Mourir victime de la Covid ou mourir infecté par SARS-CoV-2, telle est la question !

Londres, le mardi 22 septembre 2020 – Il a été beaucoup rappelé que la grande majorité des personnes présentant des formes graves de la Covid-19 et plus encore celles qui infectées par SARS-CoV-2 périssent sont affectées d’une ou plusieurs comorbidités. Ces dernières favorisent ainsi le risque de mourir d’une Covid-19 mais ont également une incidence sur la cause du décès. Il est en effet certain que dans un certain nombre de cas, la Covid-19 n’est pas l’unique cause du décès. Dans un rapport publié le 26 août, les Centers for Disease Control and Prevention des Etats-Unis soulignaient ainsi que pour 94 % des 180 000 morts attribuées à la Covid (qui avaient alors été l’objet de l’analyse), on pouvait déplorer « 2,6 conditions ou causes supplémentaires ».

La Covid-19 de moins en moins souvent en première ligne ?

Dans cette même perspective, des chercheurs de l’université d’Oxford, membres du « Centre for Evidence-Based-Medicine » (https://www.cebm.net/covid-19/death-certificate-data-covid-19-as-the-underlying-cause-of-death/), viennent de publier sur le site de cet institut une analyse concernant les causes de décès des personnes comptabilisées comme mortes de la Covid-19. Il s’agissait de déterminer la proportion de personnes pour lesquelles la Covid-19 ne devrait pas être considérée comme la cause première du décès, grâce à une analyse des certificats médicaux et des chiffres établis par Public Health England (PHE). Ils ont déterminé que sur les 49 500 morts officiellement recensés et où effectivement la Covid-19 figure sur le certificat de décès, cette dernière n’est pas la cause première de la mort dans 7,8 % des cas. Ils ont également pu constater que cette proportion a fortement progressé pendant les mois de juillet et août, atteignant 29 %. Cette évolution est également constatée dans l’analyse des causes de mortalité proposées par les registres nationaux écossais qui relèvent que la Covid apparaît comme la cause première de décès sur 94,6 % des certificats jusqu’en semaine 21 (18 au 25 mai), mais seulement sur 76,3 % d'entre eux entre la semaine 22 et la semaine 32.

Des différences à analyser

Pour les auteurs, ces observations doivent une nouvelle fois inviter à une appréciation nuancée des chiffres. Daniel Howdon, Jason Oke et Carl Heneghan analysent ainsi : « Bien que la certification de décès soit à juste titre considérée comme indispensable pour la détermination de la cause du décès, il est important de pouvoir faire la distinction entre les décès pour lesquels la COVID-19 était une cause contributive de ceux où la COVID-19 était la cause première. Il semble qu'au cours de l'épidémie, des évolutions en la matière se soient produites », concluent-ils, sans se prononcer sur les raisons pouvant expliquer les différences constatées, qu’elles soient liées aux habitudes de déclaration ou d’une transformation du profil des patients infectés.

Les surmortalités européennes réelles mais peut-être pas apocalyptiques ?

Sans doute, ces éléments suggèrent-ils une nouvelle fois l’importance de se référer à l’analyse des surmortalités. Or, en la matière, des éléments récents, relevés par exemple par le professeur Jean-François Toussaint nourrissent eux aussi la réflexion. Il rapporte les données du système européen de monitoring de la mortalité : « Cette surveillance continue révèle une surmortalité lors des semaines 12 à 18 (soit entre le 16 mars et le 30 avril) pour 9 pays européens (Belgique, Espagne, France, Irlande, Italie, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède, Suisse) pour un nombre total en Europe de +115 000 décès surnuméraires (comparé aux deux dernières années : +90 000 par rapport à 2018, +140 000 par rapport à 2019). Durant les deux dernières semaines analysées (semaines 36 et 37 : début à mi-septembre), et sous réserve de confirmation, la Finlande et la France présentaient des valeurs de mortalité inférieures à celles de la période de référence.  En France l’INED, à partir des données Insee, a publié des estimations comparables : l’excès serait d’environ 12 à 15 000 décès, ce qui aboutirait à une baisse de 2 mois de l’espérance de vie, qualifiée de "modeste" par les directeurs de recherche à l’origine de ce travail ».

Aurélie Haroche

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Vos réactions (4)

  • Mourir de... ou décéder... avec

    Le 22 septembre 2020

    La fiabilité en France des certificats de décès est problématique. Ce sont souvent les internes à la place des PH qui assurent cette rédaction administrative à laquelle personne ne les a formés.
    En ville, le médecin vit dans le plus grand inconfort, le contact avec la famille n'arrange rien, ce que certains peuvent interpréter comme leur échec. Bien comprendre que s'il y a dans l'air une maladie aussi peu prouvable que notre Covid19, le praticien poussé par le courant médiatique peut y trouver un moyen de se disculper de toute responsabilité.

    La cause immédiate de la mort, le plus souvent, demeure du domaine du vraisemblable.
    Sauf noter systématiquement : arrêt cardio-respiratoire. Je l'ai vu faire.

    Alors, ne demandons aux chiffres que ce qu'ils peuvent dire, pas ce que nous voulons entendre dire pour sortir de l'inconnu. Tous les médecins le savent, mais qui écoute les médecins qui remplissent les petits papiers bleus valant autorisation d'inhumer ?

    Dr François-Marie Michaut

  • Mourrir...ou décéder avec...

    Le 23 septembre 2020

    Tout à fait d'accord avec l'article du Dr Michaut.
    En plus il faut absolument différencier :
    1- entre les études résultant des observations de terrain, par les professionnels de santé, et 2- des études "pondues" sur des données de la littérature.

    Personnellement je fais d'avantage confiance aux études de terrain, mêm si parfois elles peuvent aussi être biaisées par l'observateur...

    Dr Roland Plumeau

  • T2A et Covid

    Le 24 septembre 2020

    Quelle est l’incidence financière pour les établissements de santé du modificateur Covid pour le dossier d’un patient déclaré décédé du Covid ?
    En clair : combien leur rapporte de déclarer décédé DU Covid un patient décédé AVEC le Covid ?
    Les tests manquaient en France alors qu’ils étaient pratiqués en grand nombre en Allemagne, cela expliquerait-il en partie la différence de mortalité liée au virus dans les 2 pays par une incitation financière à des déclarations par excès en France ?

    Dr Antoine Van Nieuwenhuyse

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