
Les températures extrêmes, qu’elles se situent du côté du chaud ou du froid, mettent à rude épreuve le système cardiovasculaire et l’étude GBDS (Global Burden of Disease Study) a récemment ajouté les températures non optimales aux principaux facteurs de mortalité. Selon certaines études récentes, près de 10 % des décès seraient en rapport directement ou indirectement avec des débordements thermométriques. Cependant, il s’agit le plus souvent de la mortalité globale déterminée selon des méthodes et des protocoles variés et appliqués à des zones géographiques ou climatiques limitées, sans qu’il soit tenu compte d’une multitude de facteurs de confusion environnementaux potentiels.
Une vaste étude publiée dans Circulation échappe à ces critiques, dans la mesure où elle s’est attachée à estimer la mortalité spécifiquement cardiovasculaire à partir d’une base de données gigantesque constituée à l’échelon mondial dans le cadre du réseau Multi-Country Multi-City Collaborative Network. Un protocole standardisé a recherché des associations entre les températures extrêmes et les grandes causes de décès d’origine cardiovasculaire : cardiopathie ischémique, AVC, insuffisance cardiaque et arythmies. Le nombre quotidien de ces décès a été évalué dans 567 cités réparties dans 27 pays et 5 continents, au cours de la période 1979-2019, en tenant compte des températures ambiantes fournies par les stations météorologiques locales. La modélisation sophistiquée a reposé sur des ajustements croisés et une approche méta-analytique à effets mixtes. Les températures extrêmes ont été exprimées en percentiles, respectivement et en premier lieu le 1er percentile et le 99ème percentile définis à partir des distributions observées au cours de la période retenue.
Plus le froid que le chaud
L'analyse des données a finalement porté sur 32 154 935 décès d’origine cardiovasculaire, dont un tiers lié aux cardiopathies ischémiques (n=11 745 880), devant les AVC (n = 9 351 312), l’insuffisance cardiaque (n = 3 673 723) et les arythmies (n = 670 589). Les températures extrêmes ont été associées à une surmortalité cardiovasculaire significative, quelles que soient ces étiologies.
Par rapport aux journées où la mortalité était la plus faible, les jours d’extrême chaleur (> 97,5epercentile) et ceux de froid extrême (< 2,5e percentile) ont été à l’origine, respectivement de 2,2 (intervalle de confiance empirique ICe 95 % 2,1–2,3) et 9,1 (ICe 95 %, 8,9–9,2) décès supplémentaires (pour 1 000 décès cardiovasculaires). L’insuffisance cardiaque est apparue comme la plus sensible à ces températures extrêmes qui, dans ce contexte, ont été associées respectivement à 2,6 (ICe 95 %, 2,4–2,8) et 12,8 (ICe 95 %, 12,2–13,1) décès sur 1 000 décès en relation avec cet état pathologique.
Cette étude internationale multicentrique de grande envergure souligne le rôle néfaste des températures extrêmes sur la mortalité cardiovasculaire, dans toutes les étiologies prises en compte, notamment les cardiopathies ischémiques, les AVC et les arythmies et davantage encore l’insuffisance cardiaque. Le froid extrême semble plus préjudiciable que le pic de chaleur.
Les extrêmes pourraient être à l’origine d’un décès supplémentaire sur cent au cours de la période 1979-2019. Un signal d’alarme pour les décennies à venir, si tant est que le dérèglement climatique se poursuit. Des chiffres qui valent surtout pour les pays du réseau Multi-Country Multi-City Collaborative Network où l’Asie du sud, l’Afrique et le Moyen-Orient sont insuffisamment représentés.
Dr Catherine Watkins