Quel pays veut revenir sur la PMA pour toutes ?

Tokyo, le vendredi 11 novembre 2022 – La plupart des pays occidentaux ont d’abord réservé la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples hétérosexuels mariés, avant de l’ouvrir progressivement aux couples de lesbiennes et aux femmes seules, suivant ainsi le cours de l’évolution des mentalités sur l’homosexualité.

C’est le cas bien sûr en France, qui a adopté la « PMA pour toutes » en 2021. Mais à l’autre bout du monde, le Japon s’apprête à prendre le chemin inverse, puisque le Parlement va prochainement discuter d’une loi limitant l’accès à la PMA aux couples mariés et donc aux couples hétérosexuels, le mariage homosexuel n’étant pas légal au pays du Soleil Levant.

Dons de sperme sauvages


La future loi japonaise ne vise pas réellement à modifier la législation en vigueur, tout simplement parce que le don de sperme n’est encadré par aucune loi au Japon. Certes, la société japonaise d’obstétrique et de gynécologie recommande aux cliniques reproductives de réserver la PMA aux couples mariés, mais ces recommandations ne sont pas contraignantes. Dans les villes les plus progressistes du pays comme Tokyo ou Osaka, il est donc possible de trouver des cliniques acceptant les couples de femmes ou les célibataires.

Les cliniques privés offrants des services d’insémination artificielle sont peu nombreuses dans l’archipel. Les dons sont également rares, puisqu’aucune loi ne protège l’anonymat des donneurs. Le pays ne connait donc officiellement qu’une centaine de naissances par PMA chaque année. C’est pourquoi la plupart des femmes nippones en manque d’enfants préfèrent se tourner vers les dons sauvages. Sur Twitter, de nombreux hommes japonais proposent de vendre ou même d’offrir leur sperme, via un échantillon ou tout simplement un rapport sexuel. Chaque « profil » détail l’apparence, l’état de santé et les diplômes du donneur.

C’est pour mettre fin à ces dons sauvages, qui comportent une grande part d’insécurité juridique et empêchent tout dépistage des maladies sexuellement transmissibles ou héréditaires chez le donneur, que le gouvernement japonais entend légiférer.

Le célibataire lettré n’était qu’un Chinois inculte


C’est une histoire particulièrement rocambolesque ayant eu lieu en début d’année qui a poussé les autorités à agir. Une femme avait accepté d’avoir des relations sexuelles avec un « donneur » de sperme qui s’était présenté comme un homme célibataire ayant fait ses études dans une université prestigieuse du pays. Mais peu de temps avant le terme de sa grossesse, la femme a finalement découvert que son donneur était un homme chinois marié et sans diplôme. Elle a alors abandonné son enfant à la naissance aux services d’adoption et demande désormais 330 millions de yens (plus de 2,2 millions d’euros) de dédommagement à l’imposteur.

Le gouvernement souhaite donc mieux encadrer le don de sperme pour éviter les dérives et espère qu’une fois légale, cette pratique sera mieux acceptée par la société japonaise. Mais le parti conservateur au pouvoir estime également que la parentalité doit être réservée aux couples hétérosexuels et que « les technologies de la reproduction assistée ne doivent pas être utilisées au détriment du bien-être de l’enfant ».

A l’inverse, les associations LGBT nippones entendent se battre pour empêcher que soit « voler aux femmes leurs droits reproductifs et leur désir d’enfanter et d’élever des enfants ». Le Japon s’apprête donc à vivre le même débat que la France…mais en partant d’un point de départ opposé.

Nicolas Barbet

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