Myocardite après vaccination contre la Covid-19 : les hommes et les adolescents d’abord

Des cas de myocardites et de péricardites, attribués aux vaccins à ARNm contre la Covid-19, ont été repérés dès le mois d’avril 2021, suscitant rapidement l’activation des signaux de surveillance. Une équipe canadienne a réalisé une synthèse des données recueillies jusqu’à présent concernant l’incidence de ces évènements indésirables, les facteurs de risque associés, leur présentation clinique et le pronostic à court et long terme.

L’analyse est réalisée sur 46 études.

Il apparaît en premier lieu que la myocardite survenant après une vaccination contre la Covid-19 par vaccin à ARNm, touche très majoritairement les adolescents et jeunes adultes de sexe masculin. Son incidence moyenne est de 140 cas pour 1 million de vaccinés, mais, parmi les garçons et filles de 5-11 ans et les filles de 18-29 ans, l’incidence est de 20 cas pour 1 million. L’incidence après une 3e dose n’est pas encore connue. Les données semblent indiquer que l’incidence est plus élevée après le vaccin Moderna qu’après le vaccin Pfizer, chez les 18-29 ans.

Espacer les deux premières doses de 56 jours

En dehors du genre, le seul facteur identifié jusqu’à présent est l’intervalle entre les deux premières doses. L’incidence est supérieure quand l’intervalle entre les deux injections est inférieur à 30 jours, et les données spécifiques aux hommes de 18-29 ans indiquent que les deux premières doses devraient être espacées de 56 jours pour qu’une baisse substantielle de l’incidence soit constatée.

Chez les adolescents et les adultes, la myocardite « typique » (plus de 90 % des cas) survient chez un homme de 20-30 ans, et les premiers symptômes apparaissent 2 à 4 jours après la seconde dose justifiant 8 fois sur 10 une hospitalisation pendant 2 à 4 jours. La péricardite, pour laquelle l’on dispose de moins de données, se présente sous des formes plus variées en termes d’âge, de genre, de moment de survenue et de taux d’hospitalisation.

Peu de données sont disponibles concernant l’évolution à long terme. Trois séries de cas suggèrent toutefois la persistance de symptômes, d’anomalies échocardiographiques, de restriction des activités ou la nécessité d’un traitement chez plus de la moitié des patients, 3 mois après l’apparition des symptômes.

La revue de la littérature retrouve plus de 16 hypothèses émises pour expliquer la survenue de ces myocardites ou péricardites après la vaccination. Les plus souvent évoquées sont une réponse hyper-immune ou inflammatoire, un phénomène d’auto-immunité, une hypersensibilité retardée, une myocardite hyperéosinophilique, une hypersensibilité à certains composants du vaccin (nanoparticules lipidiques, polyéthylène glycol). Aucune de ces hypothèses n’a jusqu’à présent reçu confirmation.

Les auteurs soulignent enfin la persistance de nombreuses inconnues. Elles concernent notamment l’évolution clinique chez les enfants de 5-11 ans, la survenue de myocardite ou de péricardite après la 3e dose, et le pronostic à long terme.

Dr Roseline Péluchon

Références
Pillay J et coll. : Incidence, risk factors, natural history, and hypothesised mechanisms of myocarditis and pericarditis following covid-19 vaccination: living evidence syntheses and review.
BMJ 2022; 378: e069445. doi.org/10.1136/bmj-2021-069445

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Vos réactions (3)

  • Et l'injection intraveineuse directe ?

    Le 31 juillet 2022

    En Allemagne, le Comité permanent de vaccination à l'Institut Robert Koch a modifié les recommandations le 17.02.2022 (18ème mise à jour de recommandation concernant la vaccination COVID-19) :

    "...Dans des modèles animaux, l'injection intraveineuse directe d'un vaccin à ARNm a entraîné la survenue d'une périmyocardite (clinique et histopathologique)*. Bien que les injections intravasculaires accidentelles soient rares avec l'administration d'un vaccin IM, il est raisonnable d'effectuer une aspiration lors des vaccinations COVID-19 applicables en IM afin d'augmenter la sécurité des vaccins..."

    * Li C, Chen Y, Zhao Y, Christopher Lung D, Ye Z, Song W, et al. Intravenous Injection of Coronavirus Disease 2019
    (COVID-19) mRNA Vaccine Can Induce Acute Myopericarditis in Mouse Model. Clin Infect Dis. 2021;73(12):2372-3.

    Dr Johannes Hambura

  • Bénéfice/Risque

    Le 01 août 2022

    140 myocardites pour 1 million de vaccinés (Donc 0,014%)... Quel est donc le bénéfice de vacciner cette population de jeunes hommes?
    Pour rappel:
    Le taux de mortalité chez les hommes de 20-30 ans infectés par le covid est inférieur à 0,01%
    Comme indiqué dans l'article "L’incidence après une 3e dose n’est pas encore connue." alors que la 3e dose a été généralisé.

