
Le 20 septembre dernier, Santé Publique France (SPF) publiait
un rapport alarmant sur la santé périnatale en France, relevant
notamment une hausse inquiétante du nombre de mères en situation de
forte précarité, du taux de diabète gestationnel ou de la mortalité
néonatale. Deux semaines plus tard, SPF publie ce jeudi l’enquête
nationale périnatale (ENP) de l’Inserm pour l’année 2021 qui
contredit en partie ce sombre tableau, puisque nombre d’indicateurs
de la santé maternelle se sont améliorés depuis la dernière enquête
de 2016.
Ces différences dans les conclusions peuvent s’expliquer
notamment par des méthodologies bien distinctes. Alors que le
rapport de SPF de septembre reposait sur une analyse objective de
divers registres sanitaires, l’ENP, menée par l’Inserm, repose sur
une enquête de terrain, basée en partie sur des items subjectifs,
réalisée en mars 2021 auprès de 12 723 femmes enceintes ou venant
d’accoucher, toutes en métropole (une étude a également été mené en
outre-mer mais ses résultats n’ont pas encore été publiés).
L’enquête menée par l’Inserm confirme la tendance observée
depuis plusieurs décennies d’une augmentation de l’âge des femmes
au moment de l’accouchement : 19,2 % des mères ont entre 35 et 39
ans (17,2 % en 2016) et 5,4 % ont plus de 40 ans (3,9 % en 2016). A
rebours du rapport de SPF qui s’inquiétait de la paupérisation
d’une partie des jeunes mères, l’ENP indique que le taux de femmes
sans couverture sociale a diminué et que la part des mères
diplômées est en augmentation (59,4 % des femmes enceintes ont fait
des études supérieures, 22,3 % ont un bac+5).
Les femmes enceintes fument moins et se vaccinent plus
Par ailleurs, plusieurs indicateurs relatifs à la prévention
sont en nette amélioration : seulement 12,2 % des femmes enceintes
continuent de fumer durant le 3ème trimestre de grossesse (16,3 %
en 2016) et 1,1 % consomment du cannabis (2,1 % en 2016). Plus
impressionnant encore, 30,4 % des femmes enceintes ont été
vaccinées contre la grippe, alors qu’elles n’étaient que 7,4 % en
2016 : les auteurs de l’enquête y voient la conséquence de la
crainte suscitée par l’épidémie de Covid-19.
Les signataires de l’ENP estiment en revanche que des efforts
doivent être faits concernant la prévention des anomalies de
fermeture du tube neural : seulement 28,3 % des femmes commencent
comme recommandé, à prendre de l’acide folique en supplément avant
leur grossesse.
S’agissant de l’accouchement et de la prise en charge des
mères, les tendances seraient également plutôt bonnes. « A
l’exception du déclenchement du travail, dont la fréquence est en
augmentation, la tendance est à une diminution du recours aux
interventions visant à accélérer le travail et à une moindre
médicalisation de l’accouchement » notent les auteurs de
l’Inserm. Le nombre d’épisiotomies notamment est en forte baisse :
20,1 % des accouchements en 2016 contre seulement 8,3 % en
2021.
16,7 % des jeunes mères souffrent de dépression du post-partum
Les jeunes mères sont globalement satisfaites de
l’accompagnement médical dont elles bénéficient : 90 % le disent
des méthodes utilisées pour diminuer la douleur lors de
l’accouchement et 90 % de leur prise en charge médicale en suivi de
grossesse. Les femmes ont également été interrogés sur un sujet mis
en lumière ces dernières années, celui des violences gynécologiques
: 10 % d’entre elles rapportent avoir été confrontés à des propos
déplacés, 6,7 % avoir subi des gestes inappropriés et 4,2 %
déclarent que leur accord n’a pas été demandé avant un toucher
vaginal.
Enfin, l’ENP s’est intéressée à la santé mentale des femmes
enceintes. Si la tendance des indicateurs est plutôt négative (63,2
% des femmes se sont sentis « bien » durant leur grossesse contre
67,7 % en 2016), l’Inserm impute cela au contexte, l’enquête ayant
été mené durant la crise sanitaire. Pour la première fois, les
représentants de l’Inserm ont interrogé les femmes sur leur état
mental deux mois après l’accouchement : 16,7 % des jeunes mères
souffraient d’une dépression post-partum, même si là encore, la
situation épidémique a pu jouer un rôle.
Quentin Haroche