Peut-être une alternative à l’EPO pour l’anémie de l’insuffisance rénale chronique

L’anémie inférieure à 10 g d’hémoglobine/dl est une complication de l’insuffisance rénale chronique (IRC), associée à un risque élevé d’insuffisance cardiaque et de mortalité. La recommandation est d’utiliser les agents stimulants de l’érythropoïèse lorsque l’hémoglobine est inférieure à 10g/dl.

Le roxadustat est un inhibiteur de la HIF (hypoxia inducible factor) prolyl hydroxylase qui stabilise les sous-unités HIF-alpha, entraînant une augmentation de l’activité transcriptionnelle de l’HIF. Celle-ci conduit à une activation de gènes cibles codant pour des protéines telles que l’érythropoïétine, le récepteur à l’érythropoïétine, les enzymes de la biosynthèse de l’hème, et de protéines qui favorisent l’absorption et le transport du fer. Une augmentation de l’activité HIF avec un inhibiteur de l’HIF prolyl hydroxylase peut constituer une approche innovante pour le traitement de l’anémie. Des études phase 2 ont montré que le roxadustat augmentait l’érythropoïétine endogène à des valeurs physiologiques, ainsi que le taux d’hémoglobine et améliorait le métabolisme du fer.

Roxadustat versus placebo puis en ouvert

Cet article rapporte les résultats d’un essai phase 3 réalisé en Chine, chez des patients de 18 à 75 ans, atteints d’IRC non-hémodialysés. L’essai comporte une phase initiale de 8 semaines, randomisée dans un rapport 2:1, en double aveugle, comparant roxadustat (n = 87) et placebo (n = 44). Après cette phase initiale, tous les patients ont reçu du roxadustat en ouvert pendant 18 semaines. Les patients n’avaient pas reçu d’agents stimulants de l’érythropoïèse depuis au moins 5 semaines avant randomisation. Le roxadustat était donné per os 3 fois par semaine et la dose était augmentée toutes les 4 semaines pour maintenir un taux d’hémoglobine entre 10 et 12 g/dl. Un traitement de sauvetage incluant transfusion, fer IV, agent stimulant de l’érythropoïèse, était possible pour les patients ayant moins de 8 g/dl d’hémoglobine.

Un gain de 1,9 g/dl d’hémoglobine en 8 semaines

Après la période initiale de 8 semaines, le taux d’hémoglobine a augmenté de 1,9 g/dl dans le groupe roxadustat et a baissé de 0,4 g/dl dans le groupe placebo. A la 9ème semaine, on a observé une augmentation de l’hémoglobine > 1g/dl chez 84 % des patients du groupe roxadustat et aucune augmentation dans le groupe placebo. Un traitement de sauvetage a dû être instauré chez 3 % des patients du groupe roxadustat et chez 12 % du groupe placebo. A la 9ème semaine, le taux moyen d’hepcidine était réduit de 56,14 ng/ml dans le groupe roxadustat, et de 15,1 ng/ml dans le groupe placebo. Le taux de fer sérique est resté stable dans le groupe roxadustat, sans différence avec le groupe placebo. Dans le groupe roxadustat le taux de transferrine et sa capacité totale de fixation du fer ont augmenté, avec un taux de saturation de la transferrine diminué temporairement de 20,6 % à 15,6 % à la 9ème semaine pendant la période d’augmentation de l’utilisation du fer au cours de laquelle l’hémoglobine a augmenté en moyenne de 1,9g/dl. Ce taux a augmenté ensuite au cours de la phase ouverte jusqu’à 22,1 % à la semaine 27. Aucune modification n’était observée dans le groupe placebo.

Une hyperkaliémie et une acidose métabolique ont été plus fréquemment rapportées dans le groupe roxadustat (16 % vs 8 %).

Après la face initiale de randomisation, les patients ont tous reçu du roxadustat au cours de la phase ouverte de 18 semaines. Chez les patients qui avaient initialement reçu le roxadustat, l’hémoglobine est restée stable avec une augmentation de 1,9 /dl par rapport à la valeur de base. Parmi eux, 84 % atteignaient au moins 11 g/dl d’hémoglobine au cours de la période de 26 semaines de traitement. Chez les patients du groupe placebo initial, le traitement par roxadustat a entraîné un gain de 2g/dl d’hémoglobine par rapport à la valeur de base et 72 % ont atteint au moins 11 g/dl.

Au total, cet essai phase 3 du roxadustat chez des patients non dialysés ayant une anémie par IRC a montré une efficacité avec un gain de 1,9 g/dl d’hémoglobine par rapport à la valeur de base après 8 semaines de traitement. En sus de l’effet érythropoïétique, le roxadustat a entraîné une réduction du taux d’hepcidine. La stabilité du taux de fer, en l’absence d’apport intraveineux, est probablement la conséquence de la réduction du taux d’hepcidine, permettant une amélioration de l’absorption intestinale du fer et de son relargage par les macrophages. L’augmentation de la transferrine dans le groupe roxadustat seul est probablement un effet direct de la stabilisation du taux de HIF, le gène codant pour la transferrine étant une cible de HIF. Le maintien du taux de fer sérique permet de délivrer ce fer de façon adéquate et d’éviter un déficit martial fonctionnel.

Pr Gérard Sébahoun

Référence
Chen N et coll. : Roxadustat for Anemia in Patients with Kidney Disease Not Receiving Dialysis. N Engl J Med 2019, publication avancée en ligne le 24 juillet 2019.

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