Le rendez-vous de la dernière chance a échoué. Ce lundi, les
quatre principaux syndicats de la biologie libérale étaient reçus à
l’Assurance maladie pour tenter d’apaiser leur colère face aux
baisses de tarifs inscrites dans le projet de loi de financement de
la sécurité sociale (PLFSS) actuellement en débat au Parlement.
Mais à la sortie de la réunion, les biologistes ont annoncé s’être
« heurtés à un mur » et ont appelé à une « grève reconductible de
tous les laboratoires de biologie médicale » à compter du 14
novembre.
250 millions d’euros d’économie dès 2023
Pour rappel, l’article 27 du PLFSS, adopté en première lecture
par l’Assemblée Nationale via la procédure de l’article 49.3 de la
Constitution le 31 octobre, demande aux laboratoires de biologie de
parvenir à un accord prévoyant 250 millions d’euros de baisse de
tarifs en 2023 (hors tests Covid-19) d’ici le 1er février. Dans le
cas contraire, ces baisses de tarifs seront décidées
unilatéralement par décret. Selon les syndicats ayant participé à
la réunion de ce lundi, le gouvernement souhaite désormais imposer
aux biologistes un coup de rabot encore plus important : 280
millions d’euros en 2023 puis 322 millions d’euros par an jusqu’en
2026.
Pour mettre la pression sur le gouvernement et l’inciter à
mettre fin à cette « folie austéritaire », les principaux groupes
de laboratoires d’analyse, membres de l’Alliance de la biologie
médicale, ont cessé depuis le 28 octobre dernier de transmettre les
résultats des tests Covid-19 au fichier national Si-Dep. Si les
patients reçoivent toujours le résultat de leurs tests, le suivi de
l’épidémie est désormais grandement perturbé. Une action qualifiée
d’« inconséquente, inconsciente, inadmissible » par le
ministre de la Santé François Braun le 28 octobre dernier.
« Ils nous rendent aveugles face à la gestion d’une
épidémie qui tue encore et prennent en otage l’ensemble de la
population » a fustigé le ministre.
Les biologistes sont-ils des profiteurs de crise ?
Malgré les difficultés posées par l’arrêt de la remontée des
tests et la menace de grève, le gouvernement n’entend pas reculer
sur son projet budgétaire. Pour l’exécutif, ce coup de rabot est
justifié par les très importants bénéfices réalisés par le secteur
durant la crise sanitaire, qui a conduit à une augmentation massive
des tests.
« C’est un secteur qui a largement profité de la crise
Covid », passant de « 900 millions d’euros de bénéfices en
2019 à 1,6 milliard en 2020 et 3 milliards en 2021 » a expliqué
François Braun. « Nous assumons de demander des efforts aux
laboratoires de biologie » en raison d’une « rentabilité
déjà élevée avant la crise ».
Les biologistes libéraux n’entendent pas se laisser pointer du
doigt comme « profiteurs de crise » sans réagir. En signe de
bonne volonté, les syndicats se sont dit favorables à la création
d’une « contribution exceptionnelle fléchée sur l’activité liée
au Covid-19 » d’un montant proche de celui prévu par le
gouvernement mais limité à la seule année 2023. Une proposition
rejetée par le gouvernement, son porte-parole Olivier Véran ayant
annoncé qu’il n’y aurait « pas de retour en arrière »
concernant le budget de la Sécurité Sociale et qu’il n’y avait «
pas lieu de réviser cette position ».
Après les internes, c’est donc au tour des biologistes de se
mettre en grève contre le PLFSS. Et le gouvernement semble préférer
l’épreuve de force aux négociations.
Quentin Haroche