    Colombine Chauvin

  • Pathogénie doit venir de patauger ?

    Le 02 août 2022

    Les myo-péricardites en climat SARS-CoV-2 symptômatique ont été notoires à tout age
    Les myocardites post-vaccinales étaient très inhabituelles en pré-covid avec une exception : La vaccination anti-variolique, si souvent citée. Elle était alors essentiellement ENZYMATIQUE et Asymptômatique «1/10 000 » :
    Faix DJ et coll. Prospective safety surveillance study of ACAM2000 smallpox vaccine in deploying military personnel. Vaccine 2020;38(46):7323–30 doi:10.1016/j.vaccine.2020.09.037


    Comme rappelé par Mme C Chauvin, la meilleure prévention des formes post-vaccinales reste l’abstention vaccinale : faute de bénéfice clinique individuel établi < 50ans en l’absence de comorbidité. La signification clinique du « bénéfice sérologique » transitoire m’échappe, l’absence d’immunité stérilisante est un acquis. Ceci reste encore plus exact en climat Omicron puis sous-variants en cours.

    Le Dr J Hambura nous documente* le rôle hypothétique (comme le reste) , expérimentalement, d'une injection intravasculaire accidentelle et son implication pratique : aspirer. Cette hypothèse avait été évoquée sans être documentée dans les "thromboses - thrombopénies auto-immunes" post -AstraZeneca. In memoriam
    Le rôle majeur du sexe masculin, de l'age < 30ans et de la seconde injection jette un doute sur ce point élémentaire de technique, facile à résoudre dans une région deltoïdienne fort peu vasculaire
    *Li C et coll. Intravenous Injection of Coronavirus Disease 2019 (COVID-19) mRNA Vaccine Can Induce Acute Myopericarditis in Mouse Model. Clin Infect Dis. 2022 Jun 10;74(11):1933-1950. doi: 10.1093/cid/ciab707

    Le rôle du premier rappel puis du second ? : pas de signal en ce sens mais bien peu de <30ans concernés par cette stratégie

    Le rôle néfaste de l'imprégnation par la TESTOSTERONE est rarement évoqué. Il est en accord avec les constats cliniques sur sexe et âge. Les myo-péricardites redoutées semblent encore moins fréquentes chez le garçon de 5-11ans, encore en éclipse leydigienne. Ceci méritera confirmation, vu le peu de patients et de travaux dans cette tranche d’âge <12ans

    Le rôle du délai trop court (<1mois) entre première et seconde injection ARNm, d'une infection récente souvent méconnue ont bien été surlignées par les Scandinaves , les Canadiens*
    *Karlstad Ø et coll. SARS-CoV-2 Vaccination and Myocarditis in a Nordic Cohort Study of 23 Million Residents. JAMA Cardiol. April 20, 2022. doi:10.1001/jamacardio.2022.0583
    ** Buchan SA et coll. Epidemiology of Myocarditis and Pericarditis Following mRNA Vaccination by Vaccine Product, Schedule, and Interdose Interval Among Adolescents and Adults in Ontario, Canada. JAMA Netw Open. 2022 Jun 1;5(6):e2218505. doi: 10.1001/jamanetworkopen.2022.18505
    Mieux vaut attendre ou … s’abstenir < 50ans, en l’absence de comorbidité : ils ne me semblent PAS concernés par le bénéfice attendu
    L’attente de vaccins bivalants ou stimulant enfin l’immunité muqueuse (INRA) peut permettre de faire patienter les plus pressés

    Les Canadiens viennent de rappeler, après 18ans, le surrisque de Moderna par rapport à Pfizer, à fortiori avant 30ans (18-30ans : X4,7) :
    Abraham N et coll. Myocarditis and/or pericarditis risk after mRNA COVID-19 vaccination: A Canadian head to head comparison of BNT162b2 and mRNA-1273 vaccines. Vaccine. 2022 Jul 30;40(32):4663-4671. doi: 10.1016/j.vaccine.2022.05.048
    La paucité des injections Moderna et la rareté de l'effet indésirable analysé peuvent expliquer que cette différence n'a pas pu toujours être dégagée (Epi-Phare)
    Le rôle du « surdosage » de Moderna par rapport à Pfizer a été n fois évoqué : il a conduit à l’ajustement posologique de Moderna < 12ans

    Avec les 2 plateformes ARNm, Il est possible que la description des seules formes Symptômatiques (Douleur thoracique) SOUS-évalue la problématique. La déclaration passive mais aussi le biais de notoriété interférent avec les incidences affichées pour les myo-péricardites cliniques
    Une évaluation - dépistage enzymatique (intérêt ?) permettrait peut-être de réviser les chiffres à la hausse : QS vaccination … anti-variolique dans sa version « historique ».

    Dr JP Bonnet

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