
Malgré une sérieuse limitation liée au faible effectif de sujets concernés (n = 30), cette recherche permet de confirmer que les jeunes patients avec un degré plus élevé de handicap psychosocial ont souffert d’une façon effectivement « disproportionnée » pendant cette grave crise sanitaire, sans doute parce que le monde s’était en quelque sorte arrêté et que l’ambiance morbide et mortifère provoquait une aggravation des anciennes problématiques psychiatriques ou en suscitait de nouvelles.
Pas de miracle avec la « téléthérapie »
Évaluées en intégrant les appréciations des patients et celles
des psychiatres, les situations cliniques montrent que les sujets
présentant une aggravation de la symptomatologie sont surtout ceux
avec un degré de handicap psychosocial significativement plus élevé
avant le confinement et lors du premier entretien. Les auteurs
observent que la distinction entre les patients avec une
aggravation et ceux avec une amélioration (partielle) de la
symptomatologie semble associée à « des sentiments d’isolement
(spécifiques à la détérioration) et à une réduction perçue du
stress lié à la fréquentation scolaire.
Comme ailleurs dans le monde, les mesures de distanciation
sociale ont contraint les soignants à réduire la part des
consultations en cabinet pour les remplacer par des
téléconsultations (que les auteurs appellent « téléthérapie »),
alors que cette pratique d’une psychiatrie « virtuelle » demeurait
en général limitée avant le déferlement de la Covid-19.
Mais bien sûr, cette « téléthérapie » n’opère aucun miracle :
on constate que les sujets affectés d’un niveau de fonctionnement
psychosocial « détérioré » durant la pandémie sont aussi ceux avec
des résultats négatifs à la téléthérapie, notamment une
introspection, une rumination et un niveau perçu de soutien social
nettement inférieur. Les auteurs estiment qu’une évaluation
de ce « niveau perçu de soutien social » devrait être établie avant
de proposer une téléthérapie et que l’essor de stratégies pour
améliorer la verbalisation et la différenciation des émotions et
des affects serait bénéfique.
Dr Alain Cohen