Quand l’épidémie repart malgré la vaccination

Désillusion aux Seychelles malgré une campagne de vaccination exemplaire
Victoria, le vendredi 7 mai 2021 – Plusieurs pays, dont notamment les Seychelles, ont observé une reprise de l’épidémie malgré un taux de vaccination important. Les vaccins chinois pourraient en être « responsables ».

Quel est le pays du monde à avoir le plus vacciné sa population contre la Covid-19 ? A cette question, beaucoup serait tenté de répondre Israël, tant l’efficacité de la campagne de vaccination israélienne a été mise en avant. Mais en réalité, ce sont les Seychelles qui occupent la première place du classement. Dans ce petit archipel de l’Océan Indien surtout connu pour ses plages paradisiaques, 69,2 % des 98 000 habitants ont reçu au moins une dose d’un vaccin et 60,7 % les deux doses. De très bons résultats qui ont permis au pays de rouvrir ses frontières, afin de sauver le secteur du tourisme, vital pour son économie.

Mais les Seychellois ont vite déchanté, car malgré cette vaccination massive, l’épidémie est repartie à la hausse. D’environ 40 nouvelles contaminations par jour début avril, l’archipel est passé à 120 nouveaux cas quotidiens cette semaine. Ce lundi, le ministre de la Santé a parlé d’une « situation critique » qui a obligé les autorités à prononcer de nouvelles restrictions sanitaires. Les écoles ont ainsi été fermées pour trois semaines, les horaires d’ouvertures des commerces réduits et les habitants invités à rester chez eux le plus possible.

Les vaccins chinois pas assez efficaces ?

Selon les autorités, 35 % des nouveaux contaminés ont reçu les deux doses du vaccin. Pour comprendre comment ce rebond épidémique a pu avoir lieu, il faut rappeler que les Seychelles utilisent deux vaccins : le vaccin Covishield, dérivé du vaccin AstraZeneca produit en Inde et le vaccin de la firme chinoise Sinopharm, offert gracieusement par les Emirats Arabes Unis. L’une des premières explications à cette reprise de l’épidémie serait la moindre efficacité du vaccin AstraZeneca contre le variant sud-africain, qui serait majoritaire aux Seychelles. L’Afrique du Sud a d’ailleurs renoncé à utiliser ce vaccin.

Mais le vaccin chinois pourrait bien être le principal responsable de cet échec relatif de la vaccination aux Seychelles. Si les autorités chinoises affirment que les vaccins à virus inactivé des firmes Sinopharm et Sinovac sont efficaces à plus de 80 % contre la souche originelle du SARS-Cov-2, les résultats des études scientifiques sont très variables selon les pays. La Turquie estime ainsi que le vaccin Sinovac est efficace à 91 % contre 50 % seulement pour les spécialistes brésiliens. Dans une étude publiée le 7 avril dernier, des universitaires chiliens affirmaient même que ce vaccin n’était efficace qu’à 3 % après la première dose et à 56,5 % après la seconde. Le 10 avril dernier, le professeur Gao Fu, directeur du CDC chinois, avait lui-même reconnu, avant de se raviser (probablement à la demande des autorités), que les vaccins chinois « n’ont pas un taux de protection très élevée ».

Vers une troisième dose de vaccin ?

Cette faible efficacité des vaccins chinois (notamment sur certains variants) pourrait expliquer pourquoi plusieurs pays qui les utilisent ne connaissent pas de ralentissement de l’épidémie malgré une couverture vaccinale satisfaisante en apparence. Au Chili, où 43,4 % des habitants ont reçu une dose et 36,6 % des habitants deux doses, essentiellement du vaccin Sinovac, l’épidémie a connu une forte recrudescence au début du mois d’avril, obligeant le pays à reconfiner la population. Situation similaire en Hongrie, seul pays de l’Union Européenne à utiliser le vaccin de Sinopharm et qui présente le taux de mortalité au Covid-19 le plus élevé du monde (28 400 morts pour 10 millions d’habitants).

Les Emirats Arabes Unis, qui ont également fortement utilisé le vaccin de Sinopharm (51,4 % de première dose et 38,8 %), ont peut-être trouvé une solution. Depuis la fin mars, les personnes deux fois vaccinés qui présentent un taux d’anticorps trop faible sont invités à recevoir une troisième injection de vaccin.

