Sophie Cluzel relance le débat sur l’assistance sexuelle aux handicapés

Paris, le lundi 10 février 2020 – Le secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, Sophie Cluzel, s’est dit favorable à la création d’assistants sexuels aux personnes handicapés.

A notre époque où se multiplie les « droit à » (droit à l’enfant, droit au travail, droit au logement…), la question du droit à une sexualité épanouie, notamment pour les personnes handicapées, reste un tabou. Depuis qu’en 2013, le comité consultatif national d’éthique (CCNE) s’était dit défavorable à la création du métier d’assistant sexuel pour les personnes handicapés, le sujet semblait clos. Mais ce dimanche, le secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, Sophie Cluzel, a rouvert le débat en se disant favorable à « l’accompagnement de la vie sexuelle des personnes handicapées » par des « assistants ».

Le ministre a donc adressé un courrier à Jean-François Delfraissy, président du CCNE, afin que le comité se penche à nouveau sur la question des droits sexuels des handicapés. Le comité devrait prendre plusieurs mois avant de rendre ses conclusions et devra réfléchir à la manière de concilier le principe du droit à la sexualité avec celui de la non-marchandisation du corps, alors que le recours à la prostitution est interdit en France depuis 2016. Pour l’instant, toute assistance sexuelle aux handicapés est assimilée à de la prostitution.

L’assistance sexuelle autorisé dans plusieurs pays européens

Le métier d’assistant sexuel existe dans de nombreux pays, notamment aux Pays-Bas, en Suisse, en Allemagne et en Belgique. L’accompagnement sexuel y est considéré comme faisant partie intégrante de la prise en charge "médicale" de la personne handicapé. L’aide peut aller de la simple caresse à la relation sexuelle. Au micro d’Europe 1, Sophie Cluzel a appelé à s’inspirer de ces exemples étrangers.

En 2013, pour s’opposer à la mise en place de l’assistance sexuelle, le CCNE avait pointé du doigt le risque de dérives inhérentes à cette activité et notamment à ce que la relation entre l’assistant et le patient ne deviennent psychologiquement néfastes pour chacun d’eux. Le comité avait ainsi dénoncé le risque d’un « transfert affectif » du patient vers son assistant sexuel. Pour remédier à l’indéniable solitude sexuelle des handicapés, les sages préconisaient à la place un changement de mentalité dans la société, afin de mieux intégrer les handicapés dans la vie sociale.

L’idéologie contre le plaisir sexuel

Un véritable vœu pieux malheureusement. Aujourd’hui, les associations de défense des droits des handicapés constatent que ceux qui veulent avoir une vie sexuelle normale sont obligés de se tourner vers des réseaux parallèles et clandestins. « Il y a des prostituées spécialisées dans le champ du handicap, mieux vaudrait en faire un métier dans le champ des professionnels de santé » s’indigne Jérôme Guedj. En 2013, l’ancien député PS avait soutenu la création des assistants sexuels mais s’était vu opposer, selon ses termes, « une fin de non-recevoir de la gauche et des féministes ».

On retrouve ici le constat fait par nombreux militants de la cause des handicapés : au nom d’une certaine idéologie, d’une certaine pudeur et de grands principes (féminisme, refus de la prostitution…), certains refusent de voir la détresse sexuelle dans laquelle vivent de nombreuses personnes handicapées. Mais pour Sophie Cluzel, permettre aux handicapés d’avoir une « vie intime, affective et sexuelle » fait partie de l’objectif plus vaste de « remettre les personnes handicapées en pleine citoyenneté, dans le respect et la dignité ».

QH

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Vos réactions (1)

  • Droit de plutôt que "droit à"

    Le 10 février 2020

    Nonobstant le fond de cet article, je souhaite intervenir dans l'utilisation inappropriée de nos Politiques (et de cet article) depuis plusieurs années. En effet l'utilisation de "droit à" renvoie à une totale passivité du bénéficiaire. Il me paraît plus juste de se cantonner au "droit DE" qui laisse le bénéficiaire libre d'engager une démarche. La différence est importante.

    Dr Lucien Duclaud

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