
Pour réduire ce double gâchis humain et financier, l’identification de facteurs protecteurs contre le risque de suicide représente donc « une priorité de santé publique. » Comme des travaux antérieurs suggèrent que des croyances religieuses peuvent constituer un tel contexte protecteur, une nouvelle étude a été consacrée à l’association entre convictions religieuses et tendances suicidaires.
Portant sur 7 403 sujets, cette enquête confirme l’existence d’une association négative entre ces phénomènes, c’est-à-dire que des croyances ou des pratiques religieuses ont bien un rôle protecteur, à la fois contre « les idées suicidaires dans l’année écoulée (Odds ratio ; OR = 0,71 intervalle de confiance à 95 % IC [0,51–0,99]), contre leur prévalence dans toute l’existence (OR = 0,83 ; IC [0,69–0,99]), et contre les tentatives de suicide dans toute l’existence (OR = 0,69 ; IC [0,53–0,90]). »
Moindre perception d’un vide existentiel
Plusieurs hypothèses pourraient expliquer ce rôle protecteur de la religion en matière de comportements ou d’idées suicidaires : l’interdiction du suicide dans les grandes religions monothéistes (judaïsme, christianisme et islam), l’usage généralement plus modéré de substances toxiques (alcool ou drogues) chez les adeptes d’une religion que chez les sujets sans conviction religieuse, le fait que la pratique d’une religion implique souvent une meilleure socialisation (participation à des fêtes, fréquentation d’une communauté) et une certaine ritualisation des comportements pouvant contribuer à diminuer la perception insidieuse d’un vide existentiel.Le sentiment d’appartenance communautaire permettrait ainsi de contrecarrer un ressenti de solitude et d’isolement social, lui-même porteur de risque de suicide. Mais des études plus poussées sont nécessaires pour mieux comprendre « les mécanismes sous-jacents » de cette association négative entre suicide et religion.
Dr Alain Cohen