin (LH) en rechute ou réfractaire (R/R) est historiquement très péjoratif avec une survie médiane de 2 ans. Le brentuximab vedotin (BV) a montré une efficacité dans cette population avec 75 % de réponses et une survie sans progression (SSP) de 5,6 mois. De plus, pour certains patients ayant obtenu une rémission complète (RC) avec BV la réponse peut se maintenir durablement jusqu’à 5 ans.

Des altérations génétiques en 9p24.1 dans le LH conduisent à une hyperexpression à la surface des cellules tumorales de PD-L1 et PD-L2 (program cell death-ligands 1 et 2) qui réduisent les réponses immunitaires T par liaison à PD-1 (program cell death 1).

Le nivolumab est un anticorps monoclonal humanisé qui bloque la voie PD-1, levant l’inhibition des cellules T et favorisant les réponses immunes antitumorales.

Les auteurs rapportent les résultats d’une étude de phase II internationale portant sur 3 cohortes de patients adultes atteints de LH R/R après autogreffe de cellules souches hématopoïétiques. La cohorte A (n = 63) est composée de patients n’ayant pas reçu de BV, la cohorte B (n = 80) de patients ayant reçu BV après autogreffe, la cohorte C (n = 100) de patients ayant reçu BV avant et/ou après autogreffe.

Le traitement consiste en nivolumab IV 3mg/kg tous les 15 jours jusqu’à progression ou toxicité inacceptable. L’âge médian des patients est 34 ans. Les patients de la cohorte A (BV naïfs) sont ceux qui ont été les moins antérieurement traités, ceux de la cohorte B (BV après autogreffe ) sont ceux ayant le plus long intervalle entre le diagnostic et le traitement par nivolumab. Le recul médian est de 19, 23,16 mois pour les cohortes A, B, C respectivement ; 40 % des patients ont toujours un traitement.

Des réponses fréquentes, rapides et surtout durables

Le taux de réponse est de 69 % avec 16 % de RC et 53 % de réponses partielles (RP). Les taux de réponse sont de 65 %, 68 %, 73 % dans les cohortes A, B, C, avec respectivement 29 %, 13 %, 12 % de RC. Les réponses sont obtenues après 2,1 mois et la durée de réponse est de 16,6 mois (cohorte A 20,3 mois, B 15,9 mois, C 14,5 mois). La SSP est de 14,7 mois (cohorte A 18,3 mois, B 14,7 mois, C 11,9 mois). Elle est identique selon que les patients ont reçu BV après autogreffe (11,9 mois) ou seulement avant (11,5 mois).

Le délai jusqu’à reprise d’un traitement n’est pas atteint pour les cohortes A et B, il est de 19,4 mois pour la cohorte C.

Au total 105/243 patients ont progressé parmi lesquels 70 ont été traités après progression initiale (en médiane de 5,2 mois). Parmi ces derniers, 7 % ont obtenu une RC et 44 % une RP avant progression ultérieure. Parmi les patients évaluables après progression, 61 % gardent une masse tumorale stable ou en régression, même après apparition de nouvelles lésions.

Parmi les patients traités après progression initiale, le délai avant la nécessité d’un nouveau traitement est de 8,8 mois alors qu’il est de 1,5 mois pour ceux non-traités après progression. La survie à 1 an est de 84 % pour les patients traités au-delà de la première progression vs 61 % pour les autres.

Les effets indésirables (EI) les plus fréquents ont été fatigue (23 %), diarrhée (15 %), réaction à la perfusion (14 %), ceux de grade 3-4 les plus fréquents ont été une augmentation de la lipase (5 %), une neutropénie (3 %), une augmentation des ALAT (3 %). Les EI ont motivé un arrêt du traitement chez 7 % des patients (pneumonie, hépatite auto-immune). Aucun des 29 décès n’était en rapport avec le nivolumab.

Une allogreffe de cellules souches a été réalisée chez 44 patients après une médiane de 13 doses de nivolumab et dans un délai de 49 jours après administration de la dernière dose. A 6 mois, la mortalité liée à la greffe est de 13 % et le taux de progression de 7 %.

Dix patients ont eu une GvH aiguë, grade 3-4, dont 2 une GvH suraiguë survenue dans les 14 jours.

Cette étude démontre l’efficacité du blocage de la voie PD-1 dans le LH R/R après autogreffe, avec un profil de sécurité favorable. Le nivolumab entraîne des réponses fréquentes et durables, aussi bien chez les patients naïfs de BV que ceux ayant reçu BV avant ou après autogreffe. Le bénéfice durable de l’inhibition de PD-1 n’est pas réservé aux patients en RC et même les patients qui n’atteignent pas une réponse objective peuvent trouver un bénéfice clinique. Les patients traités au-delà de la progression initiale maintiennent un contrôle de leur maladie sous traitement, avec un taux de survie à 1 an de 84 %. Les patients allogreffés après nivolumab ont un taux de rechute faible après 6 mois de suivi.

Dans l’ensemble, ces résultats suggèrent que le traitement par nivolumab n’exclut pas une allogreffe. Il est cependant possible que le blocage de PD-1 augmente la toxicité précoce de l’allogreffe.Un suivi plus long est nécessaire pour évaluer le devenir des patients après blocage de PD-1 et allogreffe.

Pr Gérard Sébahoun

Références
Armand P et coll. : Nivolumab for Relapsed/Refractory Classic Hodgkin Lymphoma After Failure of Autologous Hematopoietic Cell Transplantation: Extended Follow-Up of the Multicohort Single-Arm Phase II Check Mate 205 Trial. Clin Oncol., 2018 ; publication avancée en ligne le 27 mars. DOI : https://doi.org/10.1200/JCO.2017.76.0793

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