
Pas d’avenir pour l’hôpital public
L’exemple de Montauban signale combien les suspensions liées au refus de respecter l’obligation vaccinale ne constituent qu’un épiphénomène (mais parfois problématique) dans un contexte chronique de sous-effectif et de conditions de travail dégradées. En toile de fond de ce tableau clinique inquiétant, une désaffection profonde pour l’hôpital. « On ne voit absolument pas d’avenir pour l’hôpital public. Beaucoup sont sur le départ, et pas seulement les paramédicaux. Il y a aussi énormément de médecins et toutes les professions de l'hôpital qui sont en train de partir » analysait ainsi Pierre Schwob, infirmier, membre du collectif Inter-Urgences dans les colonnes du Quotidien du médecin la semaine dernière. Dans un tel marasme, chaque départ est potentiellement perçu par ceux qui restent comme un signal de l’existence d’échappatoire, alors que l’absence de remplacement systématique contribue souvent à accroître encore la charge de travail de ceux qui restent. C’est ce qu’a résumé Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat national des professionnels infirmiers SNPI CFE-CGC lors d’une conférence de presse intersyndicale la semaine dernière en parlant de la « spirale des départs ». Face à cette situation, les pansements du gouvernement avec les revalorisations du Ségur de la santé l’année dernière sont jugés notoirement insuffisants.Encore moins envie de rester qu’ailleurs
Le cœur du problème ne semble en effet pas d’abord la question de la rémunération. C’est ce qui ressort d’une enquête réalisée par le collectif Nos services publics, à laquelle 4 555 personnes ont participé sur internet (ce qui suppose un biais de sélection). Il apparaît notamment dans le secteur de la santé une perte de sens profonde vis-à-vis de ce qui fonde le service public. L’organisation signale : « Les raisons pour rester au sein du service public sont systématiquement moins choisies au sein du secteur de la santé que dans les autres secteurs. La seule exception à cette moindre occurrence de raisons de rester est « les collègues » (31 % versus 22 % pour les répondants hors secteur de la santé). Le manque de moyens et les mauvaises conditions de travail sont des problèmes cités nettement plus fréquemment que dans les autres secteurs, avec respectivement 74 % et 52 % de répondants qui déplorent ces problèmes dans le secteur de la santé contre 62 % et 40 % hors santé ». Ces conclusions font encore une fois écho à de nombreuses observations du terrain : le Dr Marc Durand-Reville, responsable de l’association toulousaine MOTS dédiée à la souffrance des patients confiait récemment dans le Quotidien du médecin. « Je suis inquiet de voir des difficultés de recrutement, des départs, des démissions dans les hôpitaux publics (…) qui passent inaperçus ».Aurélie Haroche