SARS-CoV-2, un virus qui « dure » en cas d’immunodépression profonde
Au cours de la Covid-19, il est un indicateur particulièrement
révélateur de la contagiosité d’un patient : il s’agit de la
détection du SARS-CoV-2 dans un état qui lui permet de se
répliquer, autrement dit de se reproduire au sein des cultures
cellulaires appropriées. La durée de la phase contagieuse est bien
déterminée en l’absence de défaillance innée ou acquise de
l’immunité. En revanche, les informations sont plus incertaines et
les données beaucoup plus parcellaires quand il existe une
immunodépression. Une petite étude transversale publiée sous la
forme d’une lettre à l’éditeur dans le New England Journal of
Medicine du 1er décembre 2020 s’inscrit
dans ce contexte.
Elle a inclus 20 patients en situation de déficit immunitaire
induit par des traitements immunosuppresseurs, tous atteints d’une
forme plus ou moins sévère de Covid-19. Dans la majorité des cas (n
= 18), il s’agissait de patients qui avaient bénéficié d’une
transplantation de cellules souches hématopoïétiques ou d’une
immunothérapie basée sur les cellules T porteuses de récepteurs
d’antigènes chimériques (CAR-T cells). Les deux autres patients
étaient atteints d’un lymphome traité par
chimiothérapie.
Le diagnostic de Covid-19 qui revêtait une forme sévère plus
d’une fois sur deux (11/20) a été posé par RT-PCR entre le 10 mars
et le 20 avril 2020, alors qu’un traitement immunodépresseur était
en cours dans la majorité des cas (15/20). Les virus vivants ont
été isolés dans des cultures composées de la lignée cellulaire Vero
à partir de prélèvements nasopharyngés. Le séquençage complet du
génome a été effectué sur les virus provenant de ces derniers
et ceux obtenus après culture. Les variants génétiques ont été
déterminés au sein de 78 prélèvements, dont 57 au cours de la
période d’observation.
Viabilité virale plus de 2 mois après l’infection… dans trois
cas
L’ARN viral a été détecté jusqu’à 78 jours après le début des
symptômes (écart interquartile, 24 à 64 jours). Le virus a été jugé
viable au sein de 10 des 14 prélèvements nasopharyngés (71 %)
testés dès le début de la période précédente. Des échantillons
obtenus chez 5 patients ont révélé que les cultures restaient
positives respectivement 8, 17, 25, 26 et 61 jours après le début
des symptômes. Le virus a donc « survécu » plus de vingt
jours chez trois patients qui avaient bénéficié d’une
transplantation de cellules souches hématopoïétiques (n = 2) ou
d’un traitement par CAR T-cells au cours des six mois
précédents.
Le séquençage du génome viral a révélé que chaque patient
avait été infecté par un virus différent, mais entre les analyses
du prélèvement initial et des cultures cellulaires, le génome est
resté stable ce qui témoigne d’une infection
persistante.
Cette petite étude suggère qu’en cas d’immunodépression
profonde, la contagiosité du patient atteint de la Covid-19 peut
être prolongée.
C’est ainsi qu’en cas de transplantation de cellules souches
hématopoïétiques ou de traitement par CAR-T cells, le virus peut
être retrouvé sous une forme viable plus de 2 mois après le début
des symptômes révélant la maladie. Faut-il en tenir compte pour
allonger la quarantaine chez ces patients en cas de Covid-19 ? La
question se pose mais d’autres études semblent nécessaires pour
prendre position, compte tenu de la rareté apparente du
phénomène.
Pour les personnes immunodéprimées en général, il serait cohérent d'appliquer le protocole établi en Corée du Sud : "...Les patients confirmés qui ne présentent pas de symptômes sont libérés de la quarantaine si deux tests effectués le septième jour après confirmation avec un intervalle de 24 heures montrent des résultats négatifs. Si le résultat du test PCR est positif effectué le septième jour après confirmation, le test suivant doit être effectué sept jours après (14e jour après confirmation). Si ce résultat est également positif, une autre série de deux tests avec un intervalle de 24 heures sera effectuée à la discrétion des professionnels de la santé. Si les résultats des deux tests sont négatifs à effectuer avec un intervalle de 24 heures, le patient sera libéré de la quarantaine..."