Où en est la protection 6 mois après la deuxième dose de vaccin Pfizer ?

Pour triompher de la pandémie de Covid-19, il faut surmonter deux écueils potentiels qui peuvent d’ailleurs se combiner : l’émergence de nouveaux variants qui peut mettre d’emblée en échec la vaccination et la disparition progressive de l’immunité post-vaccinale, tout aussi redoutable, qui compromet les effets de la vaccination de masse et interdit l’accès à l’immunité collective. Dans le cas du vaccin BNT162b2 (Pfizer-BioNTecH), le suivi à long terme des participants de l’essai randomisé de phase 2-3 princeps a montré que l’efficacité du vaccin passait de 96 % (entre le 7ème jour et le 2ème mois après la seconde dose) à 84 % (entre le 4ème et le 7ème mois après la seconde dose). Des études préliminaires réalisées aux Etats-Unis et en Israël ont par ailleurs souligné que les titres d’anticorps neutralisants diminuaient progressivement dans les six mois suivant l’administration de la seconde dose de ce même vaccin.

Décroissance de l’immunité observée en Israël

En décembre 2020, une campagne de vaccination de masse a été entreprise en Israël avec le vaccin Pfizer-BioNTecH. En un laps de temps record, plus de la moitié de la population a reçu les deux doses et, dans les mois qui ont suivi, le nombre de cas de la maladie a diminué de manière exponentielle. Les formes sévères de la Covid-19 ont quasiment disparu et la victoire semblait à portée de main. Mais vers la mi-juin 2021, le virus a fait bruyamment son retour avec une recrudescence des infections chez les vaccinés et les non vaccinés, et le cortège habituel de formes sévères et de décès. La baisse de l’immunité anti-Covid 19 au sein de la population du pays était l’explication la plus probable à cette évolution, puisque le variant delta, fin 2021, représentait 98 % des infections alors que le vaccin s’était avéré efficace contre ce dernier. Une étude rétrospective réalisée en Israël dans le monde réel, loin des études contrôlées, donne une idée quantitative des risques auxquels expose cet épuisement progressif de la réponse immunitaire.

Un modèle de Poisson par régression a été utilisé pour traiter les informations d’une base de données nationales, recueillies entre le 11 et le 31 juillet 2021, concernant tous les résidents israéliens complètement vaccinés depuis le début de la campagne en décembre 2020. Tous les cas de Covid-19 confirmés par PCR, quelle que soit la forme clinique, survenus au cours de la période précédente ont été pris en compte. Le traitement des données a également été fait en tenant compte de la tranche d’âge et en procédant à un ajustement selon les facteurs de confusion potentiels.

Le risque d’infection serait quasi doublé

Chez les sujets âgés de 60 ans ou plus, vaccinés en janvier 2021, le taux de réinfection dans la période du 11 au 31 juillet s’est avéré plus élevé que pour les vaccinés deux mois plus tard, soit en mars 2021, le RR (rate ratio) correspondant étant estimé à 1,6 (intervalle de confiance [IC] à 95 %, 1,3 à 2,0). Le même calcul effectué dans la tranche d’âge 40-59 ans, avec le même décalage de deux mois (février versus avril 2021) conduit à un RR voisin, soit 1,7 (IC 95 %, 1,4 à 2,1). Il a été de même pour les sujets devenus éligibles à la vaccination en mars 2021, âgés de 16 à 39 ans et comparés à ceux vaccinés en mai 2021, le RR étant de 1,6 (IC 95 %, 1,3 à 2,0).

Pour les formes sévères de la maladie, le calcul n’a pu être fait que chez sujets âgés de 60 ans ou plus et dans la tranche d’âge 50-59 ans, les nombres de cas étant trop faibles dans la tranche 16-39 ans. Dans ces conditions, les valeurs du RR ont été respectivement estimées à 1,8 (IC 95 %, 1,1 à 2,9) et 2,2 (IC 95 %, 0,6 à 7,7) et 2,2 (IC 95 %, 0,6 à 7,7).

Dans les mois qui suivent une vaccination complète anti-Covid-19 reposant sur le vaccin BNT162b2 efficace contre le variant delta, l’immunité dirigée vers ce dernier diminue plutôt rapidement dans toutes les tranches d’âge au point que le risque de développer une forme sévère vers le sixième mois serait multiplié par environ deux après 50 ans. L’utilité de la troisième dose ne prête guère à discussion, étant entendu que la vaccination à elle seule ne réglera pas le problème à court terme : parallèlement, à la veille d’une cinquième vague, les gestes barrières restent plus que jamais d’actualité et l’expérience des pays voisins peut être mise en exergue pour enfoncer ce clou.

La chance actuelle pour gagner du terrain sur le virus, c’est l’absence de nouveau variant problématique : pas de VOC (variant of concern) à l’horizon qui est l’autre grande cause d’échappement vaccinal : une raison de plus pour poursuivre la stratégie globale combinant vaccination et gestes barrières.

Dr Peter Stratford

Référence
Goldberg Y et coll. : Waning Immunity after the BNT162b2 Vaccine in Israel. N Engl J Med. 2021 (27 octobre) : publication avancée en ligne. doi: 10.1056/NEJMoa2114228.

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions (5)

  • Le masque

    Le 23 novembre 2021

    Il faut avoir l'honnêteté de dire que le seul geste barrière vraiment efficace, c'est le port correct d'un masque qui peut être régulièrement désinfecté, lavé, chauffé, séché 3 jours, sans qu'il soit nécessaire de le changer.
    La contamination sera peut être prévenue par la 3ème dose de vaccin mais, pour l'instant, le vaccin n'a pas d'effet suffisant.

    Dr Bernard Maroy

  • D'autres questions

    Le 23 novembre 2021

    Pourquoi ne parle-t-on jamais des sujets ayant eu une forme clinique de la maladie, versus ceux vaccinés pour apprécier le taux d'infestation, en regardant aussi l'écart en mois séparant la contamination primaire ou la vaccination et un nouvel épisode ?

    Dr Christian Trape

  • Voie unique

    Le 24 novembre 2021

    C'est ce qu'il me semble ressortir de toutes les études disponibles.
    La voie unique, le "politiquement correct".
    Le vaccin, les gestes barrières.
    Evident si on ne prend en compte que les études publiées dans ce sens.

    Pourtant il y en a une que je cherche et ne trouve pas !
    La même sur un panel de patients ayant été déclarés positifs, asymptomatiques ou avec de faibles symptômes. Soit, si je ne me trompe, selon les sources, de 70 à 85 % des dits "positifs".

    Ces cas, naturellement immunisés lors d'une première infection, ont-ils le même taux, le même risque de réinfection d'une forme sévère ?

    Oui ou non me semble stratégique, thérapeutiquement parlant.

    Dominique Barbelet

Voir toutes les réactions (5)

Réagir à cet article