
Nous ingérons quotidiennement des nitrates et des nitrites, par le biais de l’eau et de l’alimentation. S’ils sont présents naturellement dans l’environnement, leur présence dans l’eau de consommation est principalement une conséquence de l’activité humaine (utilisation d’engrais azotés, rejets des élevages intensifs, etc.), responsable de la pollution de l’eau de surface et des nappes. L’exposition alimentaire aux nitrates se fait essentiellement par la consommation de végétaux, particulièrement par les légumes feuilles, ainsi que par l’utilisation de nitrites en tant qu’additifs dans l’industrie alimentaire, dans le but de limiter le développement de bactéries pathogènes, notamment dans les charcuteries. En France, la présence de nitrites et nitrates est signalée pour plus de 15 000 produits référencés.
Les nitrites et nitrates ingérés via l’alimentation sont à l’origine de la formation de composés nitrosés, dont certains sont cancérogènes. C’est ainsi que l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a confirmé récemment « l’existence d’une association entre le risque de cancer colorectal et l’exposition aux nitrites et/ou nitrates, qu’ils soient ingérés par la consommation de viande transformée ou via la consommation d’eau de boisson. »
Cet effet cancérigène des nitrates et nitrites pourrait toutefois ne pas être le seul. Des études expérimentales ont aussi suggéré le rôle possible des composants nitrates dans le développement du diabète de type 2. C’est dans cet objectif qu’une équipe française a étudié les données de plus de 100 000 participants à la cohorte NutriNet-Santé, fournissant depuis 2009 des questionnaires très détaillés sur leurs habitudes alimentaires et leur mode de vie.
Une possible augmentation du risque de plus de 50 %
L’analyse des données montre que les participants les plus exposés aux nitrites, par l’alimentation ou l’eau de boisson, ont un risque augmenté de 27 % de développer un diabète de type 2 (Hazard Ratio HR 1,27 : intervalle de confiance à 95 % IC 1,04 à 1,54). L’étude permet aussi, pour la première fois, de mettre en évidence une association entre les nitrites utilisés comme conservateurs dans les viandes transformées et notamment les charcuteries, et le risque de diabète de type 2. Il s’agit alors particulièrement du nitrite de sodium ou E250 qui augmente de 54 % le risque de diabète de type 2 (HR 1,54 ; IC 95 % 1,26 à 1,90). En revanche il n’apparaît pas de lien entre la consommation de nitrates et l’augmentation du risque de diabète de type 2.
Rappelons qu’il s’agit d’une étude observationnelle qui n’autorise pas à affirmer un lien de causalité. Ces résultats apportent toutefois de nouvelles pièces au dossier, alors que des discussions sont en cours avec les secteurs concernés pour une réduction de l’utilisation des nitrites comme conservateurs et une meilleure règlementation de la contamination des sols par les engrais azotés.
Dr Roseline Péluchon