Nouvelle victoire judiciaire pour le CBD

Paris, le mardi 25 janvier 2022 – Le Conseil d’Etat a suspendu un arrêté ministériel interdisant la vente de fleurs et de feuilles de cannabis contenant du CBD.

C’est une nouvelle victoire pour les partisans du cannabidiol (CBD) et un désaveu pour le gouvernement, partisan d’une politique répressive vis-à-vis du cannabis. Ce lundi, la formation des référés du Conseil d’Etat, la plus haute juridiction administrative française, a suspendu un arrêté ministériel en date du 30 décembre interdisant la vente de fleurs et de feuilles de cannabis, lesquels contiennent du CBD. Dans son ordonnance, les juges ont retenu qu’il n’était pas prouvé que « les fleurs et feuilles de chanvre revêtiraient un degré de nocivité pour la santé justifiant une mesure d’interdiction générale ». La suspension de l’arrêté n’est que provisoire, en attendant une décision sur le fond. Par ailleurs, l’Etat a été condamné à verser 13 000 euros aux 13 sociétés de vente de CBD requérantes.

Après la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), la Cour de Cassation et le Conseil Constitutionnel, c’est donc une autre juridiction suprême qui retient que le CBD n’est pas un stupéfiant et n’a donc pas à faire l’objet d’une mesure d’interdiction. Pour rappel, le CBD est un cannabinoïde présent dans la feuille de cannabis. Mais contrairement au tétrahydrocannabinol (THC), il n’a pas d’effet psychotrope avéré même sur certains lui prêtent des vertus anxiolytiques.  

La CJUE condamne la législation française

La législation française sur le CBD demeure assez floue, un manque de clarté qui alimente les débats juridiques depuis plusieurs années. En principe, le CBD n’est pas interdit en lui-même. Mais depuis un arrêté ministériel de 1990, seule la culture et la vente de fibres et de graines de cannabis est autorisé, à condition qu’elles contiennent moins de 0,2 % de THC. En revanche, la commercialisation des feuilles et fleurs de cannabis est totalement interdite, quel que soit leur teneur en THC. C’est pourtant justement dans ces feuilles et fleurs que se trouve le CBD. Ce flou juridique n’a pas dissuadé certains de se lancer dans le commerce de produits à base de CBD, notamment synthétique. Depuis 2018, les boutiques spécialisées dans la vente de ce produit pullulent en France, avec des fortunes judiciaires diverses, certains procureurs trainant les responsables de ces commerces devant les tribunaux, tandis que d’autres les tolèrent.

Le 19 novembre 2020, les partisans du CBD avaient remporté une première victoire judiciaire. Dans son arrêt Kanavape, la CJUE avait retenu que le CBD « ne pouvait être considéré comme un stupéfiant » car il n’a pas « d’après l’état actuel des connaissances scientifiques d’effet psychotrope ni d’effet nocif sur la santé humaine ». Le juge européen avait par conséquent retenu que l’Etat français ne pouvait pas interdire l’importation et la commercialisation en France de CBD produit dans un autre Etat membre, au nom du principe de libre circulation des marchandises. Une décision entérinée par la Cour de Cassation dans un arrêt du 23 juin 2021.

Le CBD, futur thème de débat de l’élection présidentielle ?

Le 7 janvier dernier, le Conseil Constitutionnel s’est rangé au même avis, considérant que le CBD n’est pas un stupéfiant au motif qu’il ne présente ni « risque de dépendance » ni « effets nocifs pour la santé ». Une suite de désaveu judiciaire qui n’a donc pas empêché le gouvernement de maintenir sa position et de prendre l’arrêté du 30 décembre.

La décision du juge administratif a été logiquement bien accueillie par les acteurs du secteur du CBD. La vente de fleurs et de feuilles de cannabis représente 50 % de leur chiffre d’affaires et le maintien de l’arrêté les aurait sans doute contraints de mettre la clé sous la porte. Ils demandent désormais un cadre législatif clair et la fin de l’incertitude juridique. La question de la règlementation sur le CBD et plus largement de la légalisation du cannabis pourrait s’inviter dans la prochaine élection présidentielle.

Yannick Jadot, candidat écologiste favorable à la légalisation, qui s’était rendu à l’audience devant le juge des référés, a qualifié cette décision de « victoire historique » sur Twitter.

Quentin Haroche

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