Quentin Haroche

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Vos réactions (5)

  • 2 pater et un ave

    Le 10 mai 2021

    Deux doses ça marche pas alors une troisième ?
    A part selon le principe de 2 pater et un ave on ne voit pas bien la logique...

    Dr JR Werther

  • Vaccination à virus inactivé et variant sud-africain

    Le 15 mai 2021

    Cet article est à rapprocher de celui publié par Quentin Haroche dans JIM.FR le 7 mai 2021.

    Les Seychelles ont un taux de vaccination (avec les deux doses) de 60,7 % dépassant même Israël qui en est à environ 50 % (avec les deux doses) mais avec le vaccin Pfizer-BioNtech.

    La vaccination aux Seychelles a été pratiquée avec le vaccin Civishield (un dérivé du vaccin AstraZeneca) et le vaccin chinois à virus atténué Sinopharm.

    Le 10 mai 2021, par exemple le nombre de nouveaux cas était de 1361 alors qu'en moyenne il s'agissait de quelques dizaines de cas par jour. Le ministre de la Santé a donc pris à nouveau des mesures de restrictions sanitaires.

    Ce qui pose question c'est que 35 % des nouveaux contaminés avaient reçu les deux doses de vaccin. La protection ainsi apportée contre une infection semble donc peu fiable, cependant le nombre de morts de la Covid-19 reste faible et n'évolue pas à la hausse comme les contaminations.

    Pour mémoire au 14/05/21 Les Seychelles dont la population est de 98875 habitants ont eu 9184 cas et 32 décès, avec un taux de 324 morts / million d'habitants.

    On peut utilement faire une comparaison de ce taux avec celui de la France : 1643 morts / million d'habitants, de la Belgique : 2118 morts / million d'habitants, Espagne : 1696 morts / million d'habitants (pays ayant interdit HCQ+AZI) ou de pays d'Asie : Malaisie : 56 morts / million d'habitants, le Sri Lanka : 43 morts / million d'habitants ou de pays d'Afrique : Sénégal : 66 morts / million d'habitants, Mali : 25 morts / million d'habitants (pays ayant utilisé HCQ + AZI).

    La mortalité aux Seychelles reste donc bien inférieure à celle trouvée en Europe, mais la vaccination proposée semble être en difficulté par rapport au variant sud-africain (20H/501Y.V2) qui est majoritaire dans ce pays et dont les modifications les plus importantes sont sur la protéine S (ou Spike). La protection par ces vaccins contre une infection ne semble pas très efficace mais le reste cependant contre la mortalité par la Covid-19, le nombre de morts restant limité à quelques unités.

    Il semble nécessaire à réfléchir sur les causes des différences très significatives de mortalité entre nos pays utilisant la vaccination et les correctifs à apporter au fur et à mesure de l'apparition de nouveaux variants (nécessaire adaptation des vaccins à des variants très modifiés et renouvellement des vaccinations) et ceux ayant des taux de mortalité bien plus faibles d'Asie ou d'Afrique.

    Christian Grande (Mathématicien)

  • La Chine n'a peut etre pas dit son dernier mot

    Le 15 mai 2021

    Il me semble avoir lu que le vaccin chinois avait eu des résultats plus bas car "sous dosés" ce qui avait permis d'en vendre plus, plus de doses mais que devant le résultat décevant, pas bon pour le commerce, la Chine aurait corrigé le tir , au moins pour mieux vendre le vaccin. Ce vaccin a un intérêt majeur que n'ont pas nos vaccins : une immunogénicité plus large et non limitée à la protéine spike, laquelle subit de nombreuses mutations à l'origine des variants, rendant, par exemple l'AstraZeneca inefficace sur les variants d'Afrique du Sud ou du Bresil.
    Le grand intérêt du vaccin chinois, est l'utilisation d'une technique ancienne, sûre, maitrisée, connue y compris à moyen et long terme, ce qui n'est pas le cas du Pfizer. Quand on songe à vacciner des gamins...

    Dr Christian Trape

